L'annonce, ce mardi, de la démission de Hammad Kassal de son poste de président de la commission «Financement et délais de paiement» a pris de court le microcosme des patrons de la CGEM. Celui qui fut un sérieux candidat à la présidence du patronat et qui, entre-temps, a dû se retirer et soutenir la candidature de Salaheddine Mezouar lors des élections de mai 2018, a finalement choisi de jeter l’éponge.
«Je suis un enfant de la CGEM. Je milite depuis 1995 au sein de cette grande institution. Malheureusement, je ne me retrouve plus dans la philosophie de la gestion actuelle», explique Hammad Kassal, interrogé par Le360.
C'est jeudi 20 juin dernier que Salaheddine Mezouar a reçu la lettre de démission de ce membre du conseil d'administration. Réponse du patron des patrons, par sms: «on ne démissionne pas sur un coup de tête». Depuis, aucun contact n’a été établi entre les deux hommes qui se connaissent depuis belle lurette (ils ont fréquenté tous deux les banc de l’université Pierre Mendès-France de Grenoble).
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La période choisie par Hammad Kassal pour son retrait soulève plusieurs interrogations. Cette démission coïncide en effet avec la tenue, hier à Rabat, d'une réunion de l’Observatoire des délais de paiements, un organe dans lequel siègent les représentants des secteurs public et privé. Cela fait plus de neuf mois que Hammad Kassal a un statut d’interlocuteur privilégié du gouvernement sur le dossier des délais de paiement. Toutefois, n’étant pas membre de cet Observatoire, Kassal n’a pas assisté à la réunion de lundi dernier. «Il était certes question de renouveler les représentants de la CGEM au sein de l’Observatoire, mais cela ne justifie en aucun cas ma démission», insiste Kassal. La vraie raison de sa démission, selon lui, réside dans l’absence de visibilité, d’efficacité et dans le manque de courage quand il s’agit de prendre des décisions qui vont dans le sens d’une véritable réforme structurelle du phénomène du retard dans les délais de paiement.
Hammad Kassal, qui a sillonné les régions du Maroc en compagnie des dirigeants de la Trésorerie générale du royaume (TGR) et de la Direction générale des collectivités locales (DGCL) affirme avoir été surpris du traitement réservé à ses propositions par ses pairs au sein de la CGEM. Ses recommandations incitant au relèvement des intérêts de retard ou encore celles visant à durcir le ton vis-à-vis des entreprises privées qui ne paient pas à temps leurs fournisseurs, en leur interdisant l’accès aux marchés publics (avec cette idée, la sienne, d’une liste noire) seraient restées lettre morte.
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Si les mesures annoncées en début de semaine par le ministre de l’Economie et des Finances s’adressent directement aux entreprises publiques, il reste encore beaucoup à faire pour réduire les créances interentreprises dans le secteur privé, lesquelles totalisent plus de 423 milliards de dirhams, soit 8 fois le montant cumulé des créances détenues par les entreprises publiques. Hamad Kassal ne mâche pas ses mots à l’encontre du «lobby des grandes entreprises» qui, selon lui, résiste à la réforme des délais de paiement dans le secteur privé.
A travers sa démission, Hammad Kassal fustige aussi ce qu’il appelle la «politisation» du patronat. «La deuxième chambre a tué la CGEM. Les batailles intestines qui accompagnent les nominations l’emportent sur l’intérêt de l’entreprise», regrette l’ancien président de la fédération des PME.
Au moment où nous mettions en ligne, la CGEM, qui prépare la réunion de son assemblée générale, prévue demain, mercredi 26 juin, n’a pas encore réagi à la démission du président de la commission «Financement et délais de paiement».