Il ne s'agit pas de réfugiés syriens se bousculant aux frontières de l'Europe, en provenance de la "chaosphère" engendrée par le boucher de Damas, Bachar Al Assad. Les images proviennent d'Alger, précisément de l'aéroport Houari Boumediène, mais ressemblent à s'y méprendre pourtant à celles prises aux frontières de la Hongrie ou de la Slovénie, entre autres pays d'Europe centrale. Des passagers agglutinés comme des sardines derrière des filets de sécurité, sous le regard menaçant de chiens renifleurs, tenus en laisse par des hommes en uniforme, déployés autour de milliers de passagers attendant impatiemment de pouvoir embarquer vers des cieux plus cléments.
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«On dirait Auschwitz», assène un Algérien lambda sur la page Info trafic Algérie, cité par le site "Tout sur l'Algérie". «Wallah il ne manque que les bottes et les fouets…Arbeit mach Frei (le travail c’est la liberté) … Camp de Dachau», rouspète-t-il.
Raison directe de ce spectacle effarant: une grève surprise observée hier mardi par le personnel de maintenance d'Air Algérie, une compagnie qui, à l'instar de l'Algérie toute entière, est bord de la faillite. Une faillite à tous les étages d'un pays rongé par une crise financière inédite, en raison du plongeon des cours des hydrocarbures (98% des exportations et 60% des recettes de l'Etat), avec ce que cela comporte de répercussions désastreuses sur le vécu du peuple algérien frère, mis au régime d'une sévère cure d'austérité, le taux de chômage qui atteint des sommets records (30%°, notamment parmi les jeunes)... sans compter cette vacance sidérale au sommet de l'Etat algérien, personnifié par un "président fantôme" incapable de la moindre motricité, à la faveur d'une guerre sans merci que se livrent le clan présidentiel, mené par Saïd Bouteflika, et le patron de l'armée algérienne, le général-major Gaïd Salah, accusé de préparer un coup de force pour destituer le président malade...
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Pour rappel, Pierre Defraigne, directeur général honoraire à la Commission européenne, se demandait à la mi-décembre 2016 dans les colonnes du quotidien La Libre Belgique si l'Algérie n'allait pas connaître le même chaos qu'en Syrie. «L’Europe doit tirer des leçons de la tragédie d’Alep. Et elle doit le faire vite parce qu’une nouvelle crise menace dans son voisinage immédiat: l’Algérie [...] attend en effet la mort clinique du Président Bouteflika, ce dernier étant en réalité hors d’état de régner depuis plusieurs années", avait-il en effet averti.
Le triste spectacle des passagers algériens bloqués à l'aéroport Boumediène semble mettre en abyme cette sinistre prédiction, dont personne ne veut. Un éventuel effondrement de l'Etat algérien n'est en effet dans l'intérêt de personne et devrait préoccuper tout le monde, notamment les voisins de l'Algérie, au Maghreb comme en Europe, qui craignent, qu'à Dieu ne plaise, une vague d'exode de réfugiés en cas de chute de ce pays de 40 millions d'habitants.