Etablissements pénitentiaires: le CNDH pointe les lacunes du projet de loi présenté par Ouahbi

Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, s'exprimant devant les membres de la Commission de justice, de législation et des droits de l'homme à la Chambre des représentants.

Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, s'exprimant devant les membres de la Commission de justice, de législation et des droits de l'homme à la Chambre des représentants. . DR

Revue de presseLa Commission de la justice et de la législation à la Chambre des députés examine, depuis ce mardi 19 septembre, le projet de loi relatif à l’organisation et à la gestion des établissements pénitentiaires. Cependant ce texte, présenté par Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, fait l’objet de nombreuses remarques et critiques de la part du Conseil national des droits de l’homme, qui pointe du doigt son imprécision, synonyme, selon lui, de non-protection des droits de détenus. Cet article est une revue de presse tirée d’Al Akhbar.

Le 19/09/2023 à 22h02

Le projet de loi n° 10-23 relatif à l’organisation et à la gestion des établissements pénitentiaires au Maroc, actuellement soumis à l’examen de la Commission parlementaire de la justice et de la législation, doit être revu de fond en comble, selon le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH).

Dans un avis concernant la mouture présentée par le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, et repris en détail par le quotidien Al Akhbar dans son édition du mercredi 20 septembre, le CNDH estime que ce texte est loin de répondre aux critères internationaux relatifs à la garantie des droits des détenus, et propose à ce titre un ensemble de recommandations en vue d’améliorer et clarifier le contenu dudit projet de loi.

Le CNDH avance un certain nombre de griefs et remarques qui, même s’ils concernent pour l’essentiel des «vices» de forme, doivent être pris en compte pour une saine application de la loi en milieu carcéral.

Tout d’abord, le CNDH reproche au projet de loi relatif à l’organisation et à la gestion des établissements pénitentiaires de ne pas comporter un préambule. Or, ce dernier est indispensable à la compréhension des objectifs visés par ce texte et des motivations qui ont poussé le législateur à l’élaborer. En aucun cas, dit le CNDH, le mémorandum explicatif présenté avec ce texte ne peut tenir lieu de préambule.

Le texte présenté par Ouahbi souffre également d’un manque flagrant de définition claire de la terminologie de base, à l’image des termes «pénitenciers», «centres de réinsertion et de rééducation», qui ne sont définis que par leurs fonctions et non par leurs objectifs. De même, le projet de loi comporte d’autres termes imprécis qui ouvrent la voie à toutes sortes d’interprétations et, surtout, à une opacité qui laisse les mains libres à l’administration pénitentiaire dans ses relations avec les détenus, sans garantie de leurs droits les plus élémentaires.

Le CNDH conteste ainsi l’usage d’expressions comme «il est permis», «en cas de nécessité», «en fonction des moyens disponibles», «dans la limite des moyens», «l’ordre et la sécurité»…, estimant que de telles expressions laissent une grande latitude à l’administration pénitentiaire qui peut en abuser en violant ses obligations à l’égard des détenus. Le respect des droits élémentaires des détenus, au lieu d’être érigé en obligation de résultats de la part de l’Etat devient, de la sorte, une simple obligations de moyens. Il en est ainsi de l’article 156 du projet de loi qui dispose que sous prétexte «d’ordre et de sécurité», qu’il peut interpréter comme bon lui semble, tout directeur d’un centre pénitentiaire peut priver un détenu de ses séances de sport, indispensables au maintien de sa santé physique et psychique.

Le CNDH s’est également dit préoccupé par les textes d’application auxquels fait référence le projet de loi susmentionné, et se montre soucieux quant aux délais de leur parution ainsi qu’à la garantie de leur conformité avec les critères internationaux de protection des droits des détenus.

Pout toutes ces raisons, le CNDH recommande de clarifier davantage la terminologie dudit projet de loi, et d’en supprimer carrément certains termes imprécis, tout en veillant à l’adjonction d’un préambule clair, prenant en compte les défis auxquels sont actuellement confrontées les prisons marocaines.

Par Mohamed Deychillaoui
Le 19/09/2023 à 22h02