Les Touareg ou imazighen, sont des Berbères nomades. Relativement homogène au Nord, notamment en Algérie et en Libye, au Sud, le peuplement touareg s’est peu à peu dilué parmi la population des agriculteurs noirs et des nomades peul de la région sahélienne.
A la fois victimes du «rétrécissement» progressif de leur territoire et d’un classique phénomène de «grand remplacement», les Touareg sont les perdants de la nouvelle histoire née de la décolonisation. Dans les années qui précédèrent l’indépendance, les chefs touareg, réunis à Kidal, demandèrent à la France de ne pas les rattacher aux futurs Etats qui allaient être ethno-mathématiquement dirigés par les Noirs sudistes dont, compte tenu de l’histoire ancienne, ils se méfiaient. En vain.
Aujourd’hui, nous sommes en présence d’un peuple en danger de disparition. En raison des évolutions politiques et démographiques, quasiment partout sur leur territoire historique, les Touareg ne forment en effet plus qu’une minorité. Ce peuple berbère composé d’environ un million et demi de personnes, est dispersé dans le sud de l’Algérie, autour du Tassili n’Ajjer et des villes d’In Salah, Djanet et Tamanrasset, au nord du Mali, au Niger, autour de Bilma et Agadez, ainsi qu’en Libye avec également quelques groupes au Burkina Faso.
De plus en plus marginalisés numériquement, les Touareg sont de moins en moins nombreux dans les régions qui étaient leur domaine exclusif il y a encore quelques décennies. Dans les régions de Gao et de Tombouctou alors qu’ils totalisaient encore jusqu’à 50% de la population lors du dernier recensement colonial de 1950, trente ans plus tard, dans les années 1980, ils n’étaient plus que 20%. Un chiffre qui a encore baissé depuis, et qui s’explique par quatre principales raisons:
une natalité plus basse que chez les autres ethnies;
des mariages exogamiques de plus en plus nombreux;
une émigration continuelle;
l’installation sur leurs terres de nouvelles populations venues du sud.
La croissance démographique est la donnée fondamentale expliquant l’effacement numérique des Touareg. L’explosion démographique régionale fait ainsi qu’en 2040, la population du Sahel devrait doubler pour atteindre 150 millions d’habitants. Or, cette démographie galopante est due aux nouveaux sahélo-sahariens et non aux Touareg.
Ainsi, en Algérie, la seule wilaya d’Adrar a vu sa population augmenter de 39% depuis 1998 cependant que les régions septentrionales du Mali, l’ancien domaine touareg, ont crû de 72% depuis 1987, soit une moyenne annuelle de 3,6%, et même de 80% à Kidal et Tombouctou en seulement quatre ans, de 2005 à 2009. Quant au Niger, la région d’Agadez a accueilli 70. 000 nouveaux arrivants entre 2008 et 2011 et la population a été multipliée par quatre dans le nord du pays en moins de trois décennies, un flot humain qui balaie l’ancien peuplement touareg.
Tout cela provoque une crise existentielle et sociale chez les Touareg, avec pour résultat, la perte des cadres sociaux associée à une marginalisation lente et même, à certains égards, inexorable, et une jeunesse désœuvrée attirée par la montée en puissance des trafics en tous genres, notamment celui de la drogue.