Des milliers de personnes ont participé dans une ambiance de fête à la cérémonie d'ouverture au Palais des sports de Radès, près de Tunis. Les quelque 1.200 délégués du mouvement poursuivront leurs travaux ce week-end à Hammamet, à 60 km de la capitale.
En gestation depuis quelques années, la mue d'Ennahda en "parti civil" est présentée par ses dirigeants comme le résultat de l'expérience du pouvoir et du passage de la Tunisie de la dictature à la démocratie.
"Ce n'est pas une décision tombée du ciel mais le couronnement d'un processus historique", a affirmé le président et leader historique du parti, Rached Ghannouchi, 74 ans, qui sauf surprise devrait être réélu à l'issue du congrès. "Nous veillons à garder la religion éloignée des batailles politiques", a-t-il ajouté, jugeant que les mosquées devaient être des lieux "de rassemblement et non de division".
Ghannouchi avait expliqué dans une interview au quotidien Le Monde que son parti "sort(ait) de l’islam politique pour entrer dans la démocratie musulmane". "Invité d'honneur" du congrès, le président Caïd Essebsi, dont le parti Nidaa Tounès avait mené une virulente bataille électorale en 2014 contre Ennahda avant de sceller une alliance, a souligné la portée de sa présence.
"Hésité à venir""Je veux être franc avec vous, j'ai hésité à venir", a-t-il dit. Mais "je suis venu par considération pour les efforts de ce parti pour appuyer le consensus de réconciliation nationale", a-t-il assuré.
"Nous espérons que vous parviendrez pendant vos travaux à affirmer qu'Ennahda est devenu un parti civil tunisien sur le fond et sur la forme", a poursuivi le chef de l'Etat, saluant "l'évolution d'Ennahda sous la conduite de Rached Ghannouchi". Pendant la cérémonie, une grande banderole représentant une carte de la Tunisie, barrée d'un "Non au terrorisme", a été déployée dans les tribunes.
Interdit sous la dictature de Ben Ali et légalisé après le soulèvement de janvier 2011, Ennahda avait remporté un succès historique lors des premières élections de l'après-révolution, fin 2011.
Après deux années mouvementées au pouvoir, il avait toutefois dû se résoudre, à l'issue de longues et pénibles négociations, à céder sa place sur fond de crise politique majeure.
Battu aux élections de 2014, Ennahda s'est associé au nouveau gouvernement malgré les tiraillements de sa base.
"Le peuple veut Ennahda de nouveau!", a plusieurs fois scandé la foule. Ce 10e congrès se tient sous forte protection policière et des barrages ont été installés sur une partie de la route menant au site de Radès.
Au cours du week-end, le parti, pour lequel un changement de nom est évoqué, doit évaluer son action et tirer le bilan de ses deux ans au pouvoir au sein d'une "troïka". Il doit aussi adopter des "feuilles de route" politique, économique et sociale pour les années à venir.