Quinze éditions, quinze rendez-vous avec l’histoire d’un Maroc pluriel. Mais surtout, quinze soirées passées à célébrer la richesse d’un pays où la paix, le vivre-ensemble et la tolérance incarnent le quotidien de ses citoyens. Personne n’aura mieux résumé l’essence même de ces retrouvailles annuelles qu’Ahmed Ghayat, l’initiateur de ces rencontres.
«On ne peut s’empêcher de mesurer l’importance de ces instants solennels. On ne peut ignorer non plus la force du symbole que représente cet événement, dans un monde où trop souvent les différences divisent au lieu de rassembler. Le Ftour pluriel, à son accoutumée, est un message, une promesse renouvelée année après année, celle d’un Maroc qui choisit de bâtir des ponts plutôt que des murs, qui fait du dialogue et du respect une réalité tangible et non un simple idéal», a témoigné Ahmed Ghayat, président de l’Association Marocains Pluriels, au début de la soirée qui célébrait hier, dimanche 16 mars à Casablanca, le vivre-ensemble marocain.
17h30: arrivée des invités
Ces mots ont résonné alors que les premiers invités prenaient place à partir de 17h30. Une brochette de personnalités issues de divers horizons— diplomatique, religieux, culturel, associatif— illustrait parfaitement la diversité qui caractérise l’événement depuis sa création. On reconnaissait, entre mille, dès leur arrivée, André Azoulay, conseiller du roi Mohammed VI, et son épouse, Katia, qui ont été salués chaleureusement par l’assistance.
À leurs côtés se trouvaient aussi Seynabou Dial, ambassadrice du Sénégal au Maroc, Marissa Scott, consule générale des États-Unis à Casablanca, Pascale Trimbach, consule générale de France à Casablanca, Nathalie Soirat, consule générale adjointe et Terence Serbin, attaché de cooperation à l’ambassade de France.
Parmi les visages familiers figuraient également les représentants des trois confessions monothéistes: l’imam Omar El Mrini, l’ambassadeur du Vatican à Rabat, Mgr Alfred Xuereb et les rabbins Jacky Sebag, Youssef Israël et David Moyal.
Profitant de ces moments, l’imam de la Zaouia El Kadiria, Omar El Mrini, a tenu à rappeler qu’«au Maroc, et depuis des siècles, musulmans, juifs et chrétiens ont cohabité dans le respect mutuel, tissant ensemble l’histoire d’une société fondée sur la tolérance et la fraternité. Dans notre Zaouia El Kadiria, nous enseignons aux disciples que l’islam est une religion de paix, de dialogue et d’ouverture. Cette même ouverture qui a permis aux Marocains d’accueillir l’autre, quel qu’il soit, sans distinction de foi ou d’origine».
«J’ai eu l’honneur de voir de mes propres yeux cette fraternité à travers de nombreuses rencontres, notamment avec nos frères juifs, qui partagent avec nous les souvenirs d’un Maroc où les synagogues et les mosquées résonnaient des mêmes prières de paix. J’ai aussi vu cette solidarité lors des événements interreligieux, où imams, rabbins et prêtres se retrouvent pour rappeler que l’amour du prochain est une valeur universelle. Notre devoir, en tant qu’hommes de foi, est de préserver cet héritage. De tendre la main à celui qui diffère de nous, de construire des ponts plutôt que des murs, et d’enseigner à nos enfants que l’unité dans la diversité est une richesse inestimable», a-t-il ajouté.
Lors de la quinzième édition du Ftour pluriel qui a été organisée dimanche 16 mars à Casablanca.
Dans cette ambiance conviviale, le rabbin Jacky Sebag, fidèle, lui aussi, du Ftour pluriel depuis sa première édition, n’a pas hésité à exprimer son émotion et son attachement à ce rendez-vous annuel: «Quel plaisir d’être ici ce soir pour la quinzième fois, et on espère, incha’Allah, autant de fois que possible, jusqu’à 120 ans comme on dit chez nous. C’est un événement qui montre au monde ce que signifie être marocain et vivre au Maroc, toutes religions confondues. C’est quelque chose d’extraordinaire, très rare ailleurs mais tout à fait naturel ici. Tout ceci grâce à la clairvoyance de Sa Majesté le roi Mohammed VI. Nous sommes fiers de notre Tamghrabit.»
18h43: moment sacré du ftour et témoignages forts
À l’appel à la prière, précisément à 18h43, la salle devenait silencieuse, apaisée. Les invités prennent place autour des tables soigneusement décorées. Le repas traditionnel du ftour, composé notamment de dattes, lait, harira, chbakia et autres mets typiquement marocains, invite au partage chaleureux et au dialogue.
19h30: célébration du patrimoine, mémoire vivante du Maroc
À 19h30, l’attention s’est tournée vers la scène pour célébrer la richesse du patrimoine marocain, thème central de cette édition. Latefa Ahrrare et Nabyla Maan ont présenté le patrimoine vestimentaire marocain. Habillées par le talentueux Albert Oiknine, elles ont mis en avant toute la finesse et la diversité des caftans et tenues traditionnelles revisitées avec modernité.
Puis ce fut au tour du jeune Amine Dadda, venu spécialement de Belgique, de présenter avec passion les subtilités du patrimoine artisanal marocain, rappelant l’importance cruciale de préserver ce savoir-faire ancestral et de le transmettre aux générations futures.
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Le moment le plus marquant reste incontestablement la remise des «Écharpes de la paix» aux trois femmes nominées pour le Prix Nobel: Sabrina Azoulay, Hanna Assouline et Sonia Terrab.
Très émue, Sabrina Azoulay a exprimé son ressenti devant un auditoire conquis: «Cette distinction nous touche profondément, elle nous engage à continuer encore plus loin dans notre lutte pour la paix. Nous vivons ici au Maroc une réalité extraordinaire, celle de la coexistence pacifique qui n’est pas seulement un espoir, mais notre quotidien.»
20h00: discours et bénédictions unanimes pour la paix
L’imam, le rabbin et l’archevêque se sont levés ensemble pour bénir l’assemblée. Un instant suspendu, une parenthèse d’harmonie où l’on ne distinguait plus les différences, seulement un même souffle, un même espoir.
Place ensuite aux discours des invités. Le conseiller du Souverain, André Azoulay, a ouvert le bal. «Cette édition, la quinzième, a été probablement l’une des plus émouvantes, des plus fortes. Elle incarne avec force et surtout une très grande vérité ce que le Maroc est, ce que le Maroc fait, ce que le Maroc envoie comme message au reste du monde. Dans un temps où tant d’autres succombent à l’archaïsme, au repli sur soi, au rejet, le Maroc, sous le leadership clairvoyant de Sa Majesté le roi Mohammed VI, raconte une autre histoire, un autre demain possible», a-t-il signalé.
«Et cette réalité marocaine, j’oserais même dire cette leçon marocaine, vous l’avez vue ce soir avec cette assistance nombreuse et si diversifiée, représentant toutes les religions, toutes les sensibilités, réunies ici dans un même élan. C’est ce Maroc exemplaire qui fait aujourd’hui ce que beaucoup d’autres pays ne font pas, ne savent plus faire ou ne veulent plus faire: rassembler au lieu de diviser, dialoguer plutôt qu’exclure», a-t-il ajouté.
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Quant à Katia Bitton, co-présidente de l’association Salam Lekoulam, elle a partagé ce que représente ce rendez-vous annuel pour elle: «C’est toujours un événement aussi émouvant, mais aussi important pour nous. Ce Ftour pluriel est un moment précieux de rassemblement, de partage, au-delà de nos croyances religieuses. Il symbolise parfaitement le vivre-ensemble marocain, qui constitue réellement notre ADN.»
«Je suis née à Casablanca, j’y ai grandi et j’ai aujourd’hui la chance d’y élever mes enfants dans ces valeurs d’ouverture, de paix et de tolérance. Le patrimoine est véritablement la mémoire de notre avenir, car nous partageons une histoire commune: juifs, musulmans et chrétiens, nous avons reçu la même éducation, vécu les mêmes traditions, et c’est à nous aujourd’hui de transmettre ce patrimoine commun aux générations futures. Nous sommes tous les gardiens de ces traditions, de cette mémoire collective qui fait notre force», a-t-elle noté.
20h30: des notes musicales pour clôturer la soirée
Après ces discours émouvants, la musique a pris le relais. Les premières notes ont rapidement enveloppé l’assemblée. Tour à tour, les artistes invités ont conquis l’audience. Maxime Karoutchi a su hypnotiser l’assistance en interprétant avec émotion plusieurs grands succès de Zohra Al Fassia, ravivant ainsi la mémoire d’un patrimoine musical judéo-marocain précieux. Marwane a, lui aussi, enchanté les invités par sa voix mélodieuse. Sans oublier les Aïssawa. Les invités, captivés, tapaient du pied en rythme, certains fredonnaient même les paroles avec un sourire complice.
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