La coopération bilatérale entre le Maroc et Israël ne cesse de se renforcer. Et c’est à Rabat que le théâtre arabo-hébraïque de Jaffa a présenté, pour la première fois dans le Royaume, ses pièces. Au programme figuraient des spectacles sur la vie d'Oum Kalthoum et de Farid El Atrach. Mais aussi la fameuse pièce Papa’Gina, de Hana Vazana Grunwald, qui relate l’histoire d’une femme, Yémima, qui est arrivée par la force de son esprit et de sa volonté à vaincre les schémas stéréotypés négatifs qu’elle a traînés au sein de son milieu familial.
Dramaturge, metteuse en scène et actrice, Hana est diplômée de la Faculté du théâtre communautaire de l'Université de Tel-Aviv et de l'Ecole de travail social, relevant de l'Université Bar-Ilan. Elle est titulaire d'une maîtrise des beaux-arts. Elle a écrit Papa’Gina en 2008 et a participé à plusieurs festivals de théâtre.
De 1998 à 2012, Hana a enseigné et dirigé des projets dans le cadre du programme de théâtre communautaire du département des arts du théâtre, et continue d’enseigner et de travailler avec les jeunes et les personnes à besoins spécifiques. Ses œuvres ne cessent de recevoir les éloges de la presse en Israël, car elle met en avant une population moins représentée. Elle nous parle dans cette interview de son travail, mais aussi de la pièce Papa’Gina qui a été jouée au théâtre Mohammed V, vendredi 16 septembre.
Qui est Hana Vazana Grunwald?
Je suis dramaturge et directrice artistique d’une troupe israélienne de théâtre, composée essentiellement de femmes. Nos pièces abordent généralement les conflits d’ordre social en Israël. Genre, ethnicité, identité, immigration, racisme… sont autant de sujets que nous évoquons dans nos productions. Nous utilisons des formes d’expression émotionnelles, mais aussi visuelles.
Qu’est-ce qui caractérise vos pièces théâtrales?
Nos pièces sont basées sur des poèmes, de la prose, des commentaires (commentary) et des témoignages. Nous recueillons différents textes et nous essayons de les mixer, de sorte à avoir une production bien ficelée.
De quoi parle Papa’Gina?
Papa’Gina est la première pièce théâtrale que j’ai écrite et dirigée. Au début, je pensais que ce serait un one-woman-show. Mais, par la suite, je me suis rendue compte qu’il serait bien d’intégrer d’autres personnages. Au total, nous sommes six acteurs qui interprètent ce spectacle.
C’est l’histoire de Yémima, une fillette de onze ans, qui commence à prendre conscience du monde qui l'entoure. Elle y voit des images d'amour, de passion et de violence.
Les images se dévoilent à elle et la forcent à choisir entre le Baba Sali et Ben Gourion, entre Israéliens et Arabes, entre réalité et imaginaire. Des souvenirs de goûts et d'odeurs bouillonnent sur la scène et tentent le narrateur d'aujourd'hui pour rencontrer la Yémima d'autrefois. Tout se déroule à Jaffa, à la fin des années 70.
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Ce show raconte mon histoire personnelle. Ma mère m’appelait autrefois «Papa’Gina». Elle voulait que je sois toujours vigilante et en état d’alerte. Elle voulait que je l’aide tout le temps. Mais, moi je voulais m’échapper de la réalité en lisant des livres et en laissant mon esprit errer.
Mais au final, ce n’est pas seulement mon histoire que je raconte. C’est celle de plusieurs personnes qui partagent ce même vécu. Beaucoup s’identifient au personnage principal. Cela me donne toujours le sourire.
Cette pièce théâtrale narre aussi le vécu de plusieurs juifs marocains qui ont immigré en Israël et auquel notre théâtre local ne rend pas justice.
Comment réagit généralement le public en regardant Papa’Gina?
Comme je disais, je pensais que c’était une histoire personnelle, puisqu’elle relate une partie de mon vécu. Mais tout au long des années de performance de Papa’Gina, à savoir douze ans, le public qui est venu assister à nos shows s'est reconnu dans les personnages.
Les spectateurs s’amusent et prennent du bon temps, du commencement à la fin du spectacle. Ils ont aussi droit de goûter à des plats que nous préparons lors de notre pièce… C’est parce que je veux que mes créations soient accueillantes et conviviales.
Y a-t-il des artistes marocains parmi les acteurs de Papa’Gina?
Nous sommes quatre Marocains parmi les acteurs de Papa’Gina. Il y a aussi des acteurs du Yémen et d’Egypte.
Allez-vous jouer dans d’autres villes au Maroc?
J’aimerais bien partir dans d’autres villes marocaines pour présenter mes pièces théâtrales. J’aime beaucoup le Maroc. Je préserve un lien indéfectible avec mon pays d'origine. Mes parents sont d’ici, de Taroudant et d’un village près de Marrakech. C’est ce qui explique mon attachement au Royaume.