L’affaire du chanteur Saad Lamjarred ne laisse personne indifférent. Je souhaite la traiter non pas du point de vue juridique, mais sociologique.
Je n’ai rien à dire sur le déroulement du procès et ne porte aucun jugement sur son issue.
Reste que cet artiste dont la popularité est impressionnante, en partie grâce aux réseaux sociaux (un milliard de vues pour un de ses clips!!), n’a pas été préparé, mentalement, psychologiquement à vivre un tel succès en particulier dans les pays du Golfe. Il paraît qu’un fan saoudien aurait proposé à la plaignante un million de dollars pour qu’elle retire sa plainte.
La notoriété, la célébrité, le succès sont des poisons dont il faut se méfier et tout faire pour les canaliser avant qu’ils n’écrasent et avalent l’artiste en question.
Quelqu’un comme l’acteur américain Leonardo DiCaprio sait de quoi il parle quand il fait remarquer ceci: «Si vous n’êtes pas bien entouré, la notoriété peut être destructrice».
C’est une pédagogie qu’on apprend sur le tas. Pour cela il faut avoir les épaules solides, une éducation sans failles et une volonté de fer. Ne pas se laisser impressionner par les lumières soudaines et aveuglantes, par le bruit amplifié fait autour de vous ainsi que l’agitation qui caractérise certains médias qui adorent exploiter ce genre de situation.
Est-ce que Saad Lamjarrred avait ces atouts?
Peut-être. Il a nagé dans l’océan du succès et l’ivresse s’en est suivie. Une ivresse qui l’a empêché d’avoir les pieds sur terre. Il volait, il était sur les nuages et cela lui convenait jusqu’au jour, où, par inconscience ou par folie passagère le drame eut lieu.
L’histoire des tragédies des stars de la chanson est encombrée d’exemples dont les plus tragiques sont: Jim Harisson, Michael Jackson, Prince, Whitney Houston ou Amy Winehouse. Ils sont tous morts d’overdose de tout: overdose de succès, de drogues et de mal-être.
Saad n’a pas fait d’overdose suite à la prise de drogues. Mais son drame ressemble à une sorte d’euphorie sans limite. À défaut de gérer avec talent ses succès, il s’est laissé emporter par les hautes vagues d’un tourbillon qui ne laisse rien de bon après son passage.
Je ne connais pas cet artiste. Je ne suis pas sensible au genre de chansons qui l’ont rendu si célèbre, mais j’ai constaté combien sa présence sur scène ou dans les clips fait l’effet d’une bombe à chaque fois.
Pourtant, d’après ce qu’on sait, ses parents sont des artistes. Je ne les connais pas non plus. Ils ont dû eux-mêmes se voir dépassés par l’ouragan du succès du fils dont ils sont fiers.
Je les comprends et leur manifeste ma sympathie. Les voilà aujourd’hui face au drame. Les avocats de Saad ont fait appel du jugement. Attendons ce que la justice décidera. Dans tous les cas, ce sont des moments d’angoisse, où la sagesse a du mal à trouver sa place.
Tant de stars, dans tous les domaines, ont souffert de la célébrité et certains ont écrit sur le sujet comme le poète Jean Cocteau: «Il faudrait absolument arriver à rompre en moi les attaches de l’actualité. Ne plus paraître. Travailler dans l’ombre. Être célèbre est absurde lorsque l’œuvre est de plus en plus difficile. L’invisible se charge de sa propre défense».
C’est un travail permanent à faire sur soi, et tenir une discipline issue de la modestie, cette humilité qui caractérise les grands artistes.
Les polémiques qui ont suivi le procès de Lamjarred sont inutiles. Il faudrait plutôt le laisser en paix tout en lui souhaitant du courage pour traverser cette épreuve difficile. C’est l’épreuve de la solitude et du doute.