John Kerry et Vladimir Poutine se sont entretenus pendant plus de trois heures, après une réunion de la même durée entre le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov et son homologue américain venu présenter ses propositions.
Les deux grandes puissances, qui pilotent la relance du processus diplomatique sur la Syrie, cherchaient à rapprocher leurs positions parfois antagoniques et M. Lavrov a annoncé "une nouvelle réunion au niveau ministériel du groupe international" sur la Syrie le 18 décembre à New York.
Cette conférence, qui était évoquée depuis des jours mais pas formellement confirmée, s'inscrit dans le processus dit de Vienne, par lequel 17 pays, y compris la Russie et l'Iran, sont tombés d'accord le 14 novembre sur une feuille de route politique pour la Syrie.
Moscou et Washington souhaitent un "projet de résolution" au Conseil de sécurité de l'ONU qui "entérine les principes établis par les documents de Vienne", selon MM. Lavrov et Kerry. Le porte-parole du département d'Etat à Washington, John Kirby, a vanté par avance une réunion à New York qui se déroulera avec "le même niveau d'activité et d'énergie" qu'à Vienne.
Processus politique
La feuille de route dressée dans la capitale autrichienne prévoit une rencontre à compter du 1er janvier entre représentants de l'opposition et du régime en Syrie, un gouvernement de transition dans les six mois, et des élections dans les 18 mois.
"Mais aujourd'hui nous ne nous sommes pas concentrés sur nos divergences à propos de ce qui peut et ce qui ne peut pas être fait immédiatement au sujet d'Assad, nous nous sommes concentrés sur le processus politique au moyen duquel les Syriens pourront prendre des décisions sur l'avenir de la Syrie", a-t-il ajouté.
En dépit de relations tendues depuis au moins deux ans et de sanctions américaines contre Moscou en raison de la crise en Ukraine, les Etats-Unis et la Russie tentent de trouver de concert une porte de sortie diplomatique sur la Syrie. A cet égard, M. Kerry a affirmé que son pays "n'avait pas pour politique de chercher à isoler la Russie", mais qu'il souhaitait plutôt "collaborer".
Eviter de bombarder "l'opposition saine"
En revanche, M. Kerry a fait part à M. Poutine de son "inquiétude" concernant les bombardements russes contre des rebelles modérés et non contre l'organisation Etat islamique (EI) en Syrie. Et ce malgré la promesse faite fin novembre par le président russe à son homologue français François Hollande que son armée allait désormais "s'abstenir" de bombarder "l'opposition saine".
Depuis qu'a démarré le 30 septembre son intervention en Syrie, à la demande de Damas, Moscou, qui affirme avoir détruit 8.000 "cibles terroristes", est accusé par les Occidentaux de viser surtout l'opposition au président Bachar al-Assad, dont elle est l'indéfectible alliée.
39 morts dans un raid présumé russe Sur le terrain, l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) basé au Royaume-Uni mais qui dispose d'un large réseau de sources en Syrie, a annoncé qu'au moins 39 civils avaient péri mardi dans des raids d'avions présumés russes sur des marchés du nord de la Syrie.
Avant Moscou qu'il a quitté mardi soir, John Kerry avait participé lundi à Paris à une réunion d'une dizaine de pays occidentaux et arabes soutiens de l'opposition syrienne. Le ministre américain s'était entretenu avec ses homologues du Qatar et de la Jordanie, Amman étant chargé de dresser une liste des groupes "terroristes" qui devraient être exclus du processus de négociations, une question éminemment sensible.
Définition des groupes "terroristes"
Sergueï Lavrov a concédé qu'il restait encore du travail, tout le monde n'étant pas d'accord sur la définition des groupes "terroristes", à l'exception des "organisations Etat islamique et front Al-Nosra".
"Nous continuerons à nous coordonner sur le reste de la liste à la prochaine rencontre" à New York, a assuré le ministre russe.
Lundi, le président américain Barack Obama avait assuré que la lutte de la coalition contre Daech en Irak et en Syrie s'était intensifiée, tout en réclamant des progrès "plus rapides" pour détruire le groupe jihadiste.
Son secrétaire à la Défense, Ashton Carter, a quant à lui exhorté la Turquie à "en faire plus" au cours d'une visite de la base turque d'Incirlik (sud) d'où partent les avions américains qui bombardent les bastions de l'EI.