Tous les yeux étaient rivés ce samedi 12 juin sur un seul indicateur en Algérie. Celui de l’évolution de la courbe du taux de participation aux élections législatives, voulues comme le point de départ d’un «changement radical» par le pouvoir algérien. De 3,7% à 10h00 ce matin, ce taux est passé à 10,02% à 13h00, puis à 14,47% à 16h00…, une évolution à pas de tortue en somme.
En suivant les télévisions algériennes, publiques et privées, qui ont diffusé en direct, et de bout en bout, cette journée d'élections, on est frappé par la désaffection quasi totale des bureaux de vote, même dans les 3 wilayas, sur 58, qui ont dépassé les 30% de taux de participation, à savoir les lointaines Tindouf, Illizi et In Guezzam. Paniqué par cette désaffection, le pouvoir a donné l’ordre à l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) de prolonger d’une heure l’ouverture des bureaux de vote, pour tenter de booster un tant soit peu le taux de participation dérisoire sur le plan national.
Cette nouvelle bérézina électorale, que vient de subir le régime algérien, était certes attendue, mais son ampleur a dépassé les prévisions. D’ailleurs, le président Abdelmadjid Tebboune a attendu plus de quatre heures après l’ouverture des bureaux de vote pour aller jeter son bulletin dans l’urne. Histoire d’avoir des données sur le niveau de participation avant de s’adresser aux médias, à la sortie du bureau de vote. Voyant clairement que la tendance était à la très forte l’abstention, il a choisi la fuite en avant en déclarant que cette tendance, pourtant lourde de conséquences, lui «importe peu».
Cependant, certains porte-voix du régime vert-kaki, alertés par le nouveau fiasco qui commençait à se dessiner clairement dès la mi-journée de ce samedi, ont tiré à boulets rouges sur le président algérien. Bouc-émissaire, marionnette ou fusible, Abdelmadjid Tebboune a déjà été rendu responsable de ce fiasco programmé pour avoir été totalement sourd aux appels prétendument sages, lancés par l’armée algérienne, en vue de reporter sine die les législatives, dans l’attente d’hypothétiques meilleures conditions socio-politico-économiques. Une armée qui a pourtant fini par soutenir fermement les élections et qui a massivement mobilisé, ce samedi, son haut commandement afin qu'il aille voter parmi les premiers.
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Mais quand on voit que le taux d’abstention à Alger affiche moins de 6%, ceux de Béjaïa et Tizi Ouzou moins de 1%, soit respectivement 0,79 et 0,45%, ces wilayas étant le berceau du Hirak, on en conclut que ce dernier est le grand vainqueur des législatives, sans y avoir participé avec un seul vote, ni un seul candidat. C’est finalement son slogan, «Makanch intikhabat maa el issaba» (il n’y a pas de vote avec la bande), qui a eu le dernier mot. D'autant que la diaspora algérienne, très impliquée dans le Hirak, n’a donné pour sa part qu’un taux de participation de seulement 3,7%
Avec un taux d'abstention aussi massif, est-ce que le pouvoir peut maintenir les résultats de ces élections? Tebboune peut-il survivre à ce désastre qu’il a défendu corps et âme? Tous les regards sont tournés désormais vers les généraux? Que vont-ils faire?