Au 80e jour de l'invasion de l'Ukraine, les forces russes continuent d'essayer de progresser dans le Donbass, région stratégique de l'Est que des séparatistes prorusses contrôlent partiellement depuis 2014, et dont elles ont fait leur objectif principal depuis leur retrait des environs de Kiev fin mars.
Samedi soir, «les principaux efforts russes sont concentrés sur la préparation d'opérations offensives» autour des localités de Severodonetsk, Soledar et Bakhmout, a précisé le ministère ukrainien des Affaires étrangères, qui observe aussi un effort de la marine russe pour se renforcer en mer Noire.
Samedi matin, le ministère ukrainien de la Défense recensait une trentaine de bombardements en 24 heures dans la région de Lougansk, une des deux provinces du Donbass avec celle de Donetsk. Dix attaques russes ont aussi été repoussées en 24 heures dans les deux régions, selon l'état-major ukrainien.
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Les Russes tentent notamment depuis trois semaines, sans succès, de franchir la rivière Severskyi Donets, au niveau du village de Bilogorivka, dans la région de Lougansk.
Dans ce village quasi-désert, une équipe de l'AFP a vu les routes jonchées d'équipements militaires abandonnés.
Il ne restait que trois coins couverts de suie d'une école bombardée il y a une semaine, une frappe que Kiev présente comme l'un des plus graves crimes commis par les forces russes depuis le début de leur invasion de l'Ukraine, avec 60 civils tués.
Dans cette région de l'Est ukrainien, les Russes ne parviennent pas à faire de «prise significative», a estimé un responsable américain de la Défense sous couvert d'anonymat.
Plus au nord, dans la province de Kharkiv, les autorités ukrainiennes ont affirmé avoir lancé une «contre-offensive» dans les environs d'Izioum. La ville elle-même, stratégique pour l'offensive de Moscou sur le Donbass, est sous contrôle russe depuis le 1er avril.
«Tournant»?La situation semble aussi avoir basculé autour de Kharkiv, deuxième ville du pays. Les forces russes ont dû se retirer de plusieurs localités au nord-est de la ville, selon l'état-major ukrainien.
Dans ce secteur, samedi soir, le ministre ukrainien des Affaires étrangères a précisé que les soldats russes «concentraient leurs efforts sur le maintien de leurs positions, le contrôle des voies d'approvisionnement (…) au nord et à l'est de Kharkiv, ainsi que l’empêchement de l'avancée des troupes ukrainiennes vers la frontière».
La guerre connaîtra un «tournant» en août et la Russie sera défaite «avant la fin de l’année», a assuré le chef du renseignement militaire ukrainien, Kyrylo Boudanov, dans un entretien à la chaîne britannique Sky News diffusé vendredi soir.
Mais selon l'Institut américain d'étude de la guerre (ISW), «l'Ukraine et ses partenaires occidentaux ne disposent probablement que d'une fenêtre d'opportunité réduite pour appuyer une contre-offensive dans les territoires occupés» par la Russie. Vladimir Poutine «entend probablement annexer le sud et l'est de l'Ukraine à la Fédération de Russie dans les prochains mois», selon cet institut.
Le temps semble aussi compté pour les derniers combattants ukrainiens de l'aciérie Azovstal, dernière poche de résistance dans le port stratégique de Marioupol, à la pointe sud du Donbass.
Alors que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a évoqué vendredi des «négociations très difficiles» pour obtenir l'évacuation de 38 combattants gravement blessés -sur quelque 600 blessés au total-, certains de leurs proches ont appelé samedi le président chinois Xi Jinping à intervenir auprès de Vladimir Poutine.
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«J'attends avec impatience le soutien américain à de nouvelles sanctions», a espéré samedi le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans un communiqué après la visite à Kiev d'une délégation parlementaire américaine menée par Mitch McConnell, le chef de la minorité républicaine au Sénat.
«Conversation directe»Hors d'Ukraine, la candidature imminente de la Finlande -et sans doute aussi de la Suède- à l'Otan est le principal point de tension avec Moscou.
Le président finlandais Sauli Niinistö en a officiellement informé samedi Vladimir Poutine par téléphone. «La conversation a été directe et sans détour et s'est passée sans contrariété. Eviter les tensions a été considéré comme important», a affirmé Sauli Ninistö, interlocuteur très régulier du président russe ces dernières années.
Vladimir Poutine lui a signifié que le renoncement d'Helsinki à son non-alignement militaire historique «serait une erreur, puisqu'il n'y a aucune menace à la sécurité de la Finlande», selon le Kremlin.
Moscou a jeudi menacé de riposter avec des mesures «technico-militaires», sans préciser lesquelles. Dans la nuit de vendredi à samedi, l'exportation d'électricité à la Finlande -environ 10% de la consommation du pays nordique- a été suspendue.
La plupart des pays de l'Otan ont apporté leur soutien à une adhésion d'Helsinki, sauf la Turquie qui menace de bloquer.
La Finlande et la Suède ne peuvent être admises dans l'Otan qu'après un vote à l'unanimité de ses membres. Le chef de la diplomatie turque Mevlut Cavusoglu n'a cependant pas complètement fermé la porte et proposé d'en parler avec ses alliés et les pays concernés.
La Turquie reproche à ces deux pays d'abriter des membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), organisation considérée comme «terroriste» par Ankara (mais aussi par l'UE et les Etats-Unis), et pourrait leur demander des contreparties.
«Elargir les sanctions»Dans ce contexte, les chefs de la diplomatie du G7 (Allemagne, France, Italie, Canada, Etats-Unis, Japon et Royaume-Uni), réunis à Wangels (Allemagne), ont indiqué qu'ils ne reconnaîtraient «jamais» les frontières que la Russie veut imposer à l'Ukraine. Et appelé de nouveau le Bélarus, voisin de l'Ukraine et allié de Moscou, à «cesser de faciliter l'intervention de la Russie».
Dans leur communiqué final, les sept puissances ont promis «d'élargir les sanctions» économiques à «des secteurs dont la Russie est particulièrement dépendante», tout en exhortant la Chine à «ne pas saper» ces mesures.
L'Union européenne s'était par ailleurs engagée vendredi à apporter une aide supplémentaire d'un demi-milliard d'euros pour soutenir le combat de l'Ukraine, en la portant «à deux milliards d'euros au total».
Les 27 pays de l'UE peinent cependant à s'entendre sur un embargo sur le pétrole russe, la Hongrie ayant jugé insuffisante la dérogation obtenue.
Une rencontre informelle des ministres des Affaires étrangères de l'Otan a débuté samedi à Berlin, consacrée à l'Ukraine. La Suède et la Finlande vont y avoir des entretiens bilatéraux avec la Turquie pour tenter de surmonter son hostilité.
L'Ukraine favorite de l'EurovisionA Kiev, où la vie quotidienne revient à la normale, le conseil municipal a rebaptisé samedi un emblématique monument soviétique: l'Arche de l'Amitié des Peuples est devenu l'Arche de la Liberté du Peuple ukrainien, a annoncé le maire de la capitale, Vitali Klitschko.
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Si de nombreux lieux ou monuments de la capitale sont appelés à être ainsi «décommunisés», le maire a souligné que la désignation des nouveaux noms impliquerait «des spécialistes», notamment des historiens, «pour ne pas prendre de décision hâtive».
Beaucoup d'Ukrainiens s'apprêtaient par ailleurs à suivre en direct samedi soir la finale de l'Eurovision, avec l'espoir que leur chanson, «Stefania», donnée favorite, l'emporterait lors de ce concours dont la Russie et le Bélarus ont été exclus.
«Gagner l'Eurovision nous donnerait beaucoup d'espoir de gagner la guerre» contre la Russie, confiait une fan ukrainienne, Maria Lembak, 40 ans, depuis Turin (Italie) où se tient la finale.