Les accusés sont deux membres présumés du groupe et un homme présenté comme un complice. Les auteurs de la double attaque, revendiquée par Daech, étaient morts sous les balles de la police.
L'imam soupçonné d'avoir endoctriné et recruté une dizaine de jeunes d'origine marocaine dans le village pyrénéen de Ripoll avait été tué dans l'explosion d'une villa à Alcanar (200 kilomètres au sud de Barcelone) provoquée par les explosifs qu'ils stockaient.
Cette déflagration accidentelle avait bouleversé les plans de la cellule jihadiste, qui prévoyait à l'origine de mener des attaques simultanées et coordonnées contre des sites de prestige, comme la célèbre basilique de la Sagrada Familia et le stade du FC Barcelone ou encore la Tour Eiffel.
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Le 17 août 2017 en début d'après-midi, sur l'avenue des Ramblas à Barcelone, un des membres de la bande au volant d'une camionnette roulant à très vive allure percutait la foule, tuant 14 personnes, en majorité des touristes, et en blessant plus d'une centaine.
Le lendemain, dans la cité balnéaire de Cambrils, à 100 km au sud-ouest de Barcelone, cinq de ses acolytes écrasaient avec un véhicule, puis poignardaient plusieurs passants, avant de tomber sous les balles de la police.
Trois jours plus tard, la traque du chauffeur des Ramblas, Younes Abouyaaqoub, s'achevait dans un champ de vignes proche de Barcelone, où il était abattu par la police.
L'accusé principal, Mohamed Houli Chemlal, 23 ans, qui a survécu à l'explosion d'Alcanar, encourt 41 ans de prison, notamment pour appartenance à une organisation terroriste, et fabrication et détention d'explosifs.Driss Oukabir, 31 ans, le frère d'un des jihadistes tués, encourt 36 ans d'emprisonnement pour avoir loué la camionnette utilisée sur les Ramblas.
Le dernier accusé, Said Ben Iazza, 27 ans, risque huit ans pour avoir prêté un véhicule et des papiers aux assaillants.
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Le trio n'est cependant pas poursuivi pour les attaques elles-mêmes, contrairement au souhait des parties civiles. "Pour nous, un membre de la cellule est autant responsable que celui qui commet l'attentat", affirme à l'AFP Robert Manrique, avocat de l'association UAVAT, qui représente 72 victimes.
Pour sa part, l'avocat de Driss Oukabir, Luis Álvarez Collado, a indiqué à l'AFP qu'il demanderait l'acquittement de son client, qui, selon lui, "connaissait à peine" les membres de la cellule.
Le fait qu'il ait loué la camionnette qui a servi à l'attaque des Ramblas "ne signifie pas qu'il savait qu'elle allait être utilisée pour réaliser l'attentat", soutient l'avocat. A l'en croire, son client pensait qu'elle devait servir à un déménagement.
Driss Oukabir avait certes observé la radicalisation de son frère Moussa, mais cela "n'implique pas qu'il savait ce que son frère était en train de faire". Il souligne aussi que son client s'est livré à la police après les attentats, alors qu'il avait l'occasion de s'enfuir.
L'onde de choc provoquée par ces attentats avait été vite éclipsée par la crise politique en Catalogne, notamment le référendum illégal sur l'autodétermination de la région organisé en octobre de la même année, puis la proclamation d'une république indépendante mort-née.
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Depuis lors, l'enquête n'a pas permis de faire la lumière sur toutes les zones d'ombre de l'affaire. Comment la radicalisation de ces jeunes a-t-elle pu passer inaperçue? Comment ont-ils pu acheter du matériel pour fabriquer des engins explosifs sans éveiller l'attention de la police? Avaient-ils des connections à l'étranger, au regard de leurs voyages en Belgique, en France et au Maroc? Pourquoi le fameux imam Abdelbaki Es Satty n'était-il pas sous surveillance?
L'association UAVAT a réclamé avec insistance au Parlement la création d'une commission d'enquête, comme cela avait eu lieu après les attentats jihadistes de mars 2004 dans plusieurs trains de la banlieue de Madrid, qui, avec 191 morts, restent les plus meurtriers perpétrés en Europe.
En vain. "Nous comprenons qu'il y a eu défaillance. Ces défaillances, il nous faut les mettre au jour (...) pour que cela n'arrive plus", affirme Me Manrique.
A ses côtés, Javier Martinez, dont le fils de trois ans avait été écrasé par la camionnette sur les Ramblas, abonde dans son sens. "Je ne récupèrerai jamais la vie de mon fils (...) Mais la menace est toujours là, comme on l'a vu en France ou en Autriche", dit-il en référence à de récentes attaques meurtrières commises par des hommes se réclamant de Daech.
Il est prévu que le procès s'achève le 16 décembre.