Alors que la levée des droits de douane en mai 2022 a fait bondir l’afflux de produits agricoles ukrainiens dans l’UE, plusieurs pays riverains (Pologne, Hongrie, Slovaquie, Bulgarie) ont unilatéralement interdit mi-avril l’importation de céréales d’Ukraine face à la saturation des silos sur leur territoire et à l’effondrement des prix locaux.
Gardienne de la politique commerciale de l’UE, la Commission européenne avait conclu fin avril avec ces quatre Etats et la Roumanie un accord prévoyant jusqu’au 5 juin des «mesures de sauvegarde» pour leur permettre de bloquer sur leur sol la commercialisation de blé, maïs, colza et tournesol ukrainiens, à condition qu’ils n’empêchent pas leur transit vers d’autres pays.
«Il est nécessaire de prolonger (ces restrictions) au minimum jusqu’à fin octobre, et idéalement jusqu’à la fin de l’année, après les récoltes, sans quoi nous aurons un énorme problème», a indiqué M. Wojciechowski à l’issue d’une réunion des ministres de l’Agriculture de l’UE.
Il a cependant précisé que la Commission n’avait pas arrêté sa position. «Le problème est qu’il y a désormais davantage de céréales dans les réserves des états riverains qu’en Ukraine. Nous devons prolonger les restrictions temporaires d’importation pour améliorer la situation», a-t-il ajouté, appelant à muscler les moyens logistiques pour désengorger les stocks de céréales.
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Ces restrictions ont été dénoncées par le ministre ukrainien de l’Agriculture Mykola Solsky, présent à Bruxelles mardi: «Nous pensons que leur prolongation n’est pas la bonne marche à suivre, nous nous y opposons», a-t-il indiqué, estimant que cela ferait le jeu de Moscou.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait déjà fustigé des «mesures protectionnistes sévères, voire cruelles».
Les restrictions sont également contestées par 12 Etats de l’UE, dont la France et l’Allemagne, qui avaient exprimé mi-mai leurs «sérieuses inquiétudes» sur ce «traitement différencié au sein du marché intérieur» et réclamé «des discussions supplémentaires» sur l’aide de 100 millions d’euros proposée par Bruxelles pour les agriculteurs des cinq pays affectés.
«J’espère avoir convaincu les Etats membres que (cette aide) est juste, que les critères choisis sont équitables, j’espère qu’il n’y a plus d’obstacles au vote de cette aide, et qu’elle sera transférée aussi vite que possible aux agriculteurs», a assuré Janusz Wojciechowski.
Face aux difficultés des pays riverains de l’Ukraine, «il faut des réponses collectives et pas individuelles, sinon on ouvre la porte à quelque chose de mauvais pour l’esprit de la construction européenne», a cependant prévenu mardi le ministre français Marc Fesneau.