1- Je vous écris d’Imsouane, un petit village de pêcheurs à 80 km au sud d’Essaouira. Une crique baignée par des vagues transversales. C’est le paradis des surfeurs. Ils y viennent du monde entier. Et le village a gardé son cachet, avec des pêcheurs qui ramènent quotidiennement leur poisson, des petites bicoques, des cafés avec des chaises et des tables bancales. Des femmes qui font du pain devant vous, des restaurants où le poisson est grillé sur le charbon de bois. Du thé sucré et de la bonne humeur. Pas de mendiants, pas d’enfants qui traînent ou courent derrière les étrangers.
Il y a là une sérénité rare. On regarde la mer qui scintille sans jamais se lasser de ses vagues et de leur écume. Et puis il y a des mouettes par centaines. Et des tracteurs qui tirent les barques des pêcheurs lourdes de poissons et de fruits de mer: sar, daurade, loup moucheté, calmar, merlan, sardine, araignée de mer, rouget, rascasse, sole, crevettes…
Les surfeurs, dans leur combinaison noire, descendent vers la mer. Ils se ressemblent tous. Ils vont passer toute la journée à glisser sur le haut des vagues. Le soir, ils ramènent leur planche, retirent leur combinaison et vont s’attabler dans un de ces petits restaurants où l’on se régale pour si peu d’argent. La belle vie en cet hiver où le soleil est doux et l’air frais le soir.
Imsouane est encore en construction. Il y a quelques villas de luxe et d’autres pas encore finies, beaucoup de terrains vides et une anarchie certaine en ce qui concerne l’urbanisme. Comme Taghazout, Imsouane aura ses hôtels cinq étoiles et un nouveau paysage pour les riches vacanciers.
2- La presse s’étonne du chiffre important récolté par l’État à la suite de l’opération d’amnistie fiscale. Il y a de l’argent au Maroc! Pas chez tout le monde, mais il y en a qui sont fiers de l’exhiber et de payer les 5% réclamés par le fisc.
Il circule sous toutes les formes. L’espèce est encore largement en vigueur. Or, pour lutter contre la corruption, il n’y a pas mieux que de supprimer le cash. En Chine, tout se paye en carte, même dans le commerce informel.
En Europe, on n’a pas le droit d’avoir sur soi plus de 5.000 euros en espèces et on ne peut pas payer en liquide un produit dont le prix dépasse les 1.000 euros. Malgré tout, la fraude est énorme dans les 27 pays européens. La solution radicale reste la fin de l’argent palpable. Tout en carte ou en paiement électronique. Ce qui n’empêchera pas les voleurs et les fraudeurs de trouver des solutions pour continuer à commettre leurs forfaits.
«l’Islam est le ciment de notre société. On ne peut pas le remettre en question. En revanche, ce même Islam n’interdit pas l’interprétation, l’effort pour améliorer la condition des citoyens, en particulier celle des femmes.»
Le citoyen marocain, contrairement à l’européen, aime montrer qu’il a de l’argent. Il est fier de le dépenser sans compter. Et il est content. Ne qualifie-t-on pas en arabe marocain une personne riche de «Labass ‘alih» (en bonne santé)?
D’ici à ce qu’on rencontre des mendiants ou des gardiens de voitures munis de la machine à débiter des sous, il coulera beaucoup d’eau dans l’oued Sebou! Mais ça viendra.
3- Il est tout à fait normal que des journalistes, des intellectuels, des hommes et femmes politiques discutent du projet de révision de la Moudawana. C’est important pour un pays qui se modernise et qui avance de plus en plus vers l’État de droit de disposer d’un Code du statut personnel en adéquation avec l’évolution de la société.
Notre société est diverse, traversée par des tendances parfois rétrogrades et d’autres fois progressistes. Certains tirent vers l’arrière, d’autres souhaitent tirer le pays vers le haut, avec une reconnaissance de l’individu en tant qu’entité unique et singulière, libre, indépendante et responsable.
Comme je l’avais écrit récemment, l’Islam est le ciment de notre société. On ne peut pas le remettre en question. On le laisse en paix. En revanche, ce même Islam n’interdit pas l’interprétation, l’effort pour améliorer la condition des citoyens, en particulier celle des femmes.
Le rite malékite est connu pour sa modération et sa rationalité. Nous ne suivons pas le rite wahhabite (application de la Charia, lecture littéraliste et intransigeante du Coran) comme certains pays du Golfe. Notre Islam est ouvert sur le monde et sur le progrès.
La condition de la femme et de l’enfant relève du social, pas du religieux. C’est une question d’éducation et de considération de l’être.
Le débat est intense, notamment autour de la question de l’héritage. La justice doit trancher. S’il y a égalité de droit entre l’homme et la femme, une égalité d’héritage s’impose sans que cela porte atteinte à la religion. L’Islam n’est pas pour l’injustice et l’inégalité.
Le sujet est délicat, et pourtant important, vu que la femme d’aujourd’hui n’a rien à voir avec celle de l’époque du Prophète. Elle travaille autant sinon plus que l’homme, elle participe à une dynamique essentielle pour le pays et joue pleinement son rôle dans l’évolution et le progrès du pays. La grande majorité de la société civile est dirigée par des femmes courageuses et volontaires, aimant leur pays et décidées à lutter contre les injustices et les inégalités.