Si la Direction générale de la sûreté nationale n’a rien à prouver en matière de lutte contre la criminalité dans ses différentes formes, c’est sur un autre registre qu’elle fait déjà parler d’elle. Entendez la digitalisation, notamment des services rendus aux citoyens. Amorcée en décembre 2024 avec l’annonce du lancement d’Epolice (epolice.ma), un portail visant à digitaliser l’ensemble des processus administratifs de la police destinés aux citoyens, une vraie révolution est en cours.
Ce service virtuel, en phase avec les meilleurs usages 2.0 entre une administration et les citoyens consiste à proposer, en ligne, l’ensemble des services administratifs rendus par la Sûreté nationale. C’est d’ores et déjà le cas pour la demande de la fiche anthropométrique. Suivront une dématérialisation totale de ce service, jusqu’à la réception dudit document par courriel, mais aussi celui de la demande et obtention du certificat de résidence ainsi que celui du renouvellement de la carte d’identité nationale électronique ou encore les déclarations de perte ou de vol.
Pour en savoir plus, Le360 s’est rendu dans les locaux de la Direction des systèmes d’information et de la communication de la DGSN, situés à Rabat, pour découvrir les rouages internes d’Epolice. Dans ces bâtiments annexes, nombreuses sont les équipes multidisciplinaires en charge du bon fonctionnement de cette plateforme. Nous sommes dans une des ruelles bordant l’avenue Ibn Sina à Agdal, où nous avons rencontré le contrôleur général Mouhcine Yejjou, chef du programme «Maroc identité numérique», en charge du projet. Sur place, Mouhcine Yejjou veille au grain. La mise en place de la plateforme repose, en partie, sur lui.
Au cœur de l’effervescence des équipes de Epolice, notre guide dévoile la mécanique d’un service pensé pour simplifier le quotidien des citoyens. Il présente d’abord l’équipe digitale «qui se charge de tous les services dématérialisés» et de la plateforme. Le contrôleur général évoque ensuite les équipes de développement et les équipes système «qui supervisent les aspects techniques» de ce portail. Il met un accent particulier sur les équipes de «sécurité» qu’il décrit comme un pilier essentiel de Epolice. Et pour cause «s’il y a quelque chose qui a autant d’importance pour nous que le citoyen, c’est bien la sécurité», affirme-t-il avec conviction.
Inclusivité, simplicité et (surtout) sécurité
Parmi les principaux obstacles relevés, Mouhcine Yejjou évoque la confiance numérique, qui était jusqu’à présent un frein majeur pour la digitalisation. Il explique que «pour accéder à des services numériques, il n’y avait aucun moyen d’authentifier les utilisateurs de ces plateformes.» Ce défi a été surmonté en deux temps. D’abord, avec la mise en circulation de nouvelles cartes d’identité nationale électroniques (CNIE) équipées de puces NFC, les mêmes puces qui sont utilisées pour permettre le paiement par carte bancaire sans contact. Et ensuite, grâce à la plateforme Mon identité numérique qui a pu être intégrée à Epolice et qui utilise, depuis son lancement en 2022, cette technologie NFC, pour authentifier en toute sécurité les titulaires de la nouvelle CNIE.
Cette étape majeure profitera «à tous les organismes» et permettra, au fil des ans, de généraliser la politique de digitalisation, pour que ces derniers puissent, à leur tour, «offrir leurs services en ligne» aux citoyens marocains. Un objectif d’autant plus stratégique dans la perspective de grands événements internationaux, comme la Coupe du monde 2030, où une telle infrastructure numérique jouera un rôle clé.
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Mouhcine Yejjou illustre, pour Le360, le processus: pour demander une fiche anthropométrique, le citoyen commence par se connecter au portail. À l’aide du numéro de sa carte nationale et de la plateforme Mon identité numérique, il accède à une interface où les informations essentielles sont extraites «directement à partir de la puce NFC de la carte», garantissant à la fois simplicité et sécurité. Il n’a rien à faire. Les formulaires sont remplis automatiquement.
5.000 e-demandes déjà traitées
Une fois cette étape franchie, le demandeur est invité à renseigner ses coordonnées –numéro de téléphone ou adresse e-mail– afin d’être tenu informé de l’avancement de sa requête. Il sélectionne ensuite «le centre de remise le plus proche» et procède au paiement, qu’il peut effectuer «en ligne via la plateforme de la Trésorerie générale du Royaume (TGR)», ou en optant pour l’un des multiples canaux proposés par cette dernière, explique-t-il.
Une fois le paiement validé, alors la pré-demande l’est aussi et les équipes de la Sûreté nationale entrent en action. La mécanique bien huilée de leur organisation permet de traiter chaque dossier en un délai compris entre deux et sept jours. Il rajoute qu’enfin, une notification, discrète mais attendue, vient informer le citoyen que sa fiche anthropométrique est prête à être retirée.
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Ce processus simplifie grandement les démarches administratives en réduisant les déplacements: «Le citoyen n’a plus besoin de se rendre deux fois au centre, mais uniquement pour récupérer sa fiche.» À ce jour, plus de 5.000 demandes ont été traitées, «ce qui est encore loin de ce que peut gérer cette plateforme» et la DGSN prévoit de tripler ce chiffre dans les prochains mois grâce à des campagnes de sensibilisation.
Consciente des difficultés que peuvent rencontrer certains citoyens face aux nouvelles technologies, la DGSN a maintenu «le processus physique» parallèlement au portail en ligne. Elle a également développé des bornes interactives pour ceux qui ne disposent pas d’appareils compatibles. Les citoyens peuvent aussi demander l’aide d’un proche pour effectuer leurs démarches, sachant qu’aucune donnée personnelle n’est conservée sur les appareils utilisés.
Les services proposés actuellement sur ce portail ne sont que «la première étape» et vont être étoffés rapidement. La DGSN prévoit de généraliser ce service aux citoyens marocains résidant à l’étranger (MRE), notamment via «les consulats marocains à travers le globe». Une troisième phase permettra la dématérialisation complète: les citoyens pourront imprimer leur fiche anthropométrique, et d’autres documents bientôt, chez eux. Plusieurs services seront également numérisés, comme le certificat de résidence ou la déclaration de perte ou de vol.