L’Atlantique, plus qu’un simple espace géographique, est un espace pivot pour le Maroc, selon Youssef Amrani, ambassadeur du Maroc aux États-Unis. Intervenant vendredi dans le cadre de la 12ème édition des Atlantic Dialogues, qui se tient du 14 au 16 décembre à Marrakech, l’ex-ministre délégué aux Affaires étrangères et ex-secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée, a mis en avant la vision du Maroc en tant que pont entre les continents et son rôle actif dans la création d’une Afrique atlantique. Une vision soutenue par l’approche multilatérale du Royaume visant à renforcer les partenariats régionaux et à promouvoir une plus grande intégration.
Au début de son allocution, Youssef Amrani a expliqué comment le Maroc voit l’Atlantique comme un lieu d’opportunités, mais aussi de défis nécessitant des investissements et un leadership politique forts. «L’Atlantique signifie beaucoup plus pour le Maroc que la simple géographie. C’est un espace pivot qui permet au Royaume de relier les points de ses efforts d’intégration à grande échelle dans son environnement immédiat et plus vaste. L’Atlantique est la raison même pour laquelle le Maroc constitue à la fois un centre de gravité et un point de liaison entre le Nord et le Sud, l’Afrique et l’Europe, la Méditerranée et l’Atlantique», a-t-il souligné.
«Cependant, l’Atlantique est également confronté à des défis qui exigent d’énormes investissements doublés d’un leadership politique substantiel. Cet espace a besoin de politiques régionales et sous-régionales cohérentes, prospectives, inclusives et transversales, en particulier dans sa dimension africaine. C’est essentiellement ce à quoi Sa Majesté a appelé dans son discours historique sur la dimension atlantique du Royaume, prononcé le mois dernier pour marquer le 48ème anniversaire de la Marche Verte et qui a dessiné une vision royale ambitieuse pour la création d’une Afrique atlantique», a-t-il poursuivi.
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Pour le diplomate, seul un multilatéralisme sage et responsable peut servir les intérêts de l’Atlantique: «Dans cet esprit, le Maroc travaille toujours à préserver et renforcer ses partenariats traditionnels, tout en s’engageant constamment avec des initiatives similaires visant à promouvoir une plus grande intégration régionale. Pour être efficaces, nos efforts de collaboration doivent prendre en compte le multilatéralisme fluctuant d’aujourd’hui, y compris l’émergence de nouvelles forces politiques, militaires et économiques régionales.»
En lien avec cette perspective, Youssef Amrani a souligné la pertinence de la vision du Souverain pour l’Atlantique africain et les efforts soutenus du Maroc pour la mettre en œuvre. «Bien qu’il y ait toujours eu un intérêt existant pour les pays africains à développer un cadre de coopération pertinent dans l’Atlantique, nous manquions des instruments pour le faire (...). Cette initiative contient également une dimension stratégique beaucoup plus large en offrant un accès aux pays enclavés du Sahel et en les aidant à élaborer des solutions à long terme aux défis profonds auxquels cette région est confrontée. Ces solutions ne peuvent se limiter aux aspects de sécurité ou militaires, mais doivent inclure la coopération et le co-développement pour s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité», a-t-il relevé.
Youssef Amrani, ancien ministre délégué aux Affaires étrangères et ex-secrétaire général de l’Union pour la Méditerranée.
D’après l’ancien ambassadeur du Maroc en Afrique du Sud, l’objectif ultime est de restructurer ces régions en tant qu’espace géopolitique doté d’outils de gestion concertée permettant aux Africains de travailler ensemble sur des solutions africaines. «En combinant les dimensions politiques, de sécurité, sociales, scientifiques et économiques, notre groupe construira la région de l’Atlantique africain comme un espace ouvert à la coopération Sud-Sud pour promouvoir les valeurs de l’unité et de la solidarité africaines tout en restant ouvert à la coopération et à la collaboration avec d’autres régions et organisations», a-t-il noté.
La connectivité, essentielle pour établir une coopération durable
L’établissement d’une coopération durable repose fondamentalement sur la connectivité, a insisté Youssef Amrani. «Relier les rives par le biais de câbles, de pipelines et de routes vous donne immédiatement non seulement un avantage économique, mais aussi une forte volonté politique de favoriser la coopération, bien plus que toute alternative de division.»
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Il a noté qu’au Maroc, ce processus a commencé au niveau national, sous la direction du roi Mohammed VI. «Cela s’est fait grâce au développement d’une politique majeure pour les régions sahariennes du pays, qui sont devenues une partie intégrante d’une économie maritime intégrée, avec la pêche en mer, la logistique, les ports, les énergies renouvelables, la prospection des ressources offshore, le tourisme, ainsi que les infrastructures routières, portuaires et aéroportuaires». S’y ajoutent «l’extension des autoroutes, du train à grande vitesse et du port atlantique de Dakhla» qui font tous partie d’«une vision de développement ambitieuse du Maroc, commençant par sa façade atlantique et s’étendant jusqu’à sa profondeur africaine naturelle».
D’après Youssef Amrani, la vision royale «a établi une feuille de route claire et fourni les piliers permettant au Maroc de partager ses capacités de travail avec ses pays voisins de l’Atlantique africain sur des projets stratégiques et concrets susceptibles d’intégrer davantage nos économies». Il a cité, dans ce sens, l’exemple du gazoduc Nigeria-Maroc, «qui profitera non seulement à l’Afrique de l’Ouest, mais garantira également l’approvisionnement en énergie de l’Europe».
Et de conclure: «En renforçant les liens économiques, en améliorant les infrastructures et en facilitant la circulation des biens et des personnes, le Maroc vise à contribuer à la construction de ponts entre les nations et à favoriser un sentiment de destin commun. Cela nous permettra également de surmonter les différences étroites pour aborder collectivement nos défis en matière de sécurité et de développement, ainsi que le grave risque posé par le changement climatique, parmi les autres problèmes auxquels sont confrontés nos pays africains de l’Atlantique.»