A l’orée et à la fin de son discours, le roi rappelle que l’une de ses missions essentielles consiste à servir le peuple. Dès les premières phrases : «C’est une mission exaltante à la mesure de l’honneur qui Nous échoit de te servir.» Et le souverain termine son discours par «Tu me trouveras, cher peuple, comme tu M’as toujours connu, Ton premier Serviteur ».
Cette noble fonction de serviteur du peuple prend une résonance particulière avec le tapage fait autour de ce qu’on appelle désormais «affaire Laftit», liée à la distribution à des commis de l’Etat de lots de terrain à des prix inférieurs à leur valeur réelle.
Dans le communiqué conjoint de Hassad/Boussaid, une expression a fait rage. Celle qui justifie l’attribution des lots de terrain à des «serviteurs de l’Etat». Le mot "serviteur" prend une acuité particulière dans la langue arabe, puisque «khadim», porte une connotation linguistique de subordonné, être inférieur, voire servile. Et place l’Etat, du coup, dans le rang de maître absolu.
L’expression «serviteur de l’Etat» est celle qui a suscité le plus de commentaires et d’indignations dans les réseaux sociaux et la presse. L’Etat, étant cette entité écrasante où tous les pouvoirs se centrent et d’où se diffusent tous les rayons de l’autorité.
Evidemment, l’institution monarchique est consubstantielle à l’Etat. Pour nombre de ceux qui ont fait des gorges chaudes de cette expression, le raccourci est facile entre l’Etat et l’institution monarchique. D’où la résonance très particulière et à contre-courant du bruit suscité par l’affaire Laftit que prend le verbe “servir“ dans le discours du roi.
Le roi renverse l’ordre établi chez les commentateurs de l’affaire Laftit. Le verbe “servir“ n’est pas vil quand il désigne une noble mission. Bien au contraire, il est synonyme de grandeur. Le roi est honoré d’être le serviteur du peuple. Le proverbe arabe «Le serviteur des gens est leur maître» n’aura jamais pris autant de sens que dans le discours du roi.