La séance plénière à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), qui doit débuter vers 08H00 GMT, est le point d'orgue d'un feuilleton qui a commencé le 2 juin, lorsque le président Béji Caïd Essebsi a proposé la formation d'un gouvernement d'union nationale face aux critiques contre le gouvernement.
M. Essid, qui n'avait pas été informé de cette initiative par le chef de l'Etat, a d'abord dit être prêt à démissionner si l'intérêt du pays l'exigeait. Mais il a ensuite dénoncé des pressions et annoncé qu'il ne partirait que si le Parlement lui retirait sa confiance.
Accusé d'inefficacité, le gouvernement formé il y a un an et demi a déjà été largement remanié en janvier. Car si la Tunisie a réussi sa transition politique après la révolution de 2011, son économie est en crise (0,8% de croissance en 2015), le taux de chômage reste très élevé et le pays a été visé par plusieurs attaques jihadistes sanglantes.
Sort scellé Sauf surprise, le gouvernement ne devrait pas obtenir les 109 voix nécessaires à son maintien. Plusieurs partis, dont les quatre formant la coalition gouvernementale, ont d'ores et déjà annoncé leur intention de ne pas renouveler leur confiance au cabinet.
"Nous sommes contre ce gouvernement", a déclaré à l'AFP Mongi Harbaoui, de Nidaa Tounès. Ce parti fondé par le président Essebsi a remporté les législatives de 2014 avant d'imploser et de perdre la première place au Parlement au profit des islamistes d'Ennahda. "Le pays est descendu très bas, notamment au niveau économique. Nous ne pouvons pas continuer ainsi", a ajouté M. Harbaoui."La prochaine étape nécessite un gouvernement dirigé par quelqu’un qui aie des qualités spéciales, comme le courage et la capacité de prendre des décisions cruciales", a de son côté dit Imed Hammami, le porte-parole d’Ennahda.
Le Front populaire, une coalition de gauche, a pour sa part blâmé les partis au pouvoir pour avoir formé "une équipe gouvernementale hétérogène et sans programme". Les spéculations vont bon train sur le successeur de M. Essid, mais aucun nom ne se détache pour l'instant.
Aux termes de la Constitution, s'il n'obtient pas la confiance, le gouvernement est considéré comme démissionnaire et le président doit charger la "personnalité la plus apte" de former un nouveau cabinet.
PressionsHabib Essid, 67 ans, un indépendant qui a occupé plusieurs postes à responsabilité sous le dictateur Zine El Abidine Ben Ali et a été ministre de l'Intérieur après la révolution, est accusé de manquer de charisme et d'audace.
Mais bien décidé à ne pas sortir par la petite porte, il a lui-même demandé un vote de confiance, affirmant se livrer à une "leçon de démocratie" en ne cédant pas aux pressions pour qu'il démissionne.
"Je refuse de dévier du processus démocratique. Il s’agit du premier test pour la démocratie naissante en Tunisie. C’est pourquoi, malgré les fortes pressions, j’ai tenu bon", a-t-il déclaré dans un entretien à deux quotidiens nationaux."Moi, je ne démissionne pas. Je ne suis pas le soldat qui fuit le champ de bataille", avait-il auparavant lancé dans une interview à une télévision privée.
Ces dernières semaines, ses proches ont attribué, sous le couvert de l'anonymat, les pressions au camp du fils du chef de l'Etat, Hafedh Caïd Essebsi, un dirigeant de Nidaa Tounès.
"Nous savons qu’il y a eu des difficultés, des défaillances", a dit à l'AFP une source gouvernementale. "Mais (...) on sort du premier ramadan sans attentat (depuis 2012). L'agenda économique et social est clair avec le plan quinquennal. Tout ça commence à bouger, ça commence à être (...) concret".
"Quand on vient déstabiliser le gouvernement dans ce contexte, c’est une question de caprices, d’intérêts sous la table (...). Il n’y a qu’une seule théorie (pour expliquer l’initiative): c’est une affaire de famille", a dénoncé cette source.