Ramtane Lamamra amplifie la mécanique de l’escalade contre le Maroc

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, lors d'une conférence de presse à Alger, le 24 août 2021.

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, lors d'une conférence de presse à Alger, le 24 août 2021. . AFP

Dans le cadre de ce qu’Alger présente comme l’assassinat de trois de ses ressortissants dans une zone tampon du Sahara marocain, le ministre algérien des Affaires étrangères est intervenu à son tour pour alimenter l’escalade. Il affirme ainsi avoir saisi plusieurs organisations internationales.

Le 05/11/2021 à 18h19

Selon l’agence de presse officielle algérienne (APS), le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, aurait adressé des «correspondances», hier jeudi 4 novembre 2021, à plusieurs chefs d’organisations internationales concernant la mort de trois camionneurs algériens dans la zone tampon sise au nord-est du Sahara marocain, et qui auraient péri le 1er novembre dernier. L’objectif serait d’informer ces organisations internationales et régionales de ce qu’il appelle «la gravité extrême de l’acte de terrorisme d’Etat», dont il accuse le Maroc sans la moindre preuve, et «qu’aucune circonstance ne saurait justifier», selon les termes de ces messages.

Selon l’APS, le chef de la diplomatie algérienne a adressé des correspondances «au Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, au président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, au Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes, Ahmed Aboul El Gheit, et au Secrétaire général de l’Organisation de la coopération islamique, Youssef Ben Ahmed Al-Othaimeen».

Bien évidemment, le ministre algérien des Affaires étrangères, pyromane attitré du régime algérien dans ses relations avec Rabat en particulier, a parlé à son tour de l’usage d’un armement «sophistiqué» par le Maroc «pour entraver la libre circulation de véhicules commerciaux», un acte qualifié de «porteur de risques imminents pour la sécurité et la stabilité» dans la région. En envoyant ses correspondances, Ramtane Lamamra joue son rôle d’amplificateur de l’escalade voulue par la junte.

Même si ses messages parlent vaguement de «la volonté et la capacité de l’Algérie d’assumer ses responsabilités en matière de protection de ses ressortissants et de leurs biens en toutes circonstances», tout le tapage créé autour de ce nouveau «navet » du régime algérien est en train de se dégonfler. D’ailleurs, il n’échappe plus à personne que l’armée algérienne a failli à ses responsabilités en fermant les yeux et en laissant volontairement ces camions et leurs occupants entrer dans une zone de guerre dangereuse.

Que faisaient les routiers algériens dans une zone de guerre, selon les termes du Polisario, et une zone de harcèlement et de riposte, selon les termes du Maroc? C’est un territoire utilisé par les milices pour attaquer la ligne de défense et le théâtre de ripostes des FAR. Dans leur riposte de légitime défense, les FAR ne vérifient pas les identités des assaillants. Même le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU fait état d’accrochage dans cette zone.

Le mensonge, qui consiste également à parler d’un prétendu «axe Ouargla-Nouakchott», ne résiste pas aux faits sur le terrain. Non seulement parce que l’itinéraire emprunté par les deux camions sinistrés a été bizarrement largement rallongé pour passer par la très lointaine zone tampon du Sahara, mais aussi parce que ces camions n’avaient aucune possibilité d’accéder à la Mauritanie à travers une zone militaire fermée et déclarée strictement interdite aux civils par l’armée mauritanienne. Cette dernière n’a laissé aux très rares camionneurs algériens, malgré plusieurs centaines de kilomètres de frontières communes, qu’un chas d’aiguille pour circuler entre les deux pays, à savoir le seul passage terrestre mauritano-algérien, dit PK 75. 

C’est d’ailleurs cette restriction draconienne qui explique la très rapide réaction de la Mauritanie qui a fermement démenti les allégations algériennes qui ont d’abord parlé d’une attaque marocaine contre des camions algériens en plein territoire mauritanien.

Autant de maladresses algériennes et autres questions que n’ont certainement pas manqué de poser à Ramtane Lamamra certains ambassadeurs accrédités à Alger, et qu’il a reçus hier, selon l’APS, au siège de son ministère pour leur faire avaler des couleuvres.

Cette agitation du chef de la diplomatie algérienne est à inscrire dans le registre de la simple parade, en vue d’alimenter le récit de l’escalade entre les deux pays voisins. Un récit qui échappe d’ailleurs aux cadors d’un pays à la dérive.

Aujourd’hui, parler de conflit armé entre le Royaume du Maroc et l’Algérie n’est plus un sujet tabou. Si le Maroc refuse de se laisser entraîner dans une spirale de violences, l’Algérie, avec un président qui a fait de l’outrance un marqueur pour maquiller son incompétence, ainsi qu’un chef d’état-major que rien ne destinait à occuper ce poste, sera prise au piège de sa propre terminologie belliqueuse.

En trois mois, le régime algérien a pris des décisions allant toutes dans le sens d’une escalade: accusations du Maroc d’avoir mis le feu aux forêts en Kabylie, rupture unilatérale des relations diplomatiques avec Rabat, fermeture de l’espace aérien algérien aux avions marocains, accusation contre le Maroc de soutien aux «terroristes du MAK» et fermeture du gazoduc Maghreb-Europe (GME). La communauté internationale a regardé avec une quasi-indifférence toutes ces décisions prises par Alger et qui alimentent le récit d’une tension allant crescendo avec Rabat.

Dans cette mécanique de l’escalade, la junte a activé ses relais sur les réseaux sociaux pour menacer de fermeture l’espace maritime algérien aux navires marocains, faire un remake de l’innommable expulsion par Houari Boumediène des Marocains résidant en Algérie et restaurer les visas entre les deux pays. Une fois ces trois mesures de «représailles » consommées, que restera-t-il au régime algérien pour alimenter son récit de surenchère contre le Maroc? Rien ou presque qui maintient encore la distance avec un conflit armé.

Par Mohammed Ould Boah
Le 05/11/2021 à 18h19