L'accord annoncé jeudi prévoit l'acquisition par Disney, déjà studio le plus rentable de Hollywood en 2016, d'une partie des actifs de film et de télévision de 21st Century Fox pour plus de 50 milliards de dollars. "C'est certainement une fusion historique mais ce n'est pas la première fois que deux studios fusionnent, 20th Century Fox est lui-même issu d'une fusion", rappelle le producteur Jean-Luc de Fanti.
L'acquisition découle surtout de la volonté de Disney, dont la marque est connue dans le monde entier, d'avoir davantage de pouvoir face aux géants du numérique Netflix, Amazon et, à l'avenir, Google et Apple, et de diversifier les contenus "car le catalogue Disney est assez maigre avec des produits très ciblés famille", ajoute-t-il.
L'opération va accélérer la consolidation des studios et marier les superhéros de Marvel, de la saga intergalactique "Star Wars" et des films d'animation Pixar avec les épopées de science-fiction "Avatar", "La planète des singes" ou des mutants de "X-Men". Cela pourrait ouvrir la voie à de super-productions mariant plusieurs univers type "Avengers contre X-Men", plébiscitées par le public. Et les fans de "Star Wars" pourraient enfin acheter un coffret de la collection complète des épisodes, car les deux premières trilogies appartiennent à Fox.
20 hectares de plus pour MickeyLes oreilles de Mickey pourraient bientôt flotter sur les 20 hectares de studios de la Fox, dans le quartier de Century City à Los Angeles, s'ajoutant aux installations de Disney dans son fief de Burbank, au nord de la cité des Anges. La vénérable maison fondée par Walt Disney doit notamment s'emparer de la prestigieuse antenne de distribution de films du magnat Rupert Murdoch, qui a accumulé 27 nominations aux Golden Globes lundi, bien plus que ses autres rivaux combinés.
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Une des questions qui émeut le secteur du septième art est de savoir si Disney, qui a vendu en 2010 son unité de films d'art et d'essai Miramax, aura les reins suffisamment solides pour garder Fox Searchlight dans son écurie. Ce très respecté distributeur a fait tourner les têtes cette saison avec des titres parmi les plus attendus aux Oscars comme "3 Billboards", "La forme de l'eau" et "Battle of the Sexes".
Mais s'il sait décrocher les prix, il n'a pas la puissance au box-office de 20th Century Fox qui a engrangé 826 millions de dollars en 2017 avec seulement trois films: "Logan", "Baby Boss" et "La planète des singes-suprématie". L'accord offrirait aussi à Disney la possibilité de doubler -à 60%- sa part dans le service de streaming Hulu, en obtenant ainsi le contrôle et permettant de l'allier à son propre service de visionnage en flux dont le lancement est prévu pour 2019.
Les créateurs de The Simpsons l'avaient préditPar ailleurs, Disney accèdera à des contenus haut de gamme comme les programmes des chaînes câblées FX ou National Geographic, des films à succès comme "The Revenant" et "Seul sur Mars" ou de la saga animée culte "Les Simpsons" - qui avait prédit il y a vingt ans le rachat de 20th Century Fox par Mickey.
La décision des autorités américaines de la concurrence pourrait ne pas intervenir avant 2019, mais beaucoup s'inquiétaient jeudi des conséquences du "deal": le syndicat de scénaristes Writers Guild West estime qu'il soulève "des inquiétudes évidentes et importantes sur la concurrence".
"Même Fox, avec toutes ses ressources (...), anticipe un avenir toujours plus coûteux dans la fabrication des films", remarquait avant la fusion David Sims dans The Atlantic. Il est donc difficile de voir comment Universal, Sony et Paramount vont y parvenir, sachant qu'ils s'appuient déjà sur d'autres sources de revenus comme la télévision pour produire des films.
Jeremy Slater, créateur de "The Exorcist" sur Fox, ne mâchait pas ses mots: "La fusion Fox/Disney est affreuse pour plusieurs raisons et je ne peux pas imaginer ce qui pourrait en ressortir de bon pour notre série". Beaucoup spéculaient aussi à Hollywood sur de nombreux licenciements pour éliminer les doublons dans l'administration des studios.
Richard Greenfield, analyste de médias pour la société de services financiers BTIG, observe auprès de l'AFP que cette union ne serait peut-être pas du goût des exploitants de salles, auxquels Disney a déjà imposé de lui reverser 65% des ventes de billets en Amérique du Nord pour "Star Wars: Les derniers Jedi", une portion supérieure à la normale.