Les forces armées ukrainiennes «mènent de violents combats» contre les forces russes pour le contrôle des villes de Mykolaïev, dans le sud, et de Tcherniguiv, dans le nord, a indiqué l'état-major ukrainien dans un communiqué sur Facebook. Une opération militaire ukrainienne était également en cours dans la région de Donetsk (est).
«Les principaux efforts se concentrent sur la ville de Marioupol», port stratégique du sud-est du pays, a ajouté l'état-major.
Dans cette ville, la situation est «très difficile», a affirmé son maire, Vadim Boïtchenko, faisant état d'un «blocus humanitaire». «Cela fait cinq jours que nous vivons sans électricité, nous n'avons pas de chauffage ni de réseau mobile», s'est-il plaint dans une interview diffusée sur YouTube.
Selon lui, les bombardements des derniers jours ont fait des «milliers de blessés» et les forces russes empêchent l'arrivée d'aliments et de médicaments.
«La ville de Marioupol n'existe plus», a-t-il lancé. «Je demande à nos partenaires américains et européens: aidez-nous, sauvez Marioupol!»
La chute de Marioupol, qui compte environ 450.000 habitants, constituerait un tournant. Elle permettrait la jonction entre les troupes en provenance de la Crimée annexée, qui ont déjà pris les autres ports clés de Berdiansk et de Kherson, et celles du Donbass, puis à ces forces consolidées de remonter vers le centre et le nord de l'Ukraine.
Les soldats russes se rapprochent également de Kiev, rencontrant une tenace résistance. Des dizaines de civils ont été tués ces derniers jours à Tcherniguiv, à 150 km au nord de la capitale.
Une équipe de l'AFP qui s'est rendue sur place samedi a constaté des scènes de dévastation dans cette ville de 300.000 habitants qui se vidait de sa population, faisant craindre un destin similaire pour Kiev une fois les batteries de missiles et l'artillerie russes aux portes de la capitale.
«Il y avait des corps partout sur le sol. Ils faisaient la queue pour la pharmacie là, ici, et ils sont tous morts», a témoigné Sergeï, un survivant.
Dans un hôpital du nord de Kiev, des soldats ukrainiens blessés ont raconté à l'AFP leur lutte inégale sous un déluge de feu. «On était en reconnaissance» et «on est tombés sur une colonne ennemie», a expliqué Motyka, un soldat de 29 ans touché par un éclat sur le flanc droit, qui a dû battre en retraite avec ses camarades: «on les a combattus et on a tué leurs soldats à pied, mais ils nous ont arrosés avec des tirs de mortier».
Cohue dans les garesLa cohue s'est emparée des gares dans les villes menacées par la progression des forces russes, femmes et enfants cherchant à partir à l'abri après des adieux déchirants avec leurs maris et pères restés sur place pour se battre.
Selon l'ONU, 1,37 million de personnes se sont déjà réfugiées à l'étranger depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février, et on compte plus d'un million de déplacés à l'intérieur du pays.
Cet exode suscite une forte mobilisation, notamment dans les Etats voisins comme la Moldavie, où le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken se trouvait dimanche, après s'être rendu samedi en Pologne.
Vladimir Poutine a averti que l'Ukraine pourrait perdre son «statut d’Etat» si elle continuait à refuser de céder aux exigences russes.
Moscou réclame notamment un statut «neutre et non nucléaire» pour l'Ukraine et sa démilitarisation, ce que Kiev, qui cherche à adhérer à l'Union européenne et à l'Otan, juge inacceptable.
Les autorités ukrainiennes «doivent comprendre que si elles continuent de faire ce qu'elles font, elles mettent en question l'avenir du statut d'Etat ukrainien. Et si cela se passe, elles en seront entièrement responsables», a déclaré Vladimir Poutine au cours d'une rencontre samedi dernier avec des employées des compagnies aériennes russes à l'occasion de la prochaine Journée de la femme, une des fêtes les plus célébrées dans le pays.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé dimanche sur Twitter s'être entretenu une nouvelle fois au téléphone avec son homologue américain Joe Biden pour discuter de «questions de sécurité», du «soutien financier pour l’Ukraine» et de «la poursuite des sanctions contre la Russie».
Au cours de cet entretien, Joe Biden a mis l'accent sur les sanctions prises par Washington et ses alliés «pour faire porter à la Russie le coût de son agression contre l’Ukraine», selon la Maison Blanche.
Le président américain a également félicité les entreprises, de plus en plus nombreuses, qui ont décidé de cesser de travailler en Russie.
Dernières en dates: les géants américains des cartes bancaires Visa et Mastercard, qui ont annoncé samedi la suspension de leurs opérations en Russie. Les cartes Visa et Mastercard émises par les banques russes ne fonctionneront plus à l'étranger, et les cartes étrangères ne seront plus valables en Russie.
Le système de paiements PayPal a lui aussi suspendu ses services en Russie, selon une lettre de son président Dan Schulman rendue publique par le gouvernement ukrainien.
«Déclaration de guerre»Aeroflot a pour sa part annoncé la suspension de ses vols internationaux à partir du 8 mars. Le régulateur de l'aviation russe, Rossaviatsia, a recommandé à toutes les compagnies du pays de cesser les vols vers l'étranger afin d'éviter la saisie de leurs appareils, dont une grande partie appartiennent à des compagnies de leasing occidentales.
«Ces sanctions qui sont mises en place, cela s'apparente à une déclaration de guerre», a affirmé Vladimir Poutine. «Mais Dieu merci, on n'en est pas encore arrivé là», a-t-il ajouté.
Le maître du Kremlin a cependant mis en garde l'Occident contre la tentation d'imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de l'Ukraine, une mesure que Kiev réclame avec insistance mais à laquelle l'Otan se refuse pour ne pas se retrouver entraînée dans un affrontement direct avec la Russie.
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L'instauration d'une zone d'exclusion serait considérée par Moscou «comme une participation au conflit armé de tout pays» dont le territoire serait utilisé pour «créer une menace envers nos militaires», a prévenu Vladimir Poutine.
Le président russe a reçu pendant environ trois heures samedi à Moscou le Premier ministre israélien Naftali Bennett, qui a proposé sa médiation en mettant en avant les liens solides qui unissent son pays à la Russie et à l'Ukraine. Naftali Bennett s'est ensuite entretenu au téléphone avec le président Zelensky, avant de se rendre à Berlin pour rencontrer le chancelier allemand Olaf Scholz. Peu de détails ont filtré sur le contenu des discussions.
Selon les autorités ukrainiennes, une troisième session de négociations avec les Russes se déroulera lundi, mais les chances de parvenir à des progrès paraissent infimes.
Dans le même temps, les manifestations contre la guerre se multipliaient en Europe: ils étaient plus de 40.000 personnes samedi à Zurich, la ville la plus peuplée de Suisse, plus de 40.000 en France dont 16.000 à Paris, et des milliers également à Rome.