L'idée d'une telle pilule surnommée "polypill" et parfois surperpilule, dont la composition peut varier, date d'une vingtaine d'années. Mais cette nouvelle étude, publiée par la revue médicale The Lancet, est la première menée à grande échelle pour évaluer son efficacité dans la population sur une telle durée.
Cet essai comparatif, avec tirage au sort de ceux recevant la polypill plus des conseils d'hygiène de vie (arrêt du tabac, activité physique...) ou seulement des conseils, a concerné une population rurale turkmène d'Iran.
90% des quelque 7.000 participants, âgés de 50 à 75 ans, n'avaient pas d'antécédents de maladies cardiovasculaires (MCV). Près de la moitié étaient des femmes.
Par comparaison aux seuls conseils sur le mode de vie, prendre la pilule combinée a réduit le risque d'accidents cardiovasculaires majeurs de 34% dans l'ensemble et d'environ 40% chez les personnes sans antécédents de MCV sur cinq ans (4,5% contre 7,5%), et d'environ 20% chez les patients déjà atteints de maladies cardiovasculaires.
Les effets du traitement ont notamment été similaires chez les hommes et les femmes et chez les plus ou moins jeunes.
Lire aussi : Vidéo. CHU Ibn Rochd: une campagne de chirurgie cardiaque au profit des enfants
Après ajustement pour tenir compte des gens prenant d'autres médicaments cardiovasculaires, l'effet protecteur global de la polypill tombe à 22% (contre 34%), mais est resté statistiquement significatif, note The Lancet.
Dans l'ensemble, les participants ont fait preuve d'une grande observance du traitement : environ 63% d'entre eux ont pris la pilule comme recommandé (au moins 70% du temps).
La pilule testée contenait de faibles doses de deux médicaments contre l'hypertension (un diurétique, l'hydrochlorothiazide 12,5 mg et l'énalapril 5 mg) ainsi qu'une dose modérée (20 mg) d'un anti-cholestérol, l'atorvastatine, et 81 mg d'aspirine, indiquent Gholamreza Roshandel, de l'université des sciences médicales de la province iranienne du Golestan, et ses collègues.
"Plus des trois quarts des 18 millions de personnes qui meurent de maladies cardiovasculaires chaque année vivent dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires, rappelle le Dr Nizal Sarrafzadegan, de l'Université des sciences médicales d'Ispahan, co-auteur.
La stratégie d'une multi-pilule, de bas prix, "si elle était adoptée à grande échelle, pourrait jouer un rôle clé dans la réalisation de l'objectif ambitieux des Nations Unies: réduire la mortalité prématurée due aux maladies cardiovasculaires d'au moins un tiers d'ici 2030", estime-t-il.
L'étude ne permet pas de généraliser à d'autres populations. Cependant, une pilule regroupant un cocktail de médicaments rend plus facile le respect du traitement.
"Les futures études devraient comparer la polypill aux médicaments pris séparément, avec des résultats à long terme", et également évaluer ses effets "dans la population générale de différents pays", commente le Dr Amitava Banerjee (University College London), qui n'est pas impliqué dans l'étude.