Ce départ doit avoir lieu en vertu d'un accord inédit du régime et des représentants de la population locale, sur le départ de jihadistes du groupe Etat islamique (EI), du Front Al-Nosra et de civils, du camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk et des quartiers voisins de Qadam et de Hajar al-Aswad.
Ces trois quartiers connaissent une profonde dégradation des conditions de vie, causée par le siège imposé par l'armée depuis 2013, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Il s'agit du premier accord de ce genre impliquant l'EI. Quatre tentatives d'évacuation similaires avaient par le passé échoué, selon une source gouvernementale.
L'initiative intervient alors qu'un raid aérien revendiqué par l'armée, a tué vendredi Zahrane Allouche, le chef de Jaich al-Islam (Armée de l'Islam), principal groupe rebelle de la région de Damas. Sa mort porte un coup sévère à l'insurrection et aux négociations entre régime et opposants censées débuter dans un mois selon les experts.
Soutenu par l'Arabie saoudite, Jaich al-Islam contrôle la plus grande partie de la banlieue est de la capitale qui est régulièrement bombardée par les forces gouvernementales et l'aviation russe. Le groupe est accusé par le régime de bombarder Damas. Zahrane Allouche "est mort dans un raid contre la localité d'al-Marj, dans la Ghouta orientale avec les commandants de Jaich al-Islam", a affirmé à l'AFP un des responsables du mouvement.
Quelques heures après, les principaux responsables du groupe ont élu un nouveau chef, Abu Himam al-Buwaydani, un combattant de 40 ans dont la famille entretient des liens étroits avec les Frères musulmans, a indiqué à l'AFP Abdel Rahman, le dirigeant de l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Dans une déclaration télévisée, un porte-parole de l'armée syrienne a indiqué que les forces du régime avaient mené les raids.
Un responsable de la sécurité a expliqué à l'AFP que ces raids avaient été menés par deux avions syriens qui ont tiré à deux reprises quatre missiles fournis par Moscou. Ils ont ciblé une réunion secrète de dirigeants de plusieurs groupes islamistes, qui visait à réorganiser les forces militaires après la prise de la localité de Marj al-Sultan.
Plusieurs dizaines de dirigeants et des gardes du corps ont été tués, dont 12 de Jaich al-Islam et sept d'Ahrar al-Cham, un autre groupe rebelle important, selon la même source.
Un salafiste anti-EI
Généralement en treillis, arborant une barbe noire, Zahrane Allouche, 44 ans, avait été arrêté par le régime en 2009 et libéré en juin 2011 lors d'une amnistie générale, trois mois après le début du conflit qui a fait plus de 250.000 morts. Il avait échappé à plusieurs tentatives d'assassinats. Appelé d'abord Bataillon de l'Islam (Liwa al-Islam, en arabe), le groupe a pris le nom d'Armée de l'Islam en septembre 2013 et compte 64 bataillons. Ce mouvement d'inspiration salafiste est très anti-alaouite (confession du président Bachar al-Assad) et partisan d'un Etat islamique même s'il avait adopté récemment une rhétorique plus modérée.
Hostile à l'organisation Etat islamique (EI), le groupe avait exécuté en juillet 18 jihadistes, en imitant les mises en scène macabres de ses adversaires. Il avait également placé début novembre des alaouites et des soldats du régime dans des cages sur des places publiques pour s'en servir comme de boucliers humains face aux raids de l'aviation de Damas. La mort de Zahrane Allouche survient au moment où l'armée syrienne a lancé une très grande opération contre son fief sur le flanc est de la capitale.
Dislocation de la rébellion ?
Le mouvement avait assisté à Ryad à une réunion des principaux groupes de l'opposition. Les participants avaient annoncé le 10 décembre leur accord pour des négociations avec Damas, mais exigé le départ du président Bachar al-Assad avec le début d'une éventuelle période de transition. Des pourparlers doivent se tenir à Genève fin janvier et le régime a indiqué qu'il était prêt à y prendre part, disant cependant qu'il attendait de savoir quels groupes de l'opposition allaient y participer.
Pour l'expert Aron Lund, sa mort "pourrait affecter le processus de paix en déstabilisant l'Armée de l'Islam et en l'affaiblissant." "Les négociations avaient besoin de l'implication d'extrémistes comme Zahrane Allouche pour leur donner de la crédibilité", a-t-il ajouté. Selon lui, "au sein de la rébellion syrienne, Zahrane Allouche a été l'un des rares à réussir à centraliser (le pouvoir). Sa mort pourrait entraîner sa dislocation, étant donné que la faction centrale était l'Armée de l'Islam, qu'il a créée et dirigée d'une poigne de fer et qui inclut plusieurs membres de sa famille et des gens de sa ville natale de Douma".