Le bombardement à Kiev, le premier depuis la mi-avril, est intervenu après un déplacement jeudi du patron de l'ONU à Boutcha et d'autres banlieues de Kiev -théâtres d'exactions imputées par les Ukrainiens aux forces russes- où il avait appelé Moscou à «coopérer» avec l'enquête de la Cour pénale internationale sur de possibles crimes de guerre.
«Dans la soirée, l'ennemi a tiré sur Kiev. Deux frappes sur le quartier de Chevchenkovsky», «sur les étages inférieurs d'un immeuble résidentiel», a dit le maire de la capitale, Vitali Klitschko.
Selon le président ukrainien Volodymyr Zelensky, ce sont «cinq missiles» qui se sont abattus sur Kiev. «Cela en dit long sur la véritable attitude de la Russie envers les institutions internationales, sur les efforts des dirigeants russes pour humilier l'ONU et tout ce que l'organisation représente», a commenté Volodymyr Zelensky dans une vidéo.
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Des journalistes de l'AFP ont vu un étage d'un bâtiment en feu avec de la fumée noire s'échappant des fenêtres brisées, tandis que de nombreux policiers et des secouristes étaient présents. D'après les services de secours, dix personnes ont été blessées dans les attaques de missiles.
Antonio Guterres est «choqué» mais «en sécurité», a rassuré un porte-parole des Nations unies, Saviano Abreu, déplorant que «cela soit arrivé à proximité de là où nous nous trouvions», bien que ce soit une «zone de guerre».
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba, selon lequel les engins tirés étaient des missiles de croisière, a évoqué à ce sujet un «acte odieux de barbarie» et le chef de l'administration présidentielle, Andriï Iermak, a appelé à priver la Russie de son droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU.
Quelques heures auparavant, Joe Biden avait réitéré le soutien de son pays à l'Ukraine face «aux atrocités et à l’agression» et demandé une rallonge de 33 milliards de dollars au Congrès. Les Etats-Unis «n'attaquent pas» la Russie mais «aident l'Ukraine à se défendre», a assuré le président américain.
Arrivé hier, jeudi, en Ukraine, où il se rendait pour la première fois depuis le début du conflit, Antonio Guterres s'est entretenu avec Volodymyr Zelensky, regrettant que le Conseil de sécurité n'ait pas réussi à empêcher et arrêter la guerre déclenchée le 24 février par Moscou.
ApocalypseLors de ces deux mois d'invasion, «plus de 8.000 cas» présumés de crimes de guerre ont été identifiés par les enquêteurs ukrainiens, a indiqué la procureure générale d'Ukraine Iryna Venediktova dans un entretien avec le média allemand Deutsche Welle.
«Dix soldats de la 64e brigade de fusiliers motorisés russe, appartenant à la 35e armée russe, ont été mis en examen» pour des crimes de guerre présumés à Boutcha, ont également annoncé ses services.
Le 2 avril, à Boutcha, des journalistes de l'AFP ont découvert une rue jonchée de cadavres, ceux d'hommes portant des vêtements civils. Et les Nations unies ont affirmé avoir documenté le «meurtre, y compris certains par exécution sommaire», de 50 civils, après une mission dans cette ville le 9 avril. La Russie avait démenti début avril toute responsabilité et parlé de corps «mis en scène».
La coordinatrice des Nations unies en Ukraine a annoncé par ailleurs qu'elle partait dans le sud de l'Ukraine préparer une tentative d'évacuation de la ville portuaire assiégée et dévastée de Marioupol, presque entièrement contrôlée par les forces russes.
L'ONU fait «tout son possible» pour évacuer les civils de «l’apocalypse» dans cette cité, a assuré jeudi Antonio Guterres, selon lequel il s'agit d’«une crise dans la crise», ajoutant que «des milliers de civils ont besoin d'une aide vitale».
A Marioupol, le bataillon Azov a indiqué sur Telegram qu'un hôpital militaire situé dans le vaste complexe métallurgique Azovstal -où sont retranchés des combattants ukrainiens- avait été bombardé dans la nuit de mercredi à jeudi. La salle d'opération s'est effondrée et des soldats qui y étaient soignés sont morts et d'autres ont été blessés, a précisé Azov.
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«J'appelle les organisations internationales de défense des droits humains à réagir au fait que la Russie continue d'essayer d'éliminer même les défenseurs de Marioupol qui ne peuvent plus tenir une arme», a réagi sur Telegram Lioudmyla Denissova, chargée des droits humains au Parlement ukrainien.
«Situation très difficile»Parallèlement à la visite d’Antonio Guterres à Kiev, les régions méridionales et orientales de l'Ukraine -où se concentrent les assauts russes- sont sous un feu nourri de bombes.
«L'ennemi intensifie son offensive. Les occupants effectuent des frappes pratiquement dans toutes les directions», avec une activité particulièrement intense dans les régions de Kharkiv et dans le Donbass, a souligné l'état-major ukrainien. Selon lui, l'armée russe tente d'empêcher le transfert de forces ukrainiennes du nord vers l'est.
Selon le gouverneur de Kharkiv, Oleg Synegoubov, cinq personnes ont été tuées hier, jeudi, dans des bombardements sur la ville et sa région. Les troupes russes, qui tentaient d'avancer depuis Izioum vers «Brazhkivka, Dovhenky et Velyka Komyshuvakha», ont subi «de lourdes pertes et ont été contraintes de battre en retraite», a-t-il assuré sur Telegram.
Dans le Donbass, à Lyman, «la situation est très difficile, toute la commune est encerclée», a indiqué à l'AFP Andriï Pankov, chef de la région administrative de Kramatorsk. Selon lui, près de la moitié du territoire communal est occupé par les chars et colonnes russes, venues du nord par Izioum, capturée précédemment.
«On ne sait pas ce que sera la situation demain matin», redoute Oleksiï Migrine, chef des secours de la région.
L'armée russe a de son côté affirmé avoir détruit dans la nuit de mercredi à jeudi avec des «missiles de haute précision» deux dépôts d'armements et de munitions dans la région de Kharkiv, et effectué des raids aériens sur 67 sites militaires ukrainiens.
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A Kherson, seule ville d'importance dont les Russes aient complètement pris le contrôle depuis le début de leur invasion, l'administration locale russe a dit jeudi vouloir introduire le rouble à la place de la hryvnia ukrainienne à partir du 1er mai. «Un acte d'annexion et une violation grave par la Russie» de la Charte de l'ONU, a dénoncé Lioudmyla Denissova.
Dans le sud, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) n'a pu depuis l'invasion avoir accès à la centrale nucléaire de Zaporjie, contrôlée par les Russes. Le directeur de l'AIEA, Rafael Grossi, de retour d'Ukraine, s'est dit «préoccupé».
Un conseiller de la présidence ukrainienne a quant à lui laissé entendre que Kiev pourrait attaquer des cibles militaires en Russie. «L'Ukraine se défendra par tous les moyens, y compris avec des frappes sur des entrepôts et des bases des assassins russes. Le monde reconnaît ce droit», a écrit sur Twitter Mykhaïlo Podoliak.