Le quotidien américain The Washington Post a publié, lundi 24 août, une tribune signée par Afaf Bernani, dans laquelle elle accuse le Maroc de recourir à de fausses accusations d'agressions sexuelles contre les journalistes indépendants, en rappelant avoir été elle-même victime de harcèlements pour l’obliger à témoigner en tant que victime de viol dans le procès contre le journaliste Taoufik Bouachrine.
Présentée comme étant journaliste, Afaf Bernani n’a en fait jamais exercé ce métier, et a occupé le poste de standardiste dans le quotidien fondé par Taoufik Bouachrine, «Akhbar Al Yaoum». Pourtant, elle s’est attribué la qualité de «journaliste» dans les colonnes de ce quotidien américain de référence, en y signant une tribune, opportunité qui n’est pas donnée à tout le monde.
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Une chronique douteuse Dans cette longue diatribe publiée dans le quotidien américain, Afaf Bernani entend, en fait, commenter l’actualité du moment, le dossier Omar Radi, à la lumière de sa propre affaire. Un exercice périlleux, que même les journalistes professionnels ne se risqueraient pas à faire, d’autant que la justice n’a pas encore statué sur l’affaire de viol dont est accusé Omar Radi.
«Le 29 juillet, les autorités marocaines ont arrêté le journaliste Omar Radi après plus d'un mois d'enquête sur des allégations selon lesquelles il aurait collaboré avec des agences de renseignement étrangères. Le jour de son arrestation, le procureur a annoncé que Radi faisait également face à des accusations de viol. Radi fait désormais partie de plusieurs journalistes indépendants que le régime marocain a accusés d'agression sexuelle», écrit la standardiste d'Akhbar Al Yaoum dans sa tribune, intitulée: «Le Maroc doit arrêter d’utiliser les allégations d’agressions sexuelles pour faire taire la dissidence».
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La réponse indignée de Hafsa BoutaharLes propos de Afaf Bernani ont fait réagir celle qui accuse Omar Radi de viol, et qui a déposé une plainte dans ce sens. Contactée par Le360, Hasfa Boutahar s’insurge: «je ne permettrai à personne d’utiliser mon affaire afin de l’instrumentaliser. Il est question ici de ma dignité!».
La voix tremblante d’émotion, elle estime ainsi que «cette femme (Afaf Bernani, Ndlr) peut dire ce qu’elle veut en ce qui concerne son affaire mais je ne lui permettrais pas, ni à elle, ni à quiconque, de faire le lien entre des affaires qui n’ont rien à voir l’une avec l’autre».
«Dans mon cas, il s’agit d’un viol entre collègues, deux salariés d’une même entreprise», résume-t-elle.
«J’ai le droit de saisir la justice!», s'exclame-t-elle, soutenant par ailleurs qu’elle n’a «subi aucune pression de la part des autorités», mais, au contraire, «un soutien dans l’exercice de [ses] droits et la protection de [sa] dignité».
Hafsa Boutahar estime ainsi que de tels propos tenus dans une publication telle que le Washington Post est un camouflet porté au visage de toutes les femmes victimes de violences, de harcèlement, de viols, et qui n’osent pas témoigner, de peur de ne pas se faire entendre. La jeune femme se dit d’ailleurs choquée que de tels propos soient tenus par une femme.
«Les femmes devraient être les premières à me comprendre et à me soutenir», estime Hafsa Boutahar.
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Un droit de réponse exigé«Vous ne pouvez pas étouffer mon affaire!», s’exclame Hafsa Boutahar à l’adresse de celle à qui elle ne pardonne pas de tels propos.
«Si j’étais morte, vous pourriez dire ce qu'il vous chante, mais je suis vivante, bien vivante», poursuit-elle, visiblement choquée, en expliquant avec émotion que tenter de la discréditer, d’étouffer cette affaire, «c’est me violer une deuxième fois!».
Mais Hafsa Boutahar n’a pas l’intention d’en rester là. Elle annonce ainsi à Le360 avoir envoyé un e-mail à la rédaction du Washington Post afin que cette publication lui accorde un droit de réponse. «Je leur ai envoyé avant-hier mon témoignage, avec ma version des faits… On verra bien s’ils acceptent de le publier».
A vrai dire, le contraire serait étonnant, et dénoterait d’un parti pris inexcusable de la part du quotidien américain, qui fait par ailleurs partie des dix-sept médias étrangers à avoir relayé les accusations d’espionnage portées, sans preuves, par Amnesty International à l’encontre du Maroc.