Allemagne: rétablissement des contrôles à toutes les frontières du pays

Le chancelier allemand Olaf Scholz, durant un discours défendant la politique migratoire de son gouvernement devant le Bundestag, le 11 septembre 2024.

Pour lutter contre l’immigration irrégulière, l’Allemagne commence ce lundi à rétablir des contrôles à l’ensemble de ses frontières. «De telles mesures doivent rester strictement exceptionnelles», a réagi la Commission européenne, alors que des pays frontaliers critiquent une décision «unilatérale» et «inacceptable».

Le 16/09/2024 à 07h41

Berlin commence ce lundi à rétablir, pendant six mois, des contrôles à l’ensemble de ses frontières pour lutter contre l’immigration illégale. Des contrôles policiers mobiles et stationnaires avec la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Belgique et le Danemark vont ainsi s’ajouter à ceux déjà en place aux frontières avec la Pologne, la République tchèque, l’Autriche et la Suisse.

En principe, de tels contrôles aux frontières intérieures sont proscrits au sein de l’Espace Schengen, mais en cas de menaces pour l’ordre public ou la sécurité, ils sont possibles pour une durée de six mois, avec prolongation par périodes de six mois pour une durée n’excédant pas deux ans.

La Commission européenne a réagi en rappelant que «de telles mesures doivent rester strictement exceptionnelles» et plaidé pour qu’elles soient «proportionnées». Berlin a justifié sa décision en invoquant «la protection de la sécurité intérieure contre les menaces actuelles du terrorisme islamiste et de la criminalité transfrontalière».

Attentat et contexte électoral

Fin août, à Solingen (ouest), une attaque au couteau, commise par un Syrien et revendiquée par Daech a fait trois morts. Depuis, le gouvernement du chancelier Olaf Scholz a durci l’arsenal anti-immigration irrégulière, dans un contexte électoral qui a vu une forte pousse de l’extrême droite lors de deux scrutins régionaux début septembre. Un troisième est prévu à la fin de la semaine dans le Brandebourg, région frontalière de la Pologne.

Pendant des années, l’Allemagne avait ouvert grand ses portes à plus d’un million de réfugiés, essentiellement syriens, lors de la crise migratoire en 2015-2016, puis après l’invasion par la Russie de l’Ukraine, en 2022, accueillant de nouveau plus d’un million d’exilés. Sous la pression politique domestique, Berlin fait désormais machine arrière.

«Aucun pays au monde ne peut accueillir les réfugiés de manière illimitée», s’est justifiée la ministre de l’Intérieur Nancy Faeser, même si le nombre total de demandes d’asile au cours des huit premiers mois de l’année (160.000) est en recul de 21,7% sur un an.

Protestations

En Autriche, le ministre de l’Intérieur a déjà prévenu que Vienne «n’accepterait pas les personnes refoulées d’Allemagne» par les nouveaux contrôles. En première ligne, la Grèce, actuellement confrontée à une forte hausse des arrivées en provenance de Turquie, a prévu d’envoyer son ministre de la Migration lundi à Berlin.

Son Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a jugé que «la réponse ne pouvait pas être la suppression unilatérale de Schengen et de renvoyer la balle aux pays qui ont des frontières avec l’extérieur de l’Europe».

Varsovie a parlé d’une mesure «inacceptable». «Il est très mauvais que les frontières intérieures de l’UE soient restituées. Cela touchera des millions de citoyens polonais, mais aussi allemands. La grande réussite de l’UE, l’espace Schengen, est mise en péril par de telles décisions», a dit le ministre polonais de l’Intérieur Tomasz Siemoniak.

Les travailleurs frontaliers craignent également de se voir gênés dans leurs déplacements. Le SSW, parti de la minorité danoise du Schleswig-Holstein, région allemande frontalière du Danemark, a fustigé cette décision la qualifiant «d’actionnisme pur» et pointé les effets désastreux sur les quelque 12.800 salariés qui franchissent chaque jour la frontière.

Par Le360 (avec AFP)
Le 16/09/2024 à 07h41