Le commerce extérieur marocain traverse une phase critique, ce qui suscite moult inquiétudes de la part de nombreux économistes, relève le magazine Challenge, indiquant que selon l’Office des Changes, le déficit commercial du Royaume s’est aggravé de 6,5% à fin novembre 2024, atteignant 275,74 milliards de dirhams, contre 261,36 milliards au cours de la même période en 2023.
Bien que le taux de couverture des importations par les exportations reste stable (autour de 60%), le déficit continue de croître.
Les exportations ont augmenté de 5,2% au cours des onze premiers mois de 2024, contre une hausse de 5,7% pour les importations, ce qui accentue le déséquilibre.
Cette situation découle de plusieurs facteurs, notamment une facture énergétique en hausse, un nombre insuffisant d’entreprises exportatrices, et une concentration géographique et sectorielle des exportations.
En effet, le Royaume du Maroc compte plus de 5.000 entreprises exportatrices, mais 80% des revenus générés à l’international proviennent de moins de 20% d’entre elles.
Par ailleurs, 85% des exportations sont concentrées dans trois régions seulement.
Sur le plan sectoriel, six secteurs dominent: l’automobile (34,4%), l’agriculture et l’industrie alimentaire (19,3%), les phosphates et leurs dérivés (17,8%), les produits en cuir (10,7%), l’aéronautique (5,3%) et l’électronique (4,3%).
Cette concentration rend le modèle économique vulnérable aux variations mondiales.
Cité par le magazine, Abdeslam Touhami, expert en économie, souligne qu’il est crucial d’augmenter le volume et la valeur des exportations marocaines.
Cela passe par une diversification des marchés, au-delà de l’Europe, et une montée en gamme des produits à forte valeur ajoutée.
Il préconise également d’élargir les secteurs exportateurs, d’améliorer la compétitivité des produits marocains et d’ouvrir davantage de canaux de distribution à l’international.
«Omar Hejira, secrétaire d’État au Commerce extérieur, estime que le Maroc perd chaque année un potentiel d’exportation de 120 milliards de dirhams, soit une somme équivalente au budget alloué à la reconstruction des régions sinistrées par le séisme d’Al-Haouz (2024-2028)», écrit-on.
Ce manque à gagner résulte de capacités de production sous-exploitées, en particulier dans certains secteurs-clés.
En réponse, le gouvernement a lancé une feuille de route pour le commerce extérieur sur la période 2025-2026, dont le détail sera présenté en février prochain.
Une task force du ministère de l’Industrie et du Commerce a identifié des secteurs porteurs susceptibles de générer 120 milliards de dirhams d’exportations supplémentaires, dont 12 milliards ciblant spécifiquement le marché africain.
Ces secteurs incluent l’automobile (37 milliards de dirhams), le textile (16,8 milliards), la chimie et parachimie (13,1 milliards), l’agroalimentaire (8,9 milliards), la mécanique et métallurgie (6,9 milliards), les matériaux de construction (2,4 milliards), la pharmaceutique (1,4 milliard), les dispositifs médicaux (1,1 milliard) et le papier/carton (52 millions de dirhams).
Pour maximiser ces opportunités, environ 1.200 marchés internationaux ont été identifiés.
Des fiches détaillées, couvrant 200 produits et leurs marchés potentiels, ont été élaborées pour guider les entreprises marocaines.
L’Afrique représente un marché prometteur, avec un potentiel estimé à 12 milliards de dirhams, soit 10% du total manqué.
En 2023, les échanges entre le Royaume du Maroc et l’Afrique ont atteint 52,7 milliards de dirhams, mais les exportations vers ce continent ne représentent que 7,6% du total.
Le gouvernement prévoit plus de 60 projets d’investissement en Afrique, incluant des infrastructures comme une nouvelle ligne maritime entre Agadir et Dakar, et des unités industrielles pour stimuler les exportations marocaines.
Cependant, les exportateurs marocains font face à des défis logistiques, réglementaires et financiers.
Pour y remédier, le gouvernement propose une plateforme en ligne centralisant les informations sur les marchés africains et les démarches d’exportation.
Au cœur des recommandations, des mesures fiscales, comme une harmonisation des taux d’imposition pour les entreprises situées dans et hors des Zones d’accélération industrielle (ZAI), ainsi que la création d’un Fonds de développement des exportations.