Hausse des droits de douane par les États-Unis: quelles implications pour le Royaume?

Revue de presseL’économiste Zakaria Abbass a été interrogé sur le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, qui s’accompagne d’une hausse généralisée des droits de douane, impactant directement les exportateurs marocains. Le Royaume est appelé à diversifier ses partenariats, à renforcer sa résilience et à défendre un commerce durable. Cet article est une revue de presse tirée d’une tribune, publiée par Les Inspirations Éco.

Le 07/04/2025 à 19h47

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche marque un virage décisif dans la stratégie économique des États-Unis.

L’annonce d’un relèvement généralisé des droits de douane, dès le 1er avril 2025, touchant aussi bien la Chine, l’Union européenne, l’Inde, le Japon, que le Royaume du Maroc, ouvre un nouvelle voie dans la politique protectionniste américaine.

Dans une tribune publiée sur Les Inspirations Éco, Zakaria Abbass, Enseignant-chercheur en stratégie d’entreprise et commerce international à l’Euromed Business School –Université Euroméditerranéenne de Fès-, explique que cette politique s’inscrit dans une logique de repli stratégique: «Donald Trump relance une vision datée du commerce mondial, fondée sur la confrontation tarifaire, et l’idée d’une autosuffisance nationale… dans une économie pourtant globalisée», a-t-il expliqué.

Avec des droits de douane planchers de 10%, et des surtaxes pouvant atteindre 34% selon les pays, le Royaume du Maroc figure désormais sur la liste noire commerciale des États-Unis.

Cette décision pourrait bouleverser l’équilibre de plusieurs secteurs industriels marocains.

«Les justifications avancées —telles que des normes sanitaires ou environnementales jugées restrictives— ignorent les logiques de souveraineté réglementaire et menacent directement le commerce international multilatéral», a jugé Abbass.

Depuis l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange Maroc-USA en 2006, les exportations marocaines vers les États-Unis ont fortement progressé, notamment dans les secteurs du textile, de l’agroalimentaire et des composants automobiles.

Mais cette dynamique pourrait être brutalement freinée: «les nouvelles barrières tarifaires vont affecter la compétitivité des produits marocains. Les entreprises exportatrices devront revoir leurs marges, ajuster leurs stratégies de pénétration, voire rediriger leurs flux commerciaux», prévient l’enseignant-chercheur, qui ajoute que certaines filières intégrées aux chaînes de valeur mondiales pourraient subir un contrecoup indirect, notamment via la hausse du coût des intrants, ou une baisse de la demande globale.

Ainsi, la surtaxe de 25% sur les pièces détachées automobiles pourrait fragiliser les écosystèmes installés au Maroc et tournés vers l’exportation.

Pour Abbass, la stratégie de Trump est en décalage complet avec les réalités du commerce contemporain: «cette vision ignore l’hyper-interdépendance des chaînes de production mondiales. À l’ère du cloud computing et des plateformes logistiques globales, la relocalisation totale est économiquement irréaliste et stratégiquement risquée», a-t-il souligné.

L’enseignant-chercheur cite également les effets négatifs anticipés de cette politique: inflation, tensions diplomatiques, incertitudes pour les entreprises et fragilisation du commerce mondial: «ce n’est pas une simple mesure conjoncturelle, mais un tournant stratégique», souligne-t-il.

Plutôt que de subir cette rupture, le Royaume du Maroc peut y voir une opportunité, d’abord en diversifiant ses débouchés à l’export, notamment vers l’Afrique, à travers la ZLECAf, ou vers l’Asie du Sud-Est.

Ensuite, en renforçant sa position sur un commerce équitable et durable: «le «Made in Morocco» doit désormais reposer sur l’innovation, la montée en gamme, la conformité aux standards internationaux et une stratégie de marque portée par une diplomatie économique ambitieuse», a plaidé Abbass, qui appelle aussi à un renforcement du rôle de l’État dans l’accompagnement des exportateurs, la négociation d’accords bilatéraux équilibrés, et la mise en place d’outils d’intelligence économique capables d’anticiper ce type de chocs.

«La décision de Donald Trump marque une étape de rupture dans l’ordre économique mondial», a conclu Abbass, qui estime, alors que la vision d’un monde multipolaire vacille, que «seuls les pays capables de flexibilité, d’anticipation et de cohérence stratégique sauront tirer leur épingle du jeu», relaie le quotidien. «Le vrai défi n’est pas d’éviter la tempête, mais de savoir y naviguer avec lucidité», a-t-il estimé.

Par Nabil Ouzzane
Le 07/04/2025 à 19h47

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