Hassan El Fad: «Tous ceux qui n'ont pas pu se sucrer sur mon dos me haïssent»

Said Bouchrit / Le360

La série humoristique «Ti Ra Ti», de Hassan El Fad, diffusée tous les jours sur 2M depuis le début du ramadan, cartonne. Dans cet entretien avec Le360, Kabbour ne mâche pas ses mots et révèle les raisons derrière l’animosité que plusieurs nourrissent à son égard.

Le 24/04/2022 à 10h46

Avec Ti Ra Ti, qu’est-ce qui a changé dans le traitement du personnage de Kabbour?L’année dernière, nous avons procédé à un virage avec une comédie romantique. Et cette année, nous avons essayé d’effectuer une sorte de «feuilletonnement» pour qu’il y ait une continuité entre les différents épisodes.

Cela signifie qu’une seule et même histoire se raconte au fil des épisodes, neuf au total. Les autres saisons, c’était différent, car chaque épisode était indépendant et autonome et sur tous les plans. Aussi bien au niveau des thèmes choisis, des gags, que des dénouements. Cette fois-ci, avec Ti Ra Ti, nous avons essayé de faire le voyage à travers une seule histoire au fil de neuf épisodes. C’est une expérience et une aventure risquées.

Ce n’est pas facile de gérer en 5 minutes et l’histoire et le rire qui doit l’accompagner ou en émaner. C’est ce qui a rendu notre mission un tant soit peu ardue, car nous ne devions pas nous éloigner de ce que veut le téléspectateur, ni de l’ADN de la série, à savoir l’identité dramatique à laquelle les gens se sont habitués. Est-ce que nous avons réussi, atteint cet objectif ou pas? Je ne sais pas, mais c’était difficile.

Dans Ti Ra Ti, de nouveaux personnages sont venus se greffer au couple Kabbour et Fatiha. Quel a été selon vous, leur véritable apport? Ce qui est nouveau, c’est le fait d’avoir choisi une autre approche pour le personnage de Tibari et celui de Fatima. Les personnages de Tibari et Fatima se sont détachés de Kabbour.

Ils ne sont plus «les faire-valoir» de Kabbour. Ils sont devenus autonomes et vous allez remarquer comment les gags de Tibari sont percutants. L’idée, c’était de créer un équilibre dans cette série.

Ce qui est nouveau aussi et différent, c’est le fait d’avoir intégré de nouveaux personnages comme celui de Ahmed. La présence des enfants aussi, c’est nouveau. Le casting des enfants est très important. Il y a derrière, un grand travail dans la direction artistique, et la direction d’acteur.

Nous avons tenu à ce que chaque année, il y ait des éléments nouveaux tout en préservant une certaine continuité. Et en même temps, on ne doit pas céder à la monotonie du couple.

C’est pour cette raison qu'il est important de faire évoluer le projet et c’est aussi l’occasion de s’entraîner et d’apprendre de nouvelles choses. Moi par exemple, je n’avais jamais jusque-là écrit un feuilleton.

Nous sommes dans la sixième saison de Kabbour, ça veut dire que nous sommes entrés dans le concept de la saga, à savoir des séries qui durent des décennies.

Vous êtes resté prisonnier du personnage de Kabbour. Pourquoi? Si je ne peux pas sortir du personnage de Kabbour, cela ne me pose aucun problème. Vraiment. Je ne sais pas pourquoi certaines personnes se prennent pour mon directeur artistique en me disant que je dois sortir de Kabbour. Pourquoi? Je ne comprends pas.

Je vous rappelle que Charlie Chaplin a durant toute sa carrière interprété un seul personnage, celui de Charlot. Personne n’est venu lui dire qu’il devait se débarrasser de la peau de Charlot. Idem pour Mister Bean. Aucun Anglais n’est venu lui dire de sortir du personnage de Mr Bean. Darid Laham a durant toute sa vie joué un seul personnage, aucun Syrien n’est venu lui dire «joue autre chose».

Sur le plan de la critique artistique au Maroc, qu’est-ce qui se passe? Je vous explique. Quelqu’un lance une publication sur les réseaux sociaux, et d’autres, qui n’ont aucun point de vue personnel viennent le relayer. Ils ne font que recevoir des avis et les ressasser à leur tour. Mais ce qu’ils doivent savoir, c’est que Kabbour est un personnage conçu pour être viable dans la durée.

Pourquoi personne ne critique la production saoudienne Tach Ma Tach qui a duré une quinzaine d’années ?

Après vous être séparé de Chaibia, est-il vrai que vous vous êtes disputé avec Fatiha?Ces propos sont ridicules et sous-développés. Pour la simple raison qu’il n’y a aucune relation avec le sujet, avec la réalité et en plus, ce n’est pas important. Connaître la relation personnelle que j’entretiens avec mes acteurs, ce n’est pas important. Ce qui est primordial par contre c’est le travail en soi.

Mais tous ces propos entrent dans le cadre d’une sorte de parasitage auquel j’ai droit chaque année à l’approche du ramadan. Entre autres rumeurs, on dit de moi que je touche 300 millions, que je vis la belle vie au Canada et que je me moque du public avec le personnage de Kabbour.

Chaque année, il y a ce parasitage. Et si vous remarquez bien, depuis la sortie de L’couple. il y a 6 ans, tout le monde cherche à savoir si tous les deux sont toujours en bons termes ou s’ils se sont disputés. Cette pensée rétrograde, voire sous-développée, je ne fonctionne pas avec.

Moi, j’entretiens des relations professionnelles avec les acteurs. Nous travaillons dans le cadre d’un partenariat sur un sujet précis ou un projet précis. Toute cette bulle spéculative sur des propos qui n’ont aucun sens est née avec L’couple.

Il faut savoir aussi que je ne me fâche avec personne. Je prends position et je m’en vais. Ma relation avec Fatiha, (Mounia Lemkimel) est raffinée, respectable et professionnelle.

Est-ce vrai que vous percevez un salaire de 3 millions de dirhams? Vous savez, si tout ce que les gens disent sur ce que je perçois comme argent était vrai, je vous assure que j’aurais pris ma retraite déjà à l’heure où je vous parle. Aux chiffres, ils ajoutent quelques zéros à droite, quelques zéros à gauche. Ce sont des chiffres inimaginables. Et même si c’était vrai. Il est où le problème? Qu’est-ce que cela signifie de dire: vous savez ce type, il prend 3 millions de dirhams et il part au Canada. C’était venu à un moment où j’avais refusé de faire L’couple. Ces gens veulent alimenter une image de monstre pécuniaire. Ils ont vraiment extrapolé mon image.

Vous savez, en 2016-2017, je recevais des messages de personnes qui me demandaient des maisons, des voitures alors que moi-même je loue. Ils ont réussi à atteindre les personnes simples d’esprit. Ils jouaient sur les émotions des gens en leur disant «vous savez lui il touche 400 millions et il est parti au Canada». Il y a quatre ans, l’affaire «Hamza mon bb» est passée inaperçue, contrairement à Hassan El Fad.

Pourquoi avez-vous décidé de vous rendre au Canada et d’y résider?J’avais des raisons personnelles et familiales. Je voulais juste rigoler autour de ce sujet, j’avais commencé à écrire un spectacle et les gens ont cru qu’ils avaient le droit de me poser la question sur ce sujet. Et là, je réponds à ces personnes que c’est un sujet qui ne les concerne pas. Mais tant que je suis en train d’expliquer, la personne croit qu’elle a le droit de m’interroger. Les gens ne comprennent pas les limites de la relation que tu entretiens avec eux. Parce que toi tu es connu, lui il se donne le droit de t’interroger sur ta vie privée et de faire intrusion dans ta vie. «Pourquoi t’a acheté cette voiture, pourquoi t’es allé au Canada, pourquoi cette femme?».

Toutes ces questions ont été greffées dans l’esprit des gens, alors qu’auparavant ils ne prêtaient pas attention à cela. Mais ceux qui sont derrière ces rumeurs ont présenté le sujet de manière suspicieuse et ceux qui n’ont rien dans la tête n’ont fait qu’absorber.

Ce sujet de mon revenu et de mon départ au Canada ont été exploités par des médias et des artistes qui n’ont pas pu tirer profit de moi.

Aujourd’hui, avec 1.000 dirhams, vous pouvez acheter une page avec 500.000 ou 1 million d’abonnés et vous mettre à publier des textes qui peuvent paraître innocents à première vue, mais qui sont en réalité, dans le fond, très pernicieux. Et le problème, c’est qu’au Maroc, la plupart des gens n’ont pas de sens critique. Nous avons une école dogmatique. Cela fait partie de l’image monstrueuse qu’on m’a dessinée dans certains médias. Mais l’essentiel, c’est que tout cela n’a impacté ni mon travail, ni ma vie privée. Je n’aime pas répondre en général, par respect au public. Je prends comme base mon travail et la conscience des citoyens. Mais pour être franc, cette conscience n’est pas toujours au rendez-vous.

A votre avis, les réseaux sociaux, est-ce une bénédiction ou une malédiction?C’est à la fois une malédiction et une bénédiction pour tout le monde. Les réseaux sociaux facilitent la communication, la diffusion de l’information, mais ils peuvent se transformer en une malédiction lorsqu’il y a diffamation et diffusion de fausses informations.

Et je ne suis pas le seul concerné par cela. Le plus important, c’est qu’il y ait une conscience sur le bon usage de ces réseaux sociaux. Facebook au début a été créée pour communiquer et non pas pour répandre des pensées vandales et destructrices pour ruiner la réputation des gens. Ce n’est pas la liberté d’expression, c’est un crime.

Si vous abandonnez le monde de la télévision, qu'est-ce que vous comptez faire? J’ai l’intention de renouer avec la peinture. Je prépare mon atelier pour reprendre la peinture. Mais il se peut qu’un jour, vous me trouviez exilé dans un atelier de peinture dans un coin du Maroc comme Al-Hoceima ou Chefchaouen.

Par Hafida Ouajmane et Said Bouchrit
Le 24/04/2022 à 10h46