En appelant ses membres à suspendre l’activité pendant 72 heures, l’Association marocaine du transport national, international et de logistique (AMTNIL), veut faire entendre sa voix et protester contre les restrictions de visas imposées aux conducteurs de poids lourds marocains par les consulats français et, dans une moindre mesure, espagnols.
«Cela fait un an que les services consulaires français et espagnols ont changé d’attitude avec les routiers marocains. Plus de 400 conducteurs se voient refuser le visa par les consulats de France et d’Espagne pour des raisons infondées, sachant que la plupart d’entre eux ont plus de 10 ans d’expérience et ont déjà obtenu leurs visas à plusieurs reprises», dénonce Said El Chrif, président de l’AMTNIL, interrogé par Le360.
«Ce n’est pas une grève des chauffeurs. L’initiative émane des dirigeants des entreprises de TIR qui ont pris la décision de suspendre leur activité pendant 72 heures», tient à préciser l’AMTNIL.
Le modus operandi choisi par cette association laisse présager un blocage total du trafic maritime entre les deux rives de la Méditerranée. Au départ, elle a donné rendez-vous, aux premières heures du dimanche 21 novembre 2021, aux camionneurs marocains pour un rassemblement devant les portes de Tanger Med et du port d’Algésiras pour mettre leur plan à exécution. Leur acte était prévu pour perturber le trafic maritime entre le Maroc et l’Espagne durant la période allant du 21 au 23 novembre.
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En suspendant l’accès aux deux ports, quelques soient les dates retenues, le mouvement de l’AMTNIL risque de provoquer d’énormes pertes financières, à la fois aux compagnies maritimes assurant la desserte Tanger Med-Algésiras (majoritairement espagnoles), aux constructeurs automobiles français qui exportent l’essentiel de leur production pendant le week-end, ainsi qu’à tous les opérateurs marocains ou étrangers actifs à l’export comme à l’import, surtout en cette période marquant le début de la campagne d’exportation des produits agricoles.
Le président de l’AMTNIL est conscient du préjudice que ce mouvement pourrait causer en bloquant le trafic maritime entre le Maroc et l’Espagne, mais c’est le seul moyen, dit-il, pour sensibiliser les autorités marocaines, françaises et espagnoles sur «la situation invivable» des entreprises impactées par les restrictions de visas.
«Si on refuse le visa aux conducteurs marocains, les accords bilatéraux signés avec la France et l’Espagne, notamment ceux régissant l’activité du TIR, deviennent caducs et ne servent que les intérêts du pavillon étranger», note Said El Chrif.
Et d’ajouter: «La situation devient intenable. Des centaine de camions se trouvent aujourd’hui à l’arrêt, alors que les entreprises sont tenues de continuer à honorer les charges courantes, y compris les salaires des conducteurs sans visas et les échéances du leasing auprès des sociétés de financement».
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A noter enfin que le mode de contestation choisi par l’AMTNIL n’est pas unanimement partagé parmi les professionnels du TIR, y compris au sein de la Fédération du transport et de la logistique affiliée à la CGEM qui, elle, privilégie le maintien de la voie du dialogue pour solutionner ce problème.
A en croire son président, l’AMTNIL revendique les deux tiers du parc de camions au Maroc (transport routier national et international) avec plus de 65.000 entreprises et une prédominance de mono-entrepreneurs détenant un à deux camions. Elle a joué un rôle décisif dans le mouvement de grève enclenché en 2018, lequel avait réussi à bloquer pendant plusieurs jours l’activité du port de Casablanca, entre autres.
A la publication de ces lignes, Le360 a appris que l’AMTNIL a décidé de reporter d’un mois la date d’exécution de la décision de suspension de l’activité du TIR.
«A l’issue des réunions tenues à Tanger (17 novembre) et Agadir (19 novembre), et après un long débat, il a été décidé de reporter la mise en œuvre de cette décision», souligne l’AMTNIL dans un communiqué.
L’association justifie cette décision par sa volonté d’aligner les dates du mouvement sur la même période durant laquelle les transporteurs espagnols comptent mener une grève de l’autre côté de la rive de la Méditerranée, à savoir les 21, 22 et 23 décembre.