Le CESE mesure l'ampleur des dérogations dans l'immobilier

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Revue de presseKiosque360. Le Conseil économique, social et environnemental vient d’épingler l’administration marocaine et les promoteurs immobiliers. Dans une étude portant sur plusieurs villes de plus de 400.000 habitants, il montre que la dérogation est devenue la règle.

Le 01/12/2014 à 22h45

900 hectares ont changé d’affectation pour servir non pas l’intérêt général, mais celui bien particulier des opérateurs. Le stratagème est simple, sans pour autant être simpliste. Dans sa Une, Akhbar Al Yaoum révèle que 1.000 ha ont ainsi été sortis du domaine agricole sur dérogations pour être donnés au secteur privé. Les dérogations ne concernent pas uniquement les terres, mais aussi les finalités des projets. Par exemple, 420 ha destinés aux espaces verts ont été transformés en immeubles et en habitations par les promoteurs. Et l’étude du CESE de souligner que 900 ha ont ainsi été détournés de leur objectif premier qui les destinait à être des constructions d’intérêt général.

La loi contournée de manière légaleBien des dérogations octroyées n’ont pas respecté les dispositions juridiques y afférentes. En effet, la loi interdit d’octroyer des dérogations dans les zones foncières réservées à des projets d’intérêt général. De surcroît, la majorité des dérogations profitent aux promoteurs immobiliers et non pas aux industriels, aux opérateurs touristiques et aux infrastructures. Le CESE a répertorié les municipalités qui ont le plus recouru à la dérogation entre 2003 et 2013 et les superficies totales concernées. Sur le total des terres ayant fait l’objet de ce type de procédure, Marrakech remporte la palme d’or avec 26% des terres concernées, suivie de Casablanca comme dauphine avec 19%. La région de Meknès-Tafilalet vient en 3ème position avec 11%, talonnée de près par la région de Doukkala-Abda. En bas du hit-parade de la dérogation, la région de Tanger-Tétouan, qui n’affiche qu’un taux de 8%.

Les résultats de cette étude du CESE ne font que corroborer ce que l’on pressentait déjà. Les dérogations ont favorisé l’enrichissement illicite de centaines, voire de milliers de promoteurs. Ce n’est pas un hasard si le secteur immobilier a totalisé entre 51 et 55% des dérogations entre 2003 et 2013. Les projets d’infrastructures ont bénéficié de 24% d’entre elles, ceux liés au tourisme de 14% et ceux relatifs à l’industrie de 11%. Là où le bât blesse, c’est que ces dérogations ne servent pas le développement urbain des cités. Elles ont en fin de compte un caractère purement spéculatif. Le CESE dévoile ainsi que, sur un total de 7.578 projets ayant obtenu un accord préalable pour une dérogation, seuls 898 sont prévus dans des zones d’urbanisation nouvelles sur une étendue globale de 6.649 ha. Le reste est composé de dérogations pour augmenter le nombre d’étages, pour apurer des situations foncières ou pour réviser les modalités de projets déjà finalisés. L’étude du CESE a pointé du doigt l’absence d’outils de suivi, d’évaluation et d’action en ce qui concerne l’achèvement des chantiers qui ont été approuvés. Si le conseil reconnaît l’impact positif des dérogations sur l’économie (583 MMDH d’investissements et plus de 304.000 emplois), leurs effets néfastes sur l’urbanisme et sur l’aménagement du territoire sont nombreux.

Par Amine Haddadi
Le 01/12/2014 à 22h45