L’Istiqlal tente de sauver les meubles. L’affaire Moudiane-Mansouri va jeter l’opprobre sur le parti, à quelques jours de la tenue de son 18ème congrès national (26 au 28 avril). Nizar Baraka, secrétaire général de l’Istiqlal, et Hamdi Ould Errachid, un homme-clé de la formation politique, tentent en ce moment de réparer les dégâts. Est-ce qu’ils vont réussir, ou pas? Pour l’heure, ces deux hommes forts de l’Istiqlal ont tenté de rencontrer, la semaine dernière, loin des projecteurs, les deux belligérants pour enterrer la hache de guerre. Ces réunions seraient tenues secrètes. La première tentative a proposé une rencontre à Rabat, chez Hamdi Ould Errachid, dans sa propre villa dans le quartier Souissi. Selon plusieurs sources, une deuxième réunion de réconciliation se serait tenue à Laâyoune, dans le fief politique de Ould Rachid.
Rien n’a fuité pour l’instant, cependant l’Istiqlal est acculé à trouver un compromis avant le congrès national. Les enjeux sont trop grands pour laisser pourrir cette affaire glauque de mœurs, dont le procès pointe d’ores et déjà à l’horizon. Un coup fatal, un suicide pour le parti, disent les observateurs. Dans cette histoire, il est question de sextapes, d’atteinte à la vie privée et de graves diffamations. Ajoutez à cela que l’histoire se déroule entre les murs de l’un des partis politiques les plus importants, et vous avez là les parfaits ingrédients d’un cocktail Molotov pour déchainer médias mainstream et réseaux sociaux. Le déballage risque de faire très mal.
Rafiaa Mansouri, vice-présidente de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima, est une femme très en vue à l’Istiqlal. Elle représente la self-made-woman, la Marocaine partie de rien, sans grands diplômes, d’une famille très modeste, au tempérament rebelle et conquérant, jeune et belle qui réussit à se faire une place dans le monde ô combien rude de la politique!
Noureddine Moudiane n’est pas un inconnu au bataillon. Il est même considéré comme un ponte de l’Istiqlal, un chef charismatique qui aura été de tous les bureaux du comité exécutif et un étroit collaborateur d’Abbas El Fassi, de Chabat et, de nos jours, de Baraka. Ses amis l’appellent «l’idéologue» et beaucoup lui auguraient, un jour, la prise des rennes de l’Istiqlal. Mais on dit de l’homme qui a la langue fourchue qu’il finit un jour par battre de l’aile.
Les deux parties peuvent être considérées comme perdantes en cas de procès. Moudiane, la soixantaine, le ténor, a encore un rôle à jouer à l’Istiqlal. Avec une telle casserole, il peut dire adieu à tout jamais à ses ambitions. Il est une charnière entre les hommes de l’ancien Istiqlal et les nouveaux réformistes. Le parti fera difficilement son deuil de lui. De même, Rafiaa Mansouri, quoique dans un procès gagné, va laisser des plumes. On ne sort pas indemne d’une affaire judiciaire pareille.
Les deux personnages se connaissent pourtant sur le bout des doigts. Moudiane a aidé Mansouri à percer en politique, lui montrant les ficelles du métier et ses nids de poule. Il lui a mis le pied à l’étrier. Les deux sont originaires de la même région, Al Hoceima.
Le SG de l’Istiqlal et sa proche équipe souhaitent aller, dans un mois, au congrès avec cette affaire pliée derrière eux, et si possible avec les deux ex-ennemis en paix déclarée. Les prochains jours nous diront s’ils ont obtenu gain de cause.