Vulgariser la musique traditionnelle africaine au Maroc, c’est le souhait de Yaya Diabaté, un koriste sénégalais de 46 ans établi dans le Royaume depuis 2009. Un challenge qu’il souhaite relever à travers son groupe Africa Fusion, fondé le 17 juin 2022.
«Une de mes clientes qui travaillait au ministère de la Culture du Maroc m’a proposé un marché qui nécessitait la création d’un groupe de musique subsaharien. C’est ce qui a motivé sa création. J’ai par la suite intégré à la troupe d’anciens collègues sénégalais, ivoiriens, guinéens, congolais et guinéens» raconte-t-il, en pleine séance de répétition dans une école de musique à Casablanca.
Quelques jours après sa création, l’orchestre se met très vite au diapason. Il distille ses premières notes dans un premier album de douze titres, et participe, le 21 juin 2022 à Rabat, à la Fête de la musique célébrée par le ministère de la Culture. «Ce fut une belle réussite pour nous, puisque le public et les autorités ont bien apprécié notre prestation. Le ministre m’a même remis des attestations et une carte professionnelle d’artiste qui me permet de bénéficier de réductions dans les transports et les hôtels», se souvient Yaya.
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Par la suite, la direction du ministère de la Culture invite Africa Fusion au Festival international des musiques traditionnelles du monde «Volubilis» à Meknès, en présence du ministre. «J’en avais profité pour inviter une chanteuse burkinabè très connue au Maroc et une poétesse ghanéenne pour renforcer le groupe et maintenir son cachet panafricain», souligne-t-il.
Plusieurs contrats de prestations musicales
Aujourd’hui, le groupe a pris ses marques. Diabaté et son staff participent à plusieurs évènements culturels organisés par des ressortissants subsahariens établis au Maroc et des organismes marocains. Mais avant d’avoir cette notoriété, Yaya a dû surmonter certaines épreuves. «Faute de carte de séjour, j’étais obligé de passer par des étudiants pour signer des contrats, moyennant une commission», confie notre interlocuteur.
Des fausses notes que le koriste a pu déjouer au fil du temps. «Maintenant j’ai ma carte d’autoentrepreneur et suis membre du Syndicat des musiciens professionnels du Maroc. J’ai pu signer plusieurs contrats de prestation avec des entreprises ou institutions marocaines dans différentes villes du Royaume ».
Côté rémunération, notre interlocuteur ne se plaint pas trop. «Les cachets du groupe varient entre 2500 et 3000 dirhams. Mon cachet personnel pour une prestation de kora peut atteindre 6000 voire 7000 dirhams», révèle-t-il.
Des cours de kora pour les Marocains
Outre ses prestations musicales, Yaya dispense aussi des cours de kora à des Marocains, passionnés du mythique instrument. Ce dernier commande des calebasses au Sénégal, les assemble au Maroc, avant de les vendre à ces élèves qui s’en serviront durant leur formation. «L’apprentissage de la kora n’est pas facile, puisqu’elle dispose d’un alphabet traditionnel et un alphabet moderne. J’ai pu donner des cours à cinq Marocains, dont Youssef qui a bien maitrisé les premières notes», explique-t-il.
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En 2020, Yaya inaugure un nouveau chapitre dans sa carrière artistique, après son élection à la tête de l’Association des artistes sénégalais résidant au Maroc, nouvellement créée. Objectif de l’entité: venir en aide aux nombreux artistes subsahariens affectés par la pandémie.
Elle est notamment composée de stylistes, de peintres, de danseurs, de musiciens et de percussionnistes. «Beaucoup d’artistes ne vivent pas de leur métier. Nous souhaitons, à travers notre organisation, les soutenir pour leur permettre de gagner dignement leur vie», soutient-il.
L’autre ambition de ce koriste, c’est de perpétuer l’héritage musical de célèbres artistes africains comme le malien Salif Keita et le guinéen Mory Kanté. «Salif Keita et Mory Kanté ont laissé un bel héritage. Nous souhaitons perpétuer ce legs, à notre manière, au Maroc et à l’international», espère Yaya.