Aux Bahamas, où les autorités s'attendent à une aggravation du bilan plus d'une semaine après le passage de Dorian, de nombreux avions, hélicoptères et bateaux, y compris des navires de croisière, s'affairaient à évacuer les habitants sinistrés vers la capitale Nassau ou vers les Etats-Unis.
A plusieurs milliers de kilomètres au nord, rétrogradé en "cyclone post-tropical très intense" par le Centre canadien de prévision des ouragans (CCPO), l'ouragan a touché terre samedi soir près de Halifax, en Nouvelle-Ecosse, où des vents de jusqu'à 140 km/h ont été mesurés. Plus de 500.000 foyers étaient privés d'électricité en Nouvelle-Ecosse, selon les autorités.
Des images diffusées par les chaînes de télévision montraient les rues de Halifax, désertes, battues par le vent et une grue effondrée sur un immeuble en construction. Aucun blessé n'a été signalé.
"La sécurité des Canadiens est notre priorité absolue et nous sommes prêts à aider le Canada atlantique à la suite de cette tempête", a tweeté le Premier ministre canadien Justin Trudeau. Environ 700 soldats ont été dépêchés dans les provinces de l'est canadien pour aider au rétablissement de l'électricité, au déblaiement des routes et aux opérations de secours éventuelles.
Dorian devait poursuivre sa route dimanche au-dessus de l'est canadien. Des alertes météo ont été émises pour l'Ile-du-Prince-Edouard, le Nouveau-Brunswick, l'est du Québec, Terre-Neuve et le Labrador. La dépression devrait ensuite perdre de la force et s'éloigner au-dessus de l'Atlantique nord.
Les évacuations se sont accélérées samedi aux Bahamas où les autorités ne cessent de prévenir que le bilan provisoire de 43 morts est amené à grossir "considérablement".
Les bâtiments du petit aéroport de Marsh Harbour ont souffert lorsque Dorian s'est acharné sur l'île d'Abaco avec des vents à plus de 250 km/h. Plusieurs hangars ont été soufflés par l'ouragan de catégorie 5, la plus haute, mais la piste est toujours praticable et des centaines de personnes attendaient samedi de pouvoir embarquer pour Nassau, la capitale des Bahamas.
"Cela fait presque une semaine maintenant, les gens n'ont pas de nourriture, pas d'eau. Des corps traînent encore, ce n'est pas sain de rester ici", confie à l'AFP une jeune mère de famille, Chamika Durosier, venue prendre l'air à l'extérieur du terminal pour échapper à l'odeur pestilentielle des toilettes, dont les chasses ne peuvent être tirées, faute d'eau.
"Certains dorment ici depuis trois ou quatre jours, le nombre de places est limité dans les avions", poursuit-elle, encore ébranlée par le choc du passage de Dorian, le toit de la maison qui s'est effondré sur elle et sa fille et les coupures endurées en rampant au sol.
Au port de commerce de Marsh Harbour, plusieurs centaines de personnes attendaient également de partir sous un soleil revenu, dont certaines se protégeaient avec des draps alors que les odeurs des déchets se mêlaient à travers l'île à celles des corps en décomposition.
"On n'a pas d'eau, pas d'électricité. On est en train de mourir, c'est vraiment catastrophique. J'ai dû faire la route à pied pour arriver ici à 04H00 du matin. Et depuis j'attends, je veux vraiment quitter l'île", témoigne Miralda Smith, une Haïtienne qui doit retrouver son mari bahaméen à Nassau.
Un ferry affrété par le gouvernement, pouvant transporter près de 200 personnes, devait rejoindre la capitale samedi. Mais des bateaux de croisière privés participaient aux opérations d'évacuation. L'un d'eux, de la compagnie Bahamas Paradise Cruise Line, est arrivé samedi matin près de Palm Beach, en Floride, avec à son bord plus de 1.500 rescapés de Grand Bahama.
Selon l'ONU, au moins 70.000 personnes ont besoin d'une "assistance immédiate" aux Bahamas, soit l'équivalent de la population des îles d'Abaco et de Grand Bahama, les plus durement touchées.
Les autorités de l'archipel craignent que les conditions sanitaires éprouvantes alourdissent encore un bilan humain dont elles communiquent les chiffres avec beaucoup de prudence.
Il s'élevait vendredi soir à 43 morts --35 à Abaco et huit à Grand Bahama--, mais le Premier ministre Hubert Minnis a de nouveau prévenu qu'il était susceptible de s'alourdir "considérablement".
"C'est l'une des tristes réalités auxquelles nous devons faire face dans cette sombre période", a-t-il déclaré dans un communiqué, évoquant "de nombreux disparus".
La solidarité envers les Bahamas se mettait en place à travers le monde. Un chargement du Programme alimentaire mondial de l'ONU, avec près de 15.000 repas et des tonnes d'équipement, devait arriver samedi sur les îles affectées.
La France a annoncé le déploiement, dans le cadre d'une mission européenne, de plusieurs dizaines de soldats afin de participer aux secours. Et le président américain Donald Trump a promis l'aide des Etats-Unis, dont les gardes-côtes sont déjà à l'oeuvre aux Bahamas.