L’artiste peintre et sculpteur Moa Bennani, décédé mercredi 29 mars 2023 à l’âge de 78 ans, a été inhumé ce jeudi 30 mars au cimetière Sidi Boukhari de Kenitra, sa ville de cœur, selon ses dernières volontés. Un des derniers monstres sacrés de la peinture marocaine, ses amis, artistes, architectes et galeristes, témoignent de sa rigueur, sa sympathie et sa sincérité de cœur.
Jean Claude Laffit, photographe
«Au cœur de son atelier, le temps était suspendu»
La dernière toile qu’il a réalisée sur commande est en monochrome, le noir et ses nuances. L’œuvre, mesure 4 m sur 2,50 m. Je l’avais suivi à l’œuvre et j’ai pu constater que malgré la maladie qui l’avait beaucoup affaibli, il a réussi à produire ce très grand format 15 jours avant son décès.
Un jeune artiste aurait pu reculer devant l’énormité de la tâche se dressant devant lui. Mais Moa, à 78 ans, malgré le nombre des années et les épreuves que le destin nous inflige, continuait de peindre, de créer, de rêver. Rien ne l’arrêtait ni ne pouvait réfréner sa passion pour l’art, le détourner de son désir, une fois encore, de composer une œuvre singulière avec les matières et les couleurs. Tandis que les hommes d’aujourd’hui se morfondent dans la crise, tournent dans leurs têtes des pensées délétères en tripotant leurs gadgets technologiques, Moa Bennani retournait simplement à ses brosses et à sa peinture acrylique, le temps suspendu au cœur de son atelier.
Youssef Douib, artiste peintre
«Un homme attachant au parcours exceptionnel»
Que dire d’un artiste, d’un homme aussi attachant que Moa Bennani sinon que la première chose qu’on ressent à son contact est une grande sérénité, de la bienveillance et une déroutante et surprenante humilité lorsqu’on connaît le parcours exceptionnel de cet immense artiste.
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On pouvait passer des heures à l’écouter parler des choses de la vie sans s’en lasser et rien ou presque ne filtrait sur ses gloires. Des moments délicieux souvent entrecoupés de longs silences lorsque son regard, logé dans un visage lumineux auréolé d’une barbe soyeuse, se perdait dans le paysage qu’on pouvait admirer du haut des baies vitrées de sa maison. Moa Bennani est le genre d’homme dont on n’apprécie la vraie valeur qu’une fois parti. Je prie le Tout-Puissant de l’accueillir en sa sainte miséricorde.
Choukri Bentaouit, galeriste
«Un homme humble, discret, rigoureux»
J’ai vu Moa Bennani pour la dernière fois chez lui dans son appartement face à l’océan. L’artiste, originaire de Tétouan, avait élu domicile à Kénitra. Humble, discret, rigoureux, talentueux et doté de grandes qualités humaines. Il travaillait tranquillement et sereinement ses toiles d’une manière méticuleuse. Sa palette est toujours reconnaissable à mille lieues.
Dans ses toiles, les couleurs se mélangent, s’entrechoquent et explosent dans un big bang sidéral. Dans les années 70, il s’essaya, après la figuration, à l’abstraction géométrique d’abord, et l’abstraction lyrique par la suite. Ses toiles nous apaisent et nous transportent dans un univers sans fin, créant ainsi une poésie propre à Moa Bennani.
Youssef Melehi, architecte
«Un grand artiste s’en est allé»
Moa Bennani est un grand artiste. J’ai toujours apprécié ses belles œuvres, magnifiques. Personnellement, je considère qu’il mérite davantage de reconnaissance. Je présente mes sincères condoléances à sa famille et à son fils particulièrement.