L’économie nationale «a fait preuve d’une forte capacité de rebond» au troisième trimestre 2024, après une première moitié d’année au ralenti, indique le Haut-commissariat au plan (HCP) dans un point de conjoncture. Le PIB a ainsi crû de 4,3%, en variation annuelle, au lieu de +2,4% en moyenne au premier semestre.
Cette dynamique a induit une légère amélioration du taux d’emploi, qui s’est situé à 37,6%, mais sans pour autant permettre une baisse du taux de chômage, s’établissant pour le cinquième trimestre consécutif au-dessus de 13%, note-t-il.
Le bon comportement de la croissance au troisième trimestre 2024 reflète, selon le HCP, un dynamisme de l’activité hors agriculture qui s’est accélérée à un rythme plus soutenu qu’attendu, s’établissant à +5,1%, au lieu de +3,2% en moyenne au premier semestre.
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Cette relance, portée par «une vive et concomitante progression de la demande intérieure et extérieure», a été confirmée par les dernières enquêtes de conjoncture, avec une hausse des taux d’utilisation des capacités productives et une amélioration quasi-générale de l’activité des branches secondaires et tertiaires marchandes, signale-t-il.
Il ajoute que, stimulées par le regain de la demande européenne et asiatique, les exportations nationales en volume ont connu une hausse de 9,8% au troisième trimestre 2024, au lieu +7,8% au trimestre précèdent. Ce sont particulièrement les industries locales extractives et celles des branches de la chimie, de l’électronique, de l’automobile et du textile qui en ont le plus profité, avec des hausses respectives de leurs valeurs ajoutées de 15,9%, 18,2%, 16,1%, 16% et 5,3%, au troisième trimestre 2024, en variations annuelles.
Idem pour les services qui ont connu une accélération, affichant une progression de 3,8%, grâce notamment à l’affermissement de la demande intérieure. La consommation des ménages s’est affermie, avec une hausse de 3,9% au troisième trimestre 2024 et la croissance de l’investissement s’est accélérée à 13,5%, traduisant un effort soutenu d’équipement des entreprises privées pour le remplacement et la modernisation de leur appareil productif, ainsi qu’un renforcement des projets d’infrastructure.
L’expansion des investissements plus vigoureuse
La relance de l’activité s’est, également, accompagnée par une augmentation sensible des besoins de financement de l’économie vis-à-vis du reste du monde, s’établissant à +3,8% du PIB trimestriel. Malgré une amélioration de l’épargne privée, l’expansion des investissements a été plus vigoureuse, entrainant une hausse de l’endettement du trésor et des entreprises.
Cet élan de croissance se serait ralenti à la fin de 2024 et devrait reprendre relativement au début de l’année en cours, selon le HCP. En fait, note-t-il, au cours du quatrième trimestre 2024, la croissance du PIB aurait été de 3% et devrait s’accélérer à 3,5% au premier trimestre 2025, «notamment si les conditions climatiques s’orientent vers un régime plus pluvieux pendant la saison hivernale, avec des niveaux pluviométriques proches des normales saisonnières».
Le HCP explique qu’hors agriculture, la croissance de l’activité économique continuerait d’évoluer à des niveaux dépassant les rythmes tendanciels post-Covid, mais se réajusterait progressivement, pour se situer à 3,7% et 3,5% respectivement au quatrième trimestre 2024 et au premier trimestre 2025.
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La demande intérieure resterait le principal moteur de l’activité, avec une hausse de 5,4% au quatrième trimestre. Les dépenses de consommation poursuivraient leur dynamique, mais la croissance de l’investissement brut serait modérée, après la relance enregistrée au troisième trimestre, indique le HCP.
Ainsi, développe-t-il, l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages, due aux mesures socio-fiscales en faveur des employés des secteurs public et privé et au ralentissement de l’inflation, soutiendrait une augmentation des dépenses de consommation de 3,2% au quatrième trimestre 2024 et de 3,4% au premier trimestre 2025, en variations annuelles. Quant à la consommation des administrations publiques, elle serait boostée par la hausse combinée des dépenses de biens et services et de fonctionnement.
Il ajoute que les perspectives de modération de la demande étrangère, associées à la hausse anticipée des coûts salariaux, pousseraient les entreprises privées à limiter progressivement leurs projets d’équipement. A contrario, les investissements des entreprises publiques dans les infrastructures liées à l’organisation des événements sportifs d’envergure et aux projets de dessalement de l’eau de mer resteraient sur leur lancée, favorisant une hausse de l’investissement brut de 9,8% au quatrième trimestre 2024 et de 8,8% au premier trimestre 2025.
Les tensions inflationnistes resteraient contenues
En ce qui concerne la contribution des échanges extérieurs à l’activité, elle resterait négative au cours de cette période, mais pèserait moins lourdement sur l’activité au début de 2025. Ainsi, les exportations afficheraient une légère accélération en volume, avec une augmentation de 7,1% au premier trimestre 2025, après +6,2% au trimestre précédent. La croissance des importations serait, quant à elle, moins soutenue qu’à la mi-2024, sur fond de modération de la demande intérieure.
S’agissant des tensions inflationnistes, elles resteraient contenues, avec un accroissement des prix à la consommation de 0,7% au quatrième trimestre 2024, après +1,3% au trimestre précédent. Cette évolution, attribuable, en partie, à un effet de base élevé, serait due à une hausse de 0,7% au lieu de +1,4% des prix des produits non-alimentaires et de 0,7% au lieu de +1% des prix des produits alimentaires.
Les prix des produits frais auraient poursuivi leur baisse entamée au début de l’année dernière (-0,7 en point de contribution à l’augmentation des prix au quatrième trimestre), sous l’effet du repli des prix des légumes frais, après les fortes hausses enregistrées au cours de la même période de 2023. La régression des cours internationaux des matières premières énergétiques aurait, pour sa part, causé une contribution négative de la composante énergétique à l’inflation globale (-0,1 point, contre +0,3 point au troisième trimestre).
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En revanche, l’inflation sous-jacente, qui exclut les prix soumis à l’intervention de l’Etat et les produits à prix volatils, aurait évolué à un rythme légèrement supérieur à celui réalisé un trimestre auparavant, soit +2,5% au lieu de +2,3%, se situant pour le quatrième trimestre consécutif au-dessus de l’inflation globale. Cette évolution se serait expliquée par la hausse des prix des produits alimentaires non frais, mais également par l’augmentation de 1,4% et 0,6% de ceux des services et des produits manufacturés.
Globalement, les perspectives de croissance pour l’économie nationale sur le court terme «restent entourées par des marges aléatoires à la hausse», note le HCP. En effet, explique-t-il, la situation conjoncturelle internationale reste empreinte d’incertitudes, notamment en raison des risques liés au maintien des tensions géopolitiques au Moyen-Orient et en Europe, qui pourraient conduire à la recrudescence des tensions inflationnistes et nécessiter des mesures publiques plus vastes pour le soutien du pouvoir d’achat.
Les conditions climatiques hivernales décisives
Il ajoute que, d’un autre côté, la demande dans la zone euro pourrait être plus dynamique que prévu, notamment si les finances des ménages se réorganisent après la dissipation des effets de la vague de l’inflation stimulant la demande des consommateurs, ce qui pourrait impulser de manière plus forte les exportations et l’industrie nationales.
Il convient, également, de noter, selon le HCP, que le principal aléa négatif qui affecterait sensiblement les perspectives d’évolution de l’économie nationale, notamment au premier trimestre 2025, est lié à l’évolution des conditions climatiques hivernales.
En fait, relève-t-il, le cumul pluviométrique depuis le début de la campagne agricole jusqu’à fin décembre 2024 est en recul de 60,6% par rapport à une saison normale. «La poursuite des conditions sèches au premier trimestre 2025 devrait engendrer une perte d’au moins 0,8 point de croissance par rapport au scénario envisagé pour le premier trimestre 2025 selon nos premières estimations», avance-t-il.