Dans un communiqué publié le dimanche 4 septembre, le ministère algérien des Affaires étrangères a annoncé que «le chef de la diplomatie syrienne a indiqué que son pays préfère que la question de la reprise de son siège au sein de la Ligue des Etats arabes lors du sommet d'Alger ne soit pas soulevée, par souci de contribuer à la consolidation de l’unité des rangs arabes face aux défis imposés par les développements actuels au double plan régional et international». En décrypté, cela signifie que le ministère des Affaires étrangères algérien, face aux multiples appels au report ou à la délocalisation du sommet d’Alger, prévu initialement dans moins de deux mois, croit ainsi tirer une épine de son pied en demandant à son homologue syrien d’annoncer que son pays renonce à reprendre sa place au sein de la Ligue arabe, de laquelle il est suspendu depuis le 16 novembre 2011.
Pour un média algérien «la participation de la Syrie était l’un des écueils sur lesquels butait la préparation du sommet arabe d’Alger, prévu les 1er et 2 novembre prochain. La question semble donc avoir été tranchée à moins de deux mois de l’échéance. Damas a renoncé à la reprise de son siège au sein de l’organisation panarabe au cours du sommet d’Alger». Mais cette manœuvre du régime algérien semble insuffisante, car ce dernier tente ainsi de rassurer certains pays arabes, particulièrement ceux du Golfe et l’Egypte, très remontés contre la politique étrangère d’Alger, qu’ils jugent très inamicale vis-à-vis de certains membres importants de la Ligue arabe.
Pour rappel, Alger a été automatiquement désignée pour accueillir le sommet arabe sur la foi de la rotation par ordre alphabétique.
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Si les éditions de 2020 et 2021 n’ont pu se tenir à cause de la pandémie de Covid-19, celle de 2022 est allée de report en report à cause des contradictions mêmes du pays hôte qui déclare vouloir cimenter les relations inter-arabes, alors que rien que la rupture unilatérale de toutes ses relations avec son voisin marocain et son soutien aveugle aux séparatistes du Polisario contredisent ses paroles et lui ont fait perdre toute crédibilité au sein de la Ligue arabe, et ailleurs.
A cela s’ajoute son positionnement en faveur de l’Iran, en conflit latent avec les pays du Golfe arabique et du Moyen-Orient, et son soutien à l’Ethiopie, en désaccord avec l’Egypte et le Soudan qui estiment préjudiciable aux intérêts de leurs pays la construction du méga-barrage de la Renaissance.
Dans ces circonstances, l’Algérie ne peut se targuer, comme elle le claironne, de servir la solidarité et la fraternité entre les pays arabes, qu’elle contribue plutôt à diviser.
C’est ce que relève le journaliste syrien vedette de la chaîne qatarie Al Jazeera, Fayçal Al Kassim, qui accuse le régime algérien d’infidélité et de trahison, car comment qualifier autrement, se demande-t-il, «un régime qui complote avec l’Ethiopie contre l’Egypte, qui s’allie avec l’Iran contre les pays arabes, qui s’érige en ennemi de son voisin, le Maroc, puis affirme vouloir cimenter les rangs arabes».
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Pour sa part le journal londonien «Alaraby» croit savoir, dans un article publié le 1er septembre dernier, que le «report du sommet arabe d’Alger est devenu une quasi-certitude pour nombre de cercles médiatiques et diplomatiques dans de nombreux pays arabes».
Le journal ajoute que certains diplomates égyptiens lui ont assuré qu’il existe «une totale convergence de points de vue entre les hauts responsables égyptiens et ceux des pays du Golfe quant à la grande difficulté d’organiser un sommet au vu de la situation arabe et régionale actuelle». Or, pour qu’il y ait un sommet arabe, il faut obligatoirement un consensus général au sein des pays membres de la Ligue arabe.
Le régime algérien, qui a fait de la tenue du sommet arabe un objectif primordial, semble tellement pris au dépourvu face à ces annonces de report du sommet d’Alger, qu’il ne cesse d’assurer que ce rendez-vous aura bien lieu, coûte que coûte, à Alger et à la date prévue.
Déjà, le 16 août dernier, une source du ministère des Affaires étrangères algérien citée par des journaux arabes, dont «Alaraby», a assuré que des émissaires algériens seront envoyés dès le début du mois d’octobre à tous les chefs d’Etat arabes en vue de leur remettre des invitations pour assister au sommet d’Alger le 1er et 2 novembre 2022.
Dimanche, tour à tour, le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane, et le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, ont tenté de sauver les meubles en démentant les rumeurs sur le report du sommet arabe d’Alger. L’un a affirmé que l’Algérie est prête à 100%, l’autre ayant fait croire que la non-invitation de la Syrie suffisait à assurer la participation de tous les pays arabes.
Alors se tiendra ou se tiendra pas? Ce qui est certain, c’est que même si ce sommet a lieu, il aura permis de prendre la mesure du poids de l’Algérie au sein de la Ligue arabe et de son extrême isolement.
Présent au Caire, ce mardi, pour prendre part de la 158e session du Conseil de la Ligue des Etats arabes au niveau des ministres des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, supplie, en sa qualité d’émissaire d’Abdelmadjid Tebboune, les chefs d’Etat de faire le déplacement à Alger. Et il n’est pas sûr qu’ils lui fassent la charité de leur présence en Algérie.