Dans l’après-midi d'hier, jeudi 25 mars, il n’a fallu que quelques petites minutes à la Cour d’appel militaire de Blida pour prononcer l’acquittement du général Hassan, ancien chef du Service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste (Scorat), dépendant de l’ex-Département du renseignement et de la sécurité (DRS).
Pour rappel, le général Hassan a été mis à la retraite par le président Abdelaziz Bouteflika vers la fin de 2013, avant d’être arrêté en août 2015, jugé par le tribunal militaire d’Oran, puis condamné à cinq ans de prison ferme trois plus tard, en novembre 2015, pour «destruction de documents» et «infraction aux consignes» militaires. S’il est avéré que le général Hassan, sentant l’étau se resserrer sur lui, a effectivement détruit plusieurs documents compromettants pour son patron, Mohamed Mediène, dit Toufik, il aurait également refusé de collaborer avec les hommes de l’ancien chef d’état-major de l’armée algérienne, feu le général Ahmed Gaid Salah, qui lui ont proposé un poste important à la présidence, en contrepartie de la divulgation d’informations sensibles sur Toufik.
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Or, certaines voix se demandent pour quelles raisons est intervenu ce recours à la cour d’appel militaire de Blida, du moment que le demandeur a purgé l'ensemble de sa peine, soit 5 ans en totalité, et a, entre-temps, quitté la prison, totalement libre, en décembre dernier?
C’est tout simplement parce que le général Hassan est l’époux de la sœur de Toufik. Cette proximité familiale a fait du général Hassan le bras droit et l’homme de confiance de Toufik, du temps où il dirigeait le puissant DRS. D’ailleurs, quand le général Hassan a eu des problèmes avec la justice, Toufik est sorti de sa réserve, en 2015, et a rendu public –fait rarissime– un communiqué où il avait plaidé en faveur de son beau-frère.
Dans ce communiqué, Toufik écrit: «en ce qui concerne l’opération qui a valu au général Hassan l’accusation d’“infraction aux consignes générales“, j’affirme qu’il a traité ce dossier dans le respect des normes et en rendant compte aux moments opportuns. Après les résultats probants qui ont sanctionné la première phase de l’opération, je l’ai félicité –lui et ses collaborateurs– et encouragé à exploiter toutes les opportunités offertes par ce succès. Il a géré ce dossier dans les règles, en respectant le code de travail et les spécificités qui exigent un enchaînement opérationnel vivement recommandé dans le cas d’espèce. Le général Hassan s’est entièrement consacré à sa mission. Il a dirigé de nombreuses opérations qui ont contribué à la sécurité des citoyens et des institutions de la République. Sa loyauté et son honnêteté professionnelle ne peuvent être mises en cause».
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Le général Hassan est pourtant le bras armé qui va dévoiler au monde l’incompétence de l’armée algérienne en 2013, lors de la prise d’otages du site gazier d’in Amenas. En tant que chef du Scorlat du DRS, et qui fut également à la tête du Groupement d’interventions spéciales, corps d’élite formé d’éléments de la gendarmerie et de l’armée, Hassan est le co-responsable avec Toufik du carnage qui a mis fin à la prise d’otages au siège du site gazier d’in Amenas en 2013, moyennant une opération aveugle, au cours de laquelle 39 civils étrangers ont été tués.
L’acquittement formel du général Hassan par la cour d’appel militaire de Blida revêt une signification particulière. Il entérine le retour aux affaires de Toufik et de Khaled Nezzar, qui avait également témoigné en sa faveur en 2015. Acquitter l’homme de confiance de Toufik est un message public aux généraux de l’armée, encore indécis, ou aux rares rescapés de la purge qui cible le clan Gaïd Salah au sein de l’ANP. En faisant acquitter son beau-frère (ce qui restaure au demeurant tous les avantages qu’il avait, en tant que général), Toufik, naguère humilié, proclame aujourd'hui sa toute-puissance retrouvée. Il montre aussi que la vengeance est le ressort qui explique le mieux les actions des revenants du duo Toufik-Nezzar. Avec le retour aux affaires de ces deux hommes, «l’Algérie nouvelle», que tente laborieusement de vendre le président Tebboune aux médias, n'est finalement qu'un remake de l’ancien régime.