Depuis le début de la crise sanitaire, les établissements bancaires au Maroc font face à une montée en flèche des impayés et des créances en souffrance. Les projections s’attendent à ce que le taux de créances en souffrance du secteur bancaire nationale atteigne 14% d’ici la fin de l’année (au lieu de 7,5% en début d’année 2020).
Depuis le début de l’année, et jusqu’à fin juillet, l’encours des créances en souffrance est passé de 70 milliards de dirhams à 77 milliards de dirhams, soit un additionnel de 7 milliards de dirhams en 7 mois.
Interpellé sur ce sujet lors de la traditionnelle session de questions-réponses qui suit la réunion du Conseil de la Banque centrale, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, s’est montré plutôt rassurant.
«Nous suivons la situation de très près», a-t-il d’emblée assuré. «Nous sommes actuellement à un niveau de créances en souffrance de 8,1%, et les provisions sont à un niveau acceptable», a-t-il précisé. Le gouverneur de la Banque centrale assure aussi qu’il suit de très près les impayés sur les moratoires (reports des échéances de crédits) décidés par le Comité de veille économique.
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Bank Al-Maghrib fera un point détaillé sur cette question avec le Groupement professionnel des banques au Maroc (GPBM), en novembre prochain. «Les choses seront plus claires en novembre. Nous ferons alors le point sur la situation et sur les éventuelles répercussions sur les résultats des banques et leur solvabilité. Nous analyserons aussi où se situent les dégâts: est-ce au niveau des TPE? Des grandes entreprises? Des ménages?», a-t-il indiqué.
Le Wali ne manque pas de rappeler que cette tendance n’est pas propre au Maroc. Les secteurs bancaires au niveau international aussi font face à cette problématique de la montée des impayés, suite au déclenchement de la crise sanitaire. Partout dans le monde, la pandémie, le confinement et le fait que les mesures de relance n’ont pas encore donné leurs résultats, font que la solvabilité des emprunteurs est mise à rude épreuve.
Le gouverneur de la Banque centrale a par ailleurs rappelé que les stress tests conduits cette année ont démontré la résilience du secteur bancaire marocain, grâce notamment à l’implémentation progressive, ces dernières années, des normes prudentielles bâloises (Bâle I, II et III).
Faut-il assouplir ces règles, jugées contraignantes par certains banquiers et qui exercent une pression importante sur les fonds propres, afin d’augmenter la capacité des banques à distribuer des crédits?
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«Nous savons faire preuve de flexibilité, comme nous l’avons démontré avec le report de la circulaire sur les déclassements des créances sensibles ou sur les dations», répond le Wali. Mais, s’est-il empressé d’ajouter, «les règles prudentielles ont rendu service aux banques». «Il faut que le système bancaire garde ses règles prudentielles, qu’il n’y ait pas de problème de solvabilité», a-t-il souligné, excluant ainsi tout assouplissement supplémentaire de ces règles.
«Il ne faut pas fragiliser le secteur bancaire. Surtout pas! En particulier s’il s’agit de banques systémiques», a-t-il prévenu.
Pour l’instant donc, il n’y a pas péril en la demeure pour les banques. Mais là où la cote d’alerte est visiblement atteinte, c’est au niveau des sociétés de financements. Selon le wali, les sociétés de crédits à la consommation font face à une augmentation «invraisemblable» des impayés et des créances déclassées...