"Je ne peux pas comprendre que des migrants innocents soient traités de cette façon et que leurs droits les plus élémentaires soient violés de manière aussi flagrante", a déclaré à la MAP, Ibrahim Guisse, membre associé du Centre de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté.
Plusieurs centaines de migrants originaires d’États d’Afrique subsaharienne ont été arrêtés durant les derniers jours, puis envoyés dans un camp à Tamanrasset, dans le sud de l’Algérie. Une partie d’entre eux a été déjà expulsée vers le Niger, alors que les autres se trouvent toujours sur place dans une situation jugée très précaire par les ONG de défense des droits de l’Homme.
Le spécialiste d’origine sénégalaise dans les questions migratoires s’est interrogé sur le timing choisi par les autorités algériennes pour orchestrer leur campagne d’acharnement contre des ressortissants africains "en fonction de leur couleur, leur race et leur origine ethnique".
"Il est urgent pour l’Algérie, a-t-il insisté, de redresser la situation en mettant en place les conditions requises pour un dialogue global sur la question de l’immigration qui soit inclusif et soucieux de la protection des droits humains".
Le chercheur à l’université de Genève a exhorté le pouvoir algérien à tirer les leçons qui s’imposent du modèle marocain en matière de traitement des immigrés issus des pays frères africains, rappelant la politique prometteuse de migration et d’asile lancée à l’initiative du roi Mohammed VI en 2013. Dans la foulée de cette chasse aux migrants en Algérie, un haut responsable algérien a accusé les ressortissants des pays subsahariens de propager le sida et d’autres maladies infectieuses dans le pays.
Farouk Ksentini, président de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH) et avocat du pouvoir, a prétendu dans des déclarations à la presse locale que "ces maladies sont considérées comme quelque chose d’habituel et de normal par cette communauté".
Le 30 septembre, Amnesty International avait tiré la sonnette d’alarme sur la situation des migrants subsahariens en Algérie. Il s’agit d’une communauté estimée à 150.000 personnes originaires majoritairement du Nigeria, du Niger, du Libéria, du Cameroun, du Mali et de la Guinée, selon les autorités algériennes.
Déclenchée le 1er décembre 2016 à Alger, l’opération a concerné tous les quartiers dans lesquels vivent les migrants subsahariens dont les rafles n’épargnent ni les femmes, ni les enfants, au point qu’un syndicat autonome a dénoncé "la plus grande chasse à l’homme noir depuis l’indépendance".