Nouvel épisode dans le bras de fer entre les contrôleurs aériens de Casablanca et l’Office national des aéroports (ONDA). Cette fois-ci, il ne s’agit pas de revendications sociales, mais plutôt de sécurité aérienne. Ces aiguilleurs du ciel dénoncent une transition d‘un ancien vers un nouveau système AMS (système de gestion du trafic aérien), au niveau du centre de contrôle régional de Casablanca (CCR). Un changement provisoire entre deux salles de contrôle en vigueur depuis ce mardi 4 juillet à minuit.
Dans un communiqué publié le lundi 3 juillet sur leur page Facebook, le syndicat des contrôleurs aériens du Centre régional de la sécurité et de la navigation aérienne de Casablanca affilié à la CDT condamne «la précipitation de la Direction du PNA (Pôle de la navigation aérienne) qui caractérise sa gestion de cette transition, malgré les risques énormes qu’encoure ce changement majeur qui aurait dû être préalablement bien planifié et solidement construit pour être dûment exécuté dans la confiance et la sérénité».
L’organisation dénonce aussi sa non implication dans le processus de changement du système AMS, «conformément aux accords signés entre la direction générale de l’Office national des aéroports (ONDA) et le Bureau national unifié des contrôleurs aériens».
Contacté par Le360, un des responsables du syndicat indique que les contrôleurs ne sont pas contre ce changement, mais ils dénoncent plutôt la manière avec laquelle il s’est opéré. «Depuis 2016, nous avons envoyé plusieurs correspondances pour demander le changement de ce système, mais les délais liés à l’octroi du marché à un prestataire ont longuement retardé sa mise en œuvre. Un marché a finalement été octroyé à la société espagnole Indra, avec laquelle nous travaillons», affirme-t-il.
Toujours selon lui, la nouvelle salle provisoire n’a pas été homologuée pour le suivi du contrôle aérien en temps réel. «Elle est trop petite, hors norme, sans issue de secours, ni plan d’évacuation, ni de système de renouvellement d’air».
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Le syndicaliste dénonce aussi l’empressement des autorités dans la prise de cette décision. «Les responsables de la navigation aérienne du CCR n’ont pas respecté la règlementation. La phase test qui devait durer un mois voire plus, a été bâclée en une semaine. Les compagnies aériennes ne sont pas avisées. Il n’y pas eu de publication aéronautique pour informer les usagers et prestataires de services».
Autre grief reproché à l’ONDA, le timing choisi pour opérer cette transition. «Une transition pareille ne devrait pas se faire durant une période estivale, marquée par une hausse du trafic. Partout dans le monde, elle se fait entre octobre et novembre. Même la baisse du trafic de 30% prévue dans le cadre de cette opération est anecdotique, vu l’important flux attendu. Nous souhaitons que l’ONDA revoit le processus de transition, et qu’il respecte la règlementation», souligne-t-il.
L’ONDA dément…
Notre interlocuteur révèle en outre l’envoi de cinq correspondances notamment à la directrice générale de l’ONDA, au ministère de tutelle, à la direction de l’aviation civile, et des copies de ces courriers ont été transmises au Chef du gouvernement et au ministère de l’Intérieur, mais sans réponses.
D’après le syndicat, ces conditions de travail constituent un risque pour la sécurité de la navigation aérienne et la santé des contrôleurs aériens. «Par conséquent, nous dégageons toute responsabilité quant à l’occurrence d’incident ou accident aérien, à cause de la gestion aléatoire et improvisée de ce changement majeur», alerte-t-il.
Contacté par Le360, une source autorisée de l’ONDA réfute ces accusations. «Il n’y a pas eu de précipitation dans la mise en place du nouveau système AMS. Elle a été mûrement réfléchie et préparée depuis une longue date. La migration a été menée avec succès. Cela entre dans le cadre de la politique de modernisation de la gestion de la navigation aérienne qui constitue l’un des axes majeurs du plan stratégique Envol 2025 de l’ONDA».
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D’après la même source, ce système de haute technologie de dernière génération adopté par une cinquantaine de pays dans le monde qui ont un trafic de survol le plus intense, «permet une meilleure interopérabilité, respectant les normes européennes les plus sévères en termes de navigation aérienne dans le monde».
Selon notre interlocuteur, l’étude de transition vers le nouveau système a été approuvée par la direction générale de l’aviation civile qui relève du ministère du Transport et de la logistique. Les contrôleurs ont été formés au Maroc et en Espagne.
Interrogé sur le choix de l’été pour effectuer cette migration, notre source indique que «les responsables de la navigation aérienne ont estimé que la période estivale est un atout pour l’implémentation du nouveau système qui est plus performant que l’ancien. Cela permettra de mieux gérer la croissance du trafic».
Quid des conditions de travail dans la nouvelle salle? «Trois contrôleurs travaillent dans cette salle qui respecte les normes. Ce changement de système a été opéré en collaboration avec le gestionnaire de l’espace aérien espagnol ENAIRE. Le PNA a même reçu les félicitations de ses homologues espagnols et d’Eurocontrol pour le succès de cette transition», répond notre source.