À la tête d'un gouvernement reconnu par la communauté internationale, M. Hadi a encouragé lundi 4 décembre les Yéménites à "ouvrir une nouvelle page" de l'histoire du pays. "Joignons nos efforts pour en finir avec ces bandes criminelles et entamer la construction d'un nouveau Yémen fédéral où règnera la justice, la dignité, (...) la stabilité et le développement", a-t-il lancé dans un discours télévisé prononcé depuis Riyad.
Cet appel est intervenu après la mort d'Ali Abdallah Saleh, tué par des rebelles Houthis quelques jours après la rupture de l'alliance entre les deux camps, à l'origine d'affrontements meurtriers dans la capitale. La mort de l'ex-dirigeant, 75 ans, dont 33 au pouvoir, pourrait constituer un tournant dans le conflit qui ensanglante le Yémen, sans pour autant améliorer le sort des civils.
A Sana'a, où les affrontements entre rebelles se poursuivaient lundi soir, les Houthis donnaient l'impression de prendre le dessus sur les forces de M. Saleh, selon des journalistes sur place. Au centre de la "pire crise humanitaire au monde" selon l'ONU, cette guerre avive les tensions entre l'Arabie saoudite sunnite et l'Iran chiite, accusé par Riyad de soutenir militairement les Houthis, ce que Téhéran réfute.
"Le ministère de l'Intérieur (contrôlé par les Houthis) annonce la fin de la milice de la trahison et la mort de son chef (Ali Abdallah Saleh) et d'un certain nombre de ses éléments criminels", a affirmé la télévision des Houthis, Al-Massirah, en citant un communiqué.
Une vidéo remise lundi à un journaliste de l'AFP par les Houthis montrait le cadavre de ce qui semble être l'ancien président Saleh, évincé du pouvoir en 2012 dans le sillage du Printemps arabe. Ce décès a ensuite été confirmé par une dirigeante de son parti, le Congrès populaire général (CPG). Selon elle, l'ancien président et d'autres hauts responsables du CPG ont été la cible de tirs nourris de Houthis alors qu'ils quittaient Sana'a vers des zones tenues par des forces pro-Saleh. Une source militaire a précisé à l'AFP, sous couvert de l'anonymat, qu'un convoi de quatre véhicules avait été bloqué à environ 40 km au sud de la capitale. Selon elle, Saleh a été tué par balle avec deux hauts dirigeants du CPG.
Dans un discours retransmis sur Al-Massira, le chef rebelle Abdelmalek Al-Houthi, 38 ans, s'est félicité en soirée de "l'échec du complot", sans mentionner le sort de l'ex-président Saleh. Il faisait référence à la violente rupture d'alliance, la semaine dernière, entre M. Saleh et les rebelles Houthis, issus de la minorité zaydite, une branche du chiisme. Cette alliance avait été scellée il y a trois ans et, depuis, les deux camps contrôlaient conjointement la capitale au détriment du gouvernement de Abd Rabbo Mansour Hadi, réfugié dans le sud du Yémen.
Les affrontements entre alliés, qui ont éclaté mercredi, ont fait au moins 100 morts et blessés, selon des sources de sécurité et hospitalières. Après ce revirement d'alliance, Ali Abdallah Saleh avait tendu la main samedi à l'Arabie saoudite, qui intervient militairement au Yémen en soutien du gouvernement Hadi, en échange de la levée du blocus que Riyad impose au Yémen. Les Houthis avaient dénoncé une "grande trahison".
Lundi, le président Hadi a "donné pour ordre à son vice-président Ali Mohsen al-Ahmar, qui se trouve à Marib (100 km de Sana'a), d'activer la marche (...) vers la capitale", selon un membre de son entourage. Baptisée "Sana'a l'Arabe", l'opération consisterait, selon cette source, à prendre la capitale en tenailles. D'après des sources militaires loyalistes à Marib, sept bataillons ont reçu l'ordre de marcher sur Sana'a. Pour tenter d'affaiblir les rebelles, le gouvernement yéménite a également annoncé sa volonté d'offrir une amnistie à tous ceux qui cesseraient de collaborer avec eux, une main tendue aux pro-Saleh.
La guerre au Yémen a fait plus de 8.750 morts depuis mars 2015 et l'intervention d'une coalition militaire menée par Riyad contre les Houthis. La coalition sous commandement saoudien a exhorté lundi les civils à se tenir à "plus de 500 mètres" des zones contrôlées par les rebelles, laissant supposer une intensification de ses raids aériens.
Par ailleurs, selon des experts américains cités lundi par le New York Times, le système antimissile Patriot déclenché le mois dernier par l'Arabie saoudite pour intercepter un missile balistique tiré par les Houthis a échoué à en détruire l'ogive, qui a explosé sur l'aéroport de Riyad, contrairement aux affirmations du régime.
Des responsables saoudiens avaient annoncé le 4 novembre avoir intercepté et détruit un missile balistique qui provenait du Yémen en guerre.