La croissance économique nationale devrait se consolider en 2025 après sa décélération en 2024, en raison de la reprise modérée du secteur agricole et de la poursuite des performances des activités non agricoles. C’est ce qu’indique le Haut-commissariat au Plan (HCP), qui table sur une croissance du 3,8% en 2025 après une progression de 3% estimée en 2024.
Ainsi, note-t-il dans le budget économique prévisionnel 2025, tenant compte d’un accroissement du secteur de la pêche maritime de 6,5% en 2025 après 3,8% estimé en 2024, le secteur primaire devrait s’améliorer de 4,2% en 2025, après une baisse de 4,6% estimée en 2024, contribuant ainsi positivement de 0,4 point à la croissance du PIB après une contribution négative de 0,5 point en 2024.
Dans le détail, il s’attend à une progression de la valeur ajoutée agricole de 4,1% en 2025, sous l’hypothèse d’une production céréalière inférieure à la moyenne, après un repli de 5% estimé en 2024.
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Selon le HCP, la campagne agricole 2024/2025 devrait se caractériser par des conditions climatiques relativement plus favorables que celles de la campagne précédente, qui a connu un déficit pluviométrique sévère, menant à une production céréalière limitée à 31,2 millions de quintaux.
Le début de la campagne a été marqué par un bon niveau de précipitations, malgré les chocs thermiques qui ont suivi, ajoute-t-il, estimant que la reprise des précipitations en ce début d’année devrait profiter à la production végétale.
Pour les activités d’élevage, poursuit-il, quoique soutenues par diverses mesures gouvernementales, elles resteraient confrontées à l’impact négatif de la récurrence des années de sécheresse, et au défi de la reconstitution du cheptel national.
Activités non agricoles: poursuite de la bonne performance
Les activités non agricoles auraient connu une amélioration de 3,8% en 2024 et devraient augmenter de 3,6% en 2025, sous l’effet de la dynamique continue du secteur du BTP, des activités minières et des activités industrielles, ainsi que par la poursuite du bon comportement des activités du commerce, du tourisme et du transport, selon le HCP.
Ainsi, l’activité industrielle, représentant 59% de la valeur ajoutée secondaire en moyenne entre 2019 et 2023, devrait connaître s’accroitre de 3,7% en 2025 après une hausse attendue de 4% en 2024. Quant à l’activité des industries chimiques, stimulée par une appréciation de la demande extérieure, aurait rebondi de 12,9% en 2024 contre seulement 1,2% en 2023, grâce au raffermissement de l’industrie des engrais chimiques orientée vers l’export.
Celle-ci aurait profité de la limitation des exportations chinoises et russes en engrais phosphatés face à une demande accrue en provenance de l’Inde et du Brésil. En 2025, les industries chimiques resteraient dynamiques, quoiqu’en ralentissement, en lien avec la poursuite prévue de l’amélioration de la demande extérieure pour ces produits.
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Pour les industries du matériel du transport, elles auraient connu une croissance «remarquable» de 14,4% en 2024, grâce à l’implantation de nouveaux équipementiers et l’extension des usines de l’automobile qui auraient permis d’accroître les capacités de production.
L’industrie aéronautique aurait été, quant à elle, soutenue par la hausse des ventes dans l’assemblage et les systèmes d’interconnexion du câblage électrique. En 2025, ces industries devraient poursuivre leur dynamisme avec une croissance de l’ordre de 9,6%, grâce aux investissements directs étrangers dans le secteur de l’automobile, qui devraient permettre d’introduire de nouvelles technologies et de renforcer la production nationale, notamment celles des batteries électriques.
A contrario, l’industrie textile devrait continuer de pâtir de la faible compétitivité sur le marché mondial, de la forte dépendance aux marchés européens et de la prédominance des activités informelles, dans un contexte des coûts élevés de l’énergie et de la faiblesse de l’amont textile local, selon le HCP. Sa valeur ajoutée aurait, ainsi, connu une croissance négative de 3% en 2024 avant de s’améliorer légèrement de 1,7% en 2025.
Le secteur secondaire croitrait de 3,8% en 2025
S’agissant de l’industrie agroalimentaire, représentant 27,5% de la valeur ajoutée industrielle en moyenne entre 2019 et 2023, elle devrait connaitre une croissance modérée de près de 1,3% en 2025, au lieu de 0,9% estimée en 2024 et un repli de 0,2% en 2023, suite aux retombées relativement favorables de l’amont agricole.
Au cours de 2025, les activités du secteur du BTP devraient poursuivre leur progression avec une croissance de 3,8%, au lieu de 4,2% estimée en 2024 après un recul de 0,4% en 2023. Cette dynamique devrait être appuyée par la contraction progressive des prix des matériaux de construction et par l’allègement des conditions de financement, encourageant l’investissement des promoteurs immobiliers.
Elle devrait aussi profiter de l’accélération des projets d’infrastructures hydrauliques et énergétiques, des programmes liés à l’organisation des grandes manifestations sportives et de la poursuite des mesures en faveur de l’accès au logement et du programme de réhabilitation des zones sinistrées.
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Concernant l’activité minière, fortement liée à l’industrie des produits chimiques, elle aurait rebondi de 17,9% en 2024, «marquant un retournement positif» après deux années consécutives de recul de 23% et 2,7% respectivement en 2022 et 2023, souligne le HCP.
Cette reprise reflète la consolidation de la production du phosphate brut, stimulée par une demande locale accrue des industries de transformation pour les engrais chimiques, explique-t-il. En 2025, le secteur est appelé à poursuivre son raffermissement avec une croissance de 5,9%, boostée par la hausse continue de la production marchande du phosphate.
De ce fait, le secteur secondaire pourrait afficher une valeur ajoutée en hausse de 3,8% en 2025, après 5,1% estimée en 2024, contribuant ainsi de 0,9 point à la croissance économique nationale au lieu de 1,2 point en 2024.
Le tertiaire continuerait de soutenir la croissance
Le secteur tertiaire, principalement orienté vers le marché intérieur, continuera de soutenir la croissance économique en 2025, avec une amélioration de 3,5%, après 3,2% prévue en 2024. Cette évolution serait due à la bonne tenue des services non marchands de 3,2% en 2025 au lieu de 3,4% estimée en 2024, et des services marchands de 3,6% en 2025 au lieu de 3,2% attendue en 2024.
Ainsi, l’activité du commerce, dont la valeur ajoutée représente 19% du secteur tertiaire en moyenne sur la période 2019-2023, s’accroîtrait à un rythme soutenu de près de 2,5% en 2024 et 2025, en liaison avec la croissance de l’activité économique.
Quant à l’évolution des services rendus aux entreprises, elle devrait s’établir à 3,8% en 2025, grâce à la reprise de l’activité du secteur secondaire. De plus, les activités immobilières devraient s’améliorer de 2,2% en 2025, profitant de la relance de l’activité de construction.
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En ce qui concerne la valeur ajoutée du secteur touristique, elle pourrait s’améliorer de 7,4% en 2025, au lieu de 7,7% attendus en 2024 après un rebond de 23,5% enregistré en 2023, «suite à la performance exceptionnelle des arrivées et des recettes touristiques, grâce notamment à l’organisation de manifestations internationales et aux efforts déployés pour promouvoir la destination du Maroc et améliorer son accessibilité», explique le HCP.
De leur côté, les services de transport et d’entreposage devraient voir leur valeur ajoutée progresser de 5,9% en 2025 au lieu de 4,4% attendus en 2024. Cette bonne tenue devrait être soutenue par l’accroissement continu du trafic aérien et maritime, grâce notamment à la poursuite de la performance des exportations du phosphate roche, de ses dérivés et des produits du matériel de transport, selon le HCP.
Demande intérieure: une dynamique consolidée
Le HCP table, dans le budget économique prévisionnel 2025, sur une croissance de la consommation des ménages en 2025 de 3% après 3,2% estimés en 2024. Il explique cette tendance notamment par un niveau maitrisé de l’inflation et par une amélioration des revenus suite aux augmentations salariales décidées dans le cadre du dialogue social, au bon comportement des transferts des MRE et à la poursuite de l’attribution des aides sociales directes. Ainsi, la contribution de la consommation des ménages devrait atteindre près de 1,8 point à la croissance du PIB en 2024 et 2025.
Ainsi, tenant compte de la consommation des administrations publiques qui devrait évoluer de 4,1% en 2025 après une hausse attendue de 3,9% en 2024, la consommation finale nationale devrait s’accroitre de près de 3,3% en 2025 après 3,4% estimés une année auparavant, contribuant à hauteur de 2,6 points à la croissance du PIB, après 2,7 points en 2024.
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L’investissement brut devrait rester sur sa lancée entamée en 2023, note le HCP, profitant de l’impact positif des différents chantiers prévus et en vigueur, notamment dans le cadre de la poursuite de l’orientation favorable de la politique budgétaire en matière d’investissement, des préparatifs pour l’organisation des manifestations internationales et de la tendance évolutive des IDE, explique-t-il. Il devrait se raffermir de 6,7% en 2025, après une hausse de 9,1% estimée en 2024, contribuant de 2 points à la croissance en 2025.
De ce fait, et après une progression estimée à 4,9% en 2024, la demande intérieure devrait continuer à soutenir l’activité économique, avec une hausse de 4,2% en 2025, contribuant ainsi à hauteur de 4,6 points à la croissance du PIB, contre une contribution de 5,3 points attendue en 2024.
Demande extérieure: contribution négative à la croissance
Bénéficiant d’une demande internationale vigoureuse, les exportations des métiers mondiaux se seraient bien comportées en 2024, en particulier dans les secteurs de l’automobile et de l’aéronautique, et devraient maintenir leur performance en 2025.
En outre, les exportations de phosphate et de ses produits dérivés auraient enregistré une progression notable en 2024, portée par une forte demande des principaux partenaires, et devraient ralentir en 2025 sous l’effet de base. En revanche, les expéditions du secteur du textile connaitraient une croissance modérée, limitée par une faible demande étrangère et par la persistance d’une concurrence rude sur les marchés internationaux.
Par ailleurs, après une évolution modérée en 2024, l’offre exportable des produits agricoles et agroalimentaires devrait bénéficier en 2025 d’une reprise prévue de la production agricole. Dans ce contexte, le volume des exportations des biens devrait enregistrer une hausse de 7,4% en 2025, au lieu de 7,6% estimée en 2024.
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S’agissant des importations des produits alimentaires, elles devraient se maintenir pour répondre à la demande locale, estime le HCP. De même, les importations en animaux vivants poursuivront leur trajectoire haussière dans l’objectif d’alléger la pression sur le cheptel national. Les biens d’équipement et les demi-produits devraient afficher, quant à eux, une croissance marquée en 2024 et 2025, soutenue par la dynamique de l’investissement et la bonne performance des secteurs exportateurs dépendants des intrants importés.
Idem pour les produits finis de consommation orientés à la hausse en 2025, sous l’effet d’une demande intérieure renforcée. Dans ces conditions, le volume des importations des biens devrait croître de 7,9% en 2025 après une augmentation estimée à 11,1% en 2024. S’agissant des échanges des services, la performance de l’activité touristique aurait significativement contribué à la croissance des exportations des services de voyage et de transport.
Ce trend se maintiendrait en 2025 en raison du renforcement de l’attractivité touristique. Ainsi, le volume des exportations des biens et services devrait évoluer de 7,7% en 2025, après 7,9% prévus en 2024. En même temps, le volume des importations des biens et services devrait afficher une hausse de 7,9% en 2025, contre 11,1% prévue l’année dernière. Dans ce contexte, la contribution de la demande extérieure nette à la croissance économique en 2025 devrait rester négative de 0,8 point après -2,3 points en 2024.
Le déficit commercial s’allégerait à 19,6% du PIB
Le HCP estime que la baisse des cours des matières premières entamée depuis 2023 devrait se poursuivre, permettant un allégement des factures énergétique et céréalière. Toutefois, l’évolution de la valeur des importations des biens devrait atteindre 6,1% en 2025 après 5,6% attendue en 2024, suite à la vigueur du volume importé. Parallèlement, la valeur des exportations des biens devrait progresser de 6,8% en 2025, contre 5,4% estimée l’année précédente.
Ainsi, le déficit commercial devrait s’alléger, passant de 19,9% du PIB en 2024 à 19,6% en 2025, un niveau supérieur à la moyenne de 16,3% sur la période 2015-2019 et le déficit du compte courant devrait s’établir à 1,5% du PIB en 2024 et 2025, tenant compte des performances des revenus des MRE.
Le taux d’épargne intérieure devrait marquer un accroissement, passant de 20,7% du PIB en 2024 à 21,1% en 2025. Tenant compte des revenus nets extérieurs qui devraient représenter 7,4% du PIB en 2024 et 7,1% en 2025, l’épargne nationale devrait atteindre 28,3% du PIB en 2025. Le niveau d’investissement brut devrait avoisiner 29,8% du PIB en 2025 après 29,6% estimé en 2024. Ainsi, le besoin de financement devrait se stabiliser autour de 1,5% du PIB en 2024 et 2025.
Selon le budget économique prévisionnel 2025, le déficit budgétaire se serait inscrit en allégement en 2024 pour avoisiner 3,5% du PIB avant de s’établir à près de 3,9% en 2025. Il explique que les perspectives des finances publiques devraient être caractérisées par un accroissement plus marqué des dépenses globales que des recettes ordinaires en 2025.
Celles-ci devraient poursuivre leur raffermissement, profitant de la hausse simultanée des recettes fiscales et non fiscales de 7,5% et 5,6% respectivement. Les recettes fiscales devraient continuer de se consolider atteignant près de 19,8% du PIB en 2025 après 19,5% prévus en 2024.
Les recettes non fiscales devraient s’améliorer en profitant des recettes des mécanismes de financements innovants ainsi que des revenus en provenance des établissements et entreprises publics. Les dépenses globales devraient poursuivre leur tendance haussière en 2025, atteignant près de 28,8% du PIB après 28,2% estimé en 2024.
Maintien des niveaux élevés des taux d’endettement
La dette du trésor devrait poursuivre sa trajectoire haussière en 2025 pour atteindre près de 69,9% du PIB, niveau quasi-similaire à celui prévu en 2024. La dette intérieure, composante prédominante de la dette du trésor, devrait augmenter pour se stabiliser à près de 52,4% du PIB en 2025. De son côté, la dette extérieure du trésor devrait atteindre un ratio aux alentours de 17,5% du PIB en 2024 et 2025, après un ratio de 12,9% en moyenne de la période 2016-2019.
S’agissant de la dette extérieure garantie, elle devrait progresser pour avoisiner 13,4% en 2024 et 2025, après avoir connu des fluctuations depuis 2018.
Pour les créances sur l’économie, elles devraient poursuivre leur tendance haussière, progressant de 6,2% en 2025 après une augmentation prévue de 6,5% en 2024. De leur part, les avoirs extérieurs nets devraient évoluer de 2,2% en 2025 après une hausse spectaculaire estimée à près de 17% en 2024.