"Le Qatar est un partenaire fort et un ami de longue date des États-Unis", "nous espérons que les discussions d'aujourd'hui vont renforcer nos liens stratégiques", a déclaré le secrétaire d'État américain Rex Tillerson à l'ouverture du premier "dialogue stratégique" entre les deux pays, à Washington.
Les relations n'ont pas toujours été au beau fixe depuis l'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche il y a un an. En mai, dans un discours à Riyad, le président américain avait appelé les pays musulmans à agir de manière décisive contre l'extrémisme religieux et l'influence iranienne dans la région.
Début juin, l'Arabie saoudite et ses alliés arabes avaient invoqué ce discours musclé pour rompre leurs relations avec le Qatar voisin et imposer un strict blocus économique à ce petit émirat, accusé de soutenir le "terrorisme" et de se rapprocher de Téhéran. Et les premières réactions de Donald Trump, appelant Doha à cesser "immédiatement" de financer "le terrorisme", avaient conforté leur stratégie d'isolement, malgré les efforts de Rex Tillerson pour apaiser les tensions.
Lire aussi : Washington ne lâche pas le Qatar en pleine crise du Golfe
Depuis, le président des États-Unis a adouci le ton, et même proposé la médiation américaine pour mettre fin à la crise du Golfe -en vain.
Aujourd'hui, le chef de la diplomatie américaine estime que depuis le discours de Riyad et le "défi lancé par le président Trump à tous nos partenaires du Golfe", "le Qatar a fait d'importants progrès dans la lutte antiterroriste".
"L'administration Trump doit dire clairement que Doha n'a pas été blanchi", et ce dialogue doit servir à "évaluer" si l'émirat coupe bien "aux soutiens du terrorisme tout accès à son système financier", met en garde Varsha Koduvayur, du groupe de pression conservateur Foundation for Defense of Democracies.
La page semble en tout cas tournée. "Le simple fait d'organiser ce dialogue" montre "que la relation entre le Qatar et les Etats-Unis est très profonde, très stratégique à tous les niveaux", fait-on valoir dans la délégation qatarie.
Les deux pays ont signé mardi des accords pour annualiser ce "dialogue stratégique" -le prochain aura lieu en 2019 à Doha-, renforcer la coopération militaire et sécuritaire et combattre le trafic d'êtres humains. Lundi, ils avaient conclu une entente très attendue côté américain pour accroître la "transparence" autour de la compagnie aérienne Qatar Airways, accusée par ses concurrentes américaines de toucher des subventions publiques déguisées.
Lire aussi : Washington approuve un nouveau contrat d'armement avec le Qatar malgré la crise du Golfe
Ce rapprochement reste toutefois gâché par l'impasse dans la crise entre le Qatar d'une part, et d'autre part l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l'Égypte et Bahreïn, au moment où Washington aimerait faire bloc avec ses alliés sunnites pour contrer sa bête noire régionale, l'Iran chiite, ainsi que le groupe jihadiste État islamique (EI).
"Au Qatar, nous sommes désormais au-delà de la crise et du blocus", assure-t-on dans la délégation de Doha, en mettant en avant la diversification des relations bilatérales et une croissance supérieure à celle des autres économies du Golfe. Mais le ministre des Affaires étrangères, cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al-Thani, a reconnu mardi que "ce blocus", "illégal et injustifiable", allait "à l'encontre des efforts communs pour apporter de la stabilité à la région".
Et les Américains ont exprimé leur inquiétude persistante. "Les États-Unis restent aussi préoccupés aujourd'hui qu'aux débuts de la crise du Golfe il y a près de huit mois", a expliqué Rex Tillerson, évoquant des "conséquences économiques et militaires négatives". Après avoir attribué fin 2017 une grande part de responsabilité dans l'impasse à Riyad, il a appelé toutes les parties à la "retenue".
"Il faut absolument" que les pays du Golfe "retrouvent leur cohésion" pour "améliorer notre efficacité sur plusieurs fronts, notamment pour combattre le terrorisme, vaincre l'EI et contrecarrer l'influence néfaste de l'Iran", a renchéri le ministre américain de la Défense Jim Mattis.