"Nos institutions prendront les mesures nécessaires à compter de lundi pour soulager les marchés", a déclaré Berat Albayrak, le gendre du président, à la tête d'un super-ministère des Finances, dans une interview au grand quotidien Hurriyet.
"Nous avons préparé un plan d'action pour nos banques et les petites et moyennes entreprises, les secteurs les plus affectés par les fluctuations monétaires actuelles", a-t-il encore indiqué, martelant: "Comme je l'ai dit, tous nos plans de mesures et d'actions sont prêts".
Dans les premières heures en Asie lundi, la livre turque a chuté à un nouveau plus bas historique: le dollar s'échangeait ainsi à 7,2362 livres à 04H51 (dimanche à 19H51 GMT), contre le précédent plancher de 6,87 livres vendredi. La livre s'est ensuite redressée, le billet vert se situant autour de 7 livres vers 02H00 GMT. Vers 02H00 GMT, la Bourse de Tokyo accentuait ses pertes, le Nikkei lâchant plus de 1,7%.
Fortement secouée depuis plusieurs semaines, la lire turque avait dévissé vendredi de 16% face au billet vert.
Dimanche, le président Erdogan avait prévenu qu'il entendait riposter à ce qu'il a qualifié de "complot politique" américain conre la Turquie en cherchant "de nouveaux marchés et alliés". Déclarations chocs, sanctions, menaces de représailles, puis doublement des tarifs douaniers américains sur l'acier et l'aluminium turc : le ping-pong entre les deux alliés au sein de l'Otan est allé crescendo ces derniers jours, emportant avec lui la livre turque.
Au coeur de cette bataille : le sort du pasteur américain Andrew Brunson, actuellement jugé en Turquie pour "terrorisme" et "espionnage", placé fin juillet en résidence surveillée après un an et demi de détention.
M. Erdogan n'entend faire aucune concession: "Le but de l'opération est d'obtenir la reddition de la Turquie dans tous les domaines, de la finance à la politique. Nous affrontons de nouveau un complot politique en sous-main. Avec l'aide de Dieu, nous surmonterons cela", a-t-il déclaré devant des partisans réunis à Trébizonde, sur la Mer noire (nord-est).
M. Erdogan n'a pas semblé outre mesure inquiet de la décision du président Donald Trump, annoncée dans un tweet, de doubler les tarifs douaniers sur l'acier et l'aluminium turcs.
Si Washington est prêt à sacrifier ses relations avec Ankara, la Turquie réagira "en passant à de nouveaux marchés, de nouveaux partenariats et de nouveaux alliés, aux dépens de celui qui a lancé une guerre économique contre le monde entier, y compris notre pays", a-t-il menacé.
L'alliance en jeu ?
"Certains ferment les portes et d'autres en ouvrent de nouvelles", a ajouté le président turc, qui a renforcé ces dernières années ses liens avec des pays d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie. Il a laissé entendre que c'était l'ensemble de l'alliance entre la Turquie - devenue membre de l'Otan en 1952 avec le soutien de Washington - et les Etats-Unis qui était en jeu. Les Etats-Unis disposent d'une importante base à Incirlik, dans le sud du pays, actuellement utilisée comme centre des opérations contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI).
La Turquie reproche aussi aux Etats-Unis le soutien apporté en Syrie aux Unités de protection du peuple kurde (YPG). Ankara voit dans cette milice une émanation du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), classé "terroriste" par la Turquie mais aussi les Etats-Unis.
"Nous ne pouvons que dire +good bye+ à quiconque décide de sacrifier son partenariat stratégique et une alliance d'un demi-siècle avec un pays de 81 millions d'habitants pour sauvegarder ses relations avec des groupes terroristes", a-t-il tonné.
"Vous osez sacrifier la Turquie et ses 81 millions d'habitants pour un pasteur lié à des groupes terroristes?" s'est-il indigné.
Les Etats-Unis demandent la libération immédiate du pasteur, qui risque jusqu'à 35 ans de prison, alors que la Turquie plaide pour l'extradition de Fethullah Gülen, prédicateur turc établi depuis près de 20 ans sur le sol américain et soupçonné par Ankara d'être l'architecte du putsch manqué de juillet 2016.