À l’issue du premier tour de vote, L’innocent, comédie policière réjouissante signée Louis Garrel (11 nominations), et La Nuit du 12, un polar de Dominik Moll qui raconte l’enquête impossible sur un féminicide (10 nominations), se sont détachés du lot.
A moins qu’un film comme En corps, le dernier Cédric Klapisch, sur la reconstruction d’une danseuse de l’Opéra de Paris, qui lui aussi a su trouver son public en salle au terme d’une nouvelle année délicate pour le cinéma français, ne crée la surprise pour succéder au grand gagnant des César 2022, Illusions perdues de Xavier Giannoli.
Si le suspense demeure, il y a déjà une certitude: le César de la meilleur réalisation ira à un réalisateur, aucune femme cinéaste n’ayant été nommée cette année. Et Tonie Marshall restera la seule réalisatrice de l’histoire du cinéma français à avoir été sacrée pour Venus Beauté institut... en 2000.
Outre Louis Garrel, Cédric Klapisch et Dominik Moll, Cédric Jimenez (Novembre), et Albert Serra (Pacifiction-Tourment sur les îles) sont sur les rangs dans cette catégorie, snobant des autrices comme Alice Winocour (Revoir Paris) ou Rebecca Zlotowski (Les enfants des autres).
Et dans la catégorie «meilleur film», une seule réalisatrice a vu son œuvre nommée, Les Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi.
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La situation est d’autant plus embarrassante pour les Césars que l’Académie a entrepris un profond renouvellement ces dernières années pour en finir avec l’entre-soi et le machisme qui lui ont été imputés.
«L’année dernière, il a été reproché à l’Académie des Oscars une compétition trop blanche. Cette année, trop masculine. Les César 2023 cumulent, eux, cette double invisibilisation», a souligné le collectif 50/50, en pointe sur ces questions.
Audiences en berne
Côté actrices, Virginie Efira, nommée pour Revoir Paris en témoin d’un attentat dans une brasserie parisienne, a toutes ses chances, face notamment à Adèle Exarchopoulos (Rien à foutre) ou Laure Calamy (A plein temps).
Chez les interprètes masculins, Louis Garrel et Benoît Magimel sont sur les rangs, le dernier pouvant réaliser un doublé après l’avoir emporté déjà l’an dernier pour De son vivant, avec Catherine Deneuve.
Au-delà des prix, la cérémonie des Césars, retransmise sur Canal+, une chaîne qui vient de réaffirmer qu’elle entendait garder sa place de financier majeur du cinéma français, doit une nouvelle fois faire la preuve de sa pertinence.
En plein mouvement social, la soirée sera probablement l’occasion d’une prise de parole sur la réforme des retraites. Mais la cérémonie 2021, où humour déplacé, entre-soi et récriminations des artistes ont créé le malaise, fait encore figure d’épouvantail.
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L’ancienne ministre de la Culture Roselyne Bachelot en a remis une couche en janvier, réservant à l’évènement, qui célèbrerait un cinéma français «gavé d’argent public» et avare de reconnaissance, les pages les plus croustillantes du livre bilan de son passage au ministère.
«Subventions directes, avances sur recettes, exonérations fiscales, intermittence ont créé une économie assistée qui non seulement ne s’inquiète guère des goûts des spectateurs mais professe un mépris affiché pour les films ‘grand public’ et rentables. Donner un César à Dany Boon et ses plus de 20 millions d’entrées pour Bienvenue chez les Ch’tis, pouaaaaah!», ironise-t-elle.
Quand à l’audience, après avoir touché le fond l’an dernier, avec 1,3 million de téléspectateurs, peut-elle encore creuser plus profond ?
Pour tenter de remonter la pente, la présidence de la soirée à l’Olympia a été confiée à Tahar Rahim, et la présentation à une équipe collégiale de maîtres et maîtresses de cérémonie, d’Emmanuelle Devos à Eye Haïdara, en passant par Alex Lutz et Ahmed Sylla.