L’audience du candidat républicain à la présidentielle du 5 novembre est bien moindre que sur son ancien réseau de prédilection Twitter, devenu X, dont il avait été temporairement banni. Mais son rythme de publication y est tout aussi régulier: plus de 30 fois par jour en moyenne en septembre, souvent tard le soir.
Kamala Harris est «coupable de CRIMES», elle «devrait être DESTITUÉE, POURSUIVIE EN JUSTICE, ou LES DEUX», écrit le milliardaire, adepte des majuscules, dans ses diatribes à l’image de ses meetings: toujours plus violentes. Il n’hésite pas à dire de sa rivale qu’elle est «folle», «retardée mentalement» ou qu’elle paye ses supporters. Il promet aussi, s’il est élu, de «punir» sévèrement ceux qui «ONT TRICHÉ» aux élections de 2020, pour lesquelles il n’a jamais reconnu sa défaite, et de 2024, pour lesquelles il laisse planer le doute.
Pour des experts, il consolide ainsi sa base la plus radicale et pose les bases d’une possible contestation des résultats de l’élection de novembre en multipliant les avertissements quant à de possibles fraudes.
«Un homme désespéré»
Sa base «adore ce grand n’importe quoi», souligne Larry Sabato, de l’université de Virginie. «Mais il y a des millions d’autres personnes, pas loin de voter pour lui, qui pourraient s’en horrifier», ajoute-t-il. «Les gens devraient être forcés de regarder et d’écouter ses posts au réveil.»
Si certains pavés repoussent la limite de 1.000 caractères imposée sur Truth Social, d’autres sont plus concis. «JE HAIS TAYLOR SWIFT», a-t-il ainsi lancé à propos de la pop star qui soutient publiquement Kamala Harris.
Sondages favorables, liens vers des médias conservateurs et fausses informations sur l’avortement ou l’immigration sont monnaie courante sur son profil. Il y accuse notamment Kamala Harris d’être responsable de l’immigration clandestine à la frontière avec le Mexique et utilise des chiffres souvent obsolètes ou trompeurs sur la criminalité parmi les migrants.
La candidate démocrate ignore la plupart de ces insultes et préfère titiller l’ego de son adversaire en le qualifiant de «bizarre» ou en mettant en doute le nombre de supporters présent à ses meetings. Mais sa campagne ne se prive pas de relever chaque fausse information partagée par Donald Trump, sans vraiment enrayer leur propagation.
Pour John Jost, professeur de psychologie et de politique à l’université de New York, «Trump est un homme désespéré. Il est prêt à dire n’importe quoi, peu importe la vérité». Son activité signale «une crainte, une immense anxiété et une haine» totale quant à la possibilité de perdre les élections, juge-t-il.
«Des ennuis»
«C’est avec les partages (d’autres posts) qu’on a des ennuis», a récemment déclaré Donald Trump dans un podcast après avoir été critiqué pour avoir relayé un post affirmant que Kamala Harris avait obtenu des avantages politiques en échange de «faveurs» sexuelles.
Cela ne l’a pas empêché de partager d’autres théories conspirationnistes ou ouvertement racistes depuis. Après l’arrestation du rappeur P. Diddy pour trafic sexuel, Donald Trump a partagé une image falsifiée montrant Kamala Harris à ses côtés.
«Même pour moi qui suis Trump sur les réseaux sociaux depuis neuf ans, c’est choquant», affirme le chercheur Larry Sabato. Par le passé, «n’importe quel candidat qui aurait écrit un commentaire aussi tordu aurait perdu la nomination de son parti».
Donald Trump a aussi massivement participé à relayer des accusations fausses selon lesquelles des migrants haïtiens dans l’Ohio auraient capturé des animaux de compagnie pour les manger, une polémique qui a un temps monopolisé la campagne. Résultat, les migrants haïtiens ont fait l’objet de menaces dans cet Etat du nord-est.
«Ses posts encouragent, normalisent et diffusent des idéologies extrémistes», constate Jared Holt, de l’Institut pour le dialogue stratégique. Ce chercheur craint que cela n’enhardisse «les parties les plus sombres du mouvement conservateur moderne».