Les différents services financiers au Maroc vivent une situation d’alerte maximale, en prévision de l’audit que mènera le Groupe d’action financière (GAFI) pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Cette mission s’inscrit dans le cadre du troisième cycle d’évaluation mutuelle du dispositif national marocain de lutte contre le blanchiment d’argent, indique le quotidien Al Akhbar dans son édition du week-end des samedi et dimanche 13 et 14 décembre.
Une délégation avait effectué une visite au Maroc fin novembre dernier et tenu une réunion avec le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, en présence de plusieurs ministres et de responsables d’institutions nationales concernées. L’objectif était de lancer officiellement la troisième série d’évaluations, qui devrait se poursuivre jusqu’à l’examen et l’adoption du rapport final, prévue pour mai 2028.
Lors de cette rencontre, le gouvernement marocain a réaffirmé son engagement envers les normes internationales du Groupe d’action financière et souligné l’importance stratégique de cette troisième évaluation. Les autorités ont également mis en avant l’efficacité du dispositif national, le niveau de coordination entre les institutions compétentes, ainsi que les réformes législatives, réglementaires et institutionnelles engagées ces dernières années.
Parmi les principaux dossiers à traiter figure la correction de failles dans le système financier marocain, qui permettent l’usage de crypto-monnaies dans des opérations illicites de blanchiment de capitaux, lit-on dans Al Akhbar. Bank Al-Maghrib avait déjà mis en garde contre leur utilisation au Maroc, considérant qu’il s’agit d’une activité illégale et risquée en raison de l’absence de protection des consommateurs, de vulnérabilités dans les plateformes d’échange, ou encore de risques de vol, d’escroquerie et de forte volatilité de leur valeur. Ces actifs peuvent également être utilisés à des fins illicites, notamment dans le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme, tout en échappant aux réglementations en vigueur.
Selon le rapport d’évaluation mutuelle du GAFI, le Maroc n’a pas identifié les risques liés aux nouveaux produits financiers à l’échelle nationale. Par ailleurs, la législation ne prévoit aucune obligation imposant aux secteurs de l’assurance, des marchés de capitaux ou des bureaux de change d’évaluer les risques liés à des produits ou pratiques professionnelles innovants. Les institutions financières ne sont pas non plus tenues d’évaluer ces risques avant de lancer de nouveaux services ou d’adopter de nouvelles technologies.
Le rapport note cependant que le Maroc a corrigé certains manquements relevés dans le troisième rapport de suivi renforcé, notamment en adoptant en 2021 la deuxième version de l’évaluation nationale des risques, diffusée à l’ensemble des organes concernés. Celle-ci analyse les risques liés aux nouvelles technologies, à la cybercriminalité et aux actifs virtuels, sans toutefois intégrer ceux liés à l’activité des prestataires de services d’actifs virtuels, lit-on encore.
Désormais, les entités financières doivent identifier et évaluer les risques associés au développement de nouveaux produits ou pratiques commerciales, notamment les instruments de distribution innovants et les technologies émergentes.
Le rapport relève néanmoins que cette deuxième évaluation nationale ne prend toujours pas en compte les risques pouvant découler de l’innovation financière, que ce soit au niveau de nouveaux produits, de nouvelles pratiques professionnelles ou des prestataires de services d’actifs virtuels. Il souligne aussi que, malgré un renforcement du contrôle des transactions en actifs virtuels, aucune sanction significative n’a été appliquée contre les contrevenants. Le groupe d’évaluation n’a pas obtenu de base juridique établissant l’interdiction directe des actifs virtuels, en dehors de circulaires et de communiqués destinés à alerter le public et les institutions financières.
En matière de coopération internationale, le rapport note des efforts dans l’échange d’informations, bien qu’ils n’incluent pas encore les actifs virtuels ni leurs prestataires.
L’Office des changes a, de son côté, publié une note signalant que certaines personnes physiques et morales recourent aux crypto-monnaies ou déclarent les accepter. L’Office rappelle que ces opérations enfreignent la réglementation des changes et exposent leurs auteurs à des sanctions. Il met aussi en garde contre les risques élevés de ces monnaies, qui ne sont pas émises par des autorités officielles et dont les détenteurs restent souvent anonymes. L’Office assure travailler en coordination avec Bank Al-Maghrib et le Groupement professionnel des banques du Maroc pour suivre les évolutions liées aux crypto-actifs.








