Après un mois de protestations qui ont fait une trentaine de morts, l'opposition n'a pas l'intention de laisser retomber la pression: "Nous voulons convoquer tout le peuple du Venezuela, dans les 24 États du pays, (...) contre la dictature", a déclaré samedi Freddy Guevara, le vice-président du parlement, la seule institution publique dominée par l'opposition, dans une conférence de presse.
"Nous allons marcher jusqu'aux sièges de la Cour suprême et du Conseil national électoral, dans le calme mais avec fermeté", deux organes "phagocytés" par le gouvernement, a-t-il plaidé.
Il a précisé que lundi l'opposition entendait organiser plusieurs "manifestations simultanées", à Caracas et dans les grandes villes du pays.
Depuis début avril, l'opposition multiplie les manifestations pour obtenir des élections générales anticipées, avant la fin du mandat du président Maduro en décembre 2018. Et sept Vénézuéliens sur dix souhaitent désormais le départ de Nicolas Maduro dans ce pays riche en pétrole mais plongé dans une grave crise économique, crise accentuée par la chute des cours du pétrole.
Le Vatican en "facilitateur"
Le pays souffre d'une inflation, la plus élevée du monde, qui devrait atteindre 750% en 2017, selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), et d'une pénurie qui concerne les deux-tiers des produits de base.
Tandis que les opposants dénoncent la répression du gouvernement, avec 28 personnes tuées et des centaines blessées, Nicolas Maduro les a accusés de commettre "des actes de terrorisme" pour faciliter un coup d'État et une intervention étrangère sous l'égide des États-Unis.
C'est la décision fin mars de la Cour suprême, réputée proche de M. Maduro, de s'arroger les pouvoirs du Parlement, donnant ainsi les pleins pouvoirs au camp présidentiel, qui avait mis le feu aux poudres.
Devant le tollé diplomatique et les accusations de "coup d'État" par l'opposition, l'autorité judiciaire avait fait marche arrière 48 heures plus tard. Sans pour autant calmer la colère des anti-Maduro, ni apaiser la pression diplomatique.
Dans l'avion qui le ramenait d'un voyage de 48 heures en Egypte, samedi soir, le pape François a assuré que le Saint-Siège était disposé à intervenir comme "facilitateur" face à la crise au Venezuela, mais "avec des conditions claires".
"Je crois que cela doit se faire avec des conditions. Des conditions très claires", a déclaré le pape, sans pour autant préciser celles-ci. Sans préciser ces conditions, le pape a estimé que l'opposition était "divisée" sur cette possibilité de reprendre les négociations avec le gouvernement chaviste, du nom du défunt président vénézuélien Hugo Chavez, au pouvoir de 1999 à 2013.
"Dialogue version Zapatero"
"Il y a eu une intervention du Saint-Siège à la demande forte des quatre présidents (quatre anciens dirigeants espagnol, dominicain, panaméen et colombien) qui travaillaient comme facilitateurs. Cela n'a pas marché. Car les propositions n'étaient pas acceptées".
Henrique Capriles, l'un des principaux dirigeants de l'opposition vénézuélienne, a écarté dès samedi l'idée de reprendre le dialogue avec le gouvernement, et ce malgré cette offre de services du pape.
"Ce n'est pas vrai (que l'opposition est divisée). (Le pape) parle comme si certains voulaient dialoguer et d'autres non. Nous les Vénézuéliens, nous voulons tous dialoguer, mais nous ne sommes pas disposés à un dialogue version Zapatero", a répondu M. Capriles, ancien candidat à l'élection présidentielle de 2013, parlant à la presse lors d'une cérémonie en souvenir des personnes tuées lors des manifestations d'avril.
M. Capriles faisait ici référence à l'ancien Premier ministre espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, à la tête de la mission de l'Union sud-américaine des Nations (Unasur) qui avait accompagné cette tentative de dialogue politique entre pouvoir et opposition initiée en octobre sous l'égide du Saint-Siège.
A diverses reprises, M. Capriles avait accusé M. Zapatero de "blanchir" le président Nicolas Maduro via ce faux dialogue, qui avait finalement pris fin en décembre lorsque l'opposition avait accusé le gouvernement de violer ses engagements sur l'instauration d'un calendrier électoral et la libération des prisonniers politiques.