Vendredi, le président américain Donald Trump, dont le pays dirige une coalition antijihadistes appuyant l'alliance arabo-kurde, avait laissé entendre une victoire imminente.
"Dans un laps de temps très court, qui ne durera pas plus que quelques jours, nous annoncerons officiellement la fin de l'existence de l'EI", a déclaré le commandant des Forces démocratiques syriennes (FDS), Jia Furat, sur la base d'Al-Omar, près du front, dans l'est de la Syrie.
Selon ce commandant, les jihadistes sont désormais assiégés dans un quartier dont la surface est estimée à environ un demi-kilomètre carré, dans le village de Baghouz, près de la frontière irakienne.
Les FDS passent au peigne fin les vergers des alentours de Baghouz "à la recherche de combattants de l'EI dissimulés dans des tunnels" et prêts à commettre des attaques kamikazes, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"Nous sommes en train de voir comment en finir avec ces tunnels: soit les sceller, soit les faire exploser", a expliqué Adnane Afrine, porte-parole des FDS. Il a indiqué que certains membres des FDS étaient "otages" de l'EI.
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A quelques centaines de mètres du front à Baghouz, une correspondante de l'AFP a entendu des tirs d'artillerie et deux raids aériens sur le réduit jihadiste. D'énormes cratères étaient visibles dans la route tapissée de carcasses de voitures et d'immeubles détruits.
Après sa montée en puissance en 2014, l'EI avait établi un "califat" sur un territoire vaste comme la Grande-Bretagne à cheval sur l'Irak et la Syrie. Les jihadistes y avaient établi leur propre administration, exécutant et torturant ceux qui ne respectaient pas leur loi et fomentant des attentats meurtriers y compris à l'étranger.
Ces derniers jours, l'offensive est ralentie par la présence des mines posées par les jihadistes, de tunnels et des attentats kamikazes.
Les FDS et la coalition internationale antijihadistes menée par les Etats-Unis qui les appuie, ont également affirmé samedi que la présence de "nombreux civils", même si des dizaines de milliers ont déjà fui le secteur, ralentit leur progression.
"Il y a toujours de nombreux civils à l'intérieur" du réduit de l'EI et ce qui ralentit l'opération, a indiqué à l'AFP, Adnane Afrine.
"Un grand nombre de femmes et d'enfants de jihadistes, se trouvent sous-terre" dans les tunnels ou dans des caves, a-t-il ajouté.
Les civils qui ont pu s'échapper "racontent que l'EI les utilise comme boucliers humains", a affirmé à l'AFP un porte-parole de la coalition antijihadistes, le colonel Sean Ryan, précisant que les frappes aériennes avaient été limitées pour protéger ces civils.
Les journalistes de l'AFP n'ont pas vu hier, samedi, de civils au point de rassemblement (tenu par les FDS) qu'ils rejoignent habituellement après avoir fui le réduit jihadiste.
"Le tempo de la bataille ne doit pas être dicté par des impératifs politiques, il faut d'abord protéger les civils et possibles otages", a déclaré à l'AFP Nadim Houry de l'organisation de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW).
Depuis le lancement en décembre de l'offensive des FDS dans ce dernier réduit, près de 40.000 personnes ont fui la zone des combats, selon l'OSDH. Environ 3.800 seraient des combattants de l'EI, d'après la même source.
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Parmi eux de nombreux membres des familles de jihadistes, dont des Français, des Allemands, des Russes, des Ukrainiens et de nombreux Irakiens, ont constaté des journalistes de l'AFP.
"Il y a une scission entre les combattants jihadistes locaux et étrangers sur le terrain. Les jihadistes locaux veulent abandonner tandis que les étrangers empêchent toute reddition", a indiqué à l'AFP M. Afrine.
Des "Irakiens, des Turcs et des Européens" dont des Français, ainsi que des Egyptiens et des Libyens, sont encore présents dans le réduit, selon ce porte-parole des FDS.
Les personnes sortant du réduit jihadiste sont fouillées et interrogées à la recherche de jihadistes potentiels.
Les civils, dont de très nombreuses épouses et enfants de jihadistes, sont transférés vers des camps de déplacés dans le nord de la Syrie.
Alors que les Etats-Unis avait annoncé en décembre le retrait des quelque 2.000 militaires américains déployés en Syrie, le vice-président Mike Pence a assuré samedi que son pays garderait "une forte présence dans la région" et continuerait "de traquer les vestiges de l'EI partout".
La lutte contre l'EI fait partie des "priorités" de la France en Syrie tout comme "la protection des civils et l'accès complet, sûr et sans entraves de l'aide humanitaire", a rappelé hier, samedi, le président français Emmanuel Macron lors d'un entretien téléphonique avec son homologue russe Vladimir Poutine.
La bataille contre l'EI n'est qu'un des fronts de la guerre en Syrie qui a éclaté en 2011 après la répression par le régime de manifestations prodémocratie. Ce conflit s'est complexifié avec l'implication de groupes jihadistes et a fait plus de 360.000 morts.
Dix-huit civils, dont huit enfants, ont été tués depuis vendredi dans des bombardements du régime contre la province d'Idleb (nord-ouest), contrôlée par des jihadistes dominés par l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).